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La Fausta

Titel: La Fausta Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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vision bouleversa l’enfant, et fit déborder le deuil de son cœur : elle frémit et un sanglot plus atroce déchira sa gorge.
    — Ah çà ! vociféra Belgodère. Vas-tu aller chanter, par tous les diables !
    Violetta le regarda, affolée ; elle joignit les mains dans un geste d’horreur.
    — Chanter ! râla-t-elle. Chanter quand ma mère morte est là encore ! Oh ! tuez-moi plutôt !
    Le bohémien la saisit rudement par le bras, se pencha sur elle, et d’une voix blanche de fureur :
    — Ecoute bien, la chanteuse ! Je ne te tuerai pas…, car on t’attend… des princes, des ducs, te dis-je ! Seulement choisis ; ou tu vas prendre ta guitare et faire entendre ta jolie voix ou je me mets à fouetter… ta mère !
    En même temps, le bandit saisit un fouet à chiens… Violetta jeta un cri d’épouvante insensée. Elle eut, autour d’elle, ce regard de la biche aux abois, qui exprime plus que de la douleur, plus que du désespoir… et ce regard s’arrêta sur Saïzuma !…
    Belgodère, avec un sinistre ricanement, leva le fouet sur la morte !… La jeune fille courut à la bohémienne, lui saisit les deux mains, et d’une voix étranglée :
    — Madame ! Madame ! Défendez-la ! Protégez-la ! Elle est morte, madame ! Souvenez-vous qu’elle vous a soignée ! Oh ! elle ne m’entend pas ! Allez-vous laisser frapper une morte ?… Ma mère !…
    — Qui parle ici de mère ? dit la bohémienne, hagarde. Est-ce qu’il y a des mères ! Est-ce qu’il y a des enfants !…
    — Pitié, madame ! Cet homme vous écoute et vous craint ! Un mot ! Dites un mot !
    — Attention ! hurla Belgodère. Décide-toi !
    Violetta se tordit les bras.
    — Oh ! cria-t-elle affolée, vous n’avez pas de cœur, bohémienne !
    — Pas de cœur ! dit sourdement Saïzuma. Il est perdu, mon cœur… J’en avais un… Il est resté là-bas… dans l’immense église… Jeune fille, écoute ! Prends garde à l’évêque voleur de cœurs !…
    — Misérable folle ! sanglota l’enfant. Tu ne veux rien faire pour ma mère ! Eh bien, écoute à ton tour ! moi, la fille, je te maudis ! Entends-tu ! Maudite sois-tu ! par moi !…
    Saïzuma éclata de rire !… Et lentement, elle remit son masque rouge sur son visage… Violetta se tourna vers le bohémien au moment où il laissait retomber le fouet… Elle bondit… Ce fut elle qui reçut le coup sur ses épaules…
    — Grâce, Belgodère ! Je t’obéirai… j’irai chanter !…
    — A la bonne heure ! dit froidement le sacripant qui tendit la guitare à l’enfant.
    Elle la saisit lentement d’un mouvement de désespoir concentré, et le visage ruisselant de larmes, murmura :
    — Chanter !… Près du corps de ma mère !… O ma pauvre maman, pardonne-moi ce sacrilège… Obéir !… Chanter devant cette foule pour gagner quelques pièces de monnaie… un peu d’argent !… De l’argent ! ajouta-t-elle en tressaillant soudain, illuminée par une profonde et touchante pensée. Mais avec de l’argent… je pourrais… oh ! ma mère ! … oui !… J’irai chanter !… Mais dût le bohémien me tuer, ce sera pour t’acheter un bouquet… ce sera pour fleurir ton pauvre cercueil !…
    Elle s’inclina rapidement, baisa la morte au front, et s’élança au-dehors. Belgodère, lui jetant un regard de terrible joie, grinça entre ses dents :
    — Va, fille de bourreau ! Cours au piège que je t’ai tendu ! Guise t’attend ! Demain tu seras infâme ! Et ton infamie de ribaude jetée par moi dans la couche du soudard, nul autre que moi ne la dira à ton père !… Ah ! maître Claude ! Ah ! bourreau ! C’est moi qui deviens ton bourreau ! Chacun son tour !
    Et alors il descendit les marches branlantes du petit escalier en hurlant :
    — Messeigneurs, voici la chanteuse ! Place, manants ! Place à l’illustre chanteuse Violetta ! Et vous, monsieur Picouic ! Et vous, monsieur Croasse ! Fainéants ! Faites ranger ce peuple…
    Deux hercules qui, avec Saïzuma, diseuse de bonne aventure, et Violetta, chanteuse, complétaient la troupe de Belgodère, se mirent à distribuer au menu peuple force horions et bourrades, et bientôt un grand cercle se forma, au centre duquel la pauvre adorable créature accordait sa guitare sur laquelle tombaient des larmes silencieuses.
    A deux pas de la petite chanteuse, un groupe de gentilshommes, favoris de Guise ; et en avant d’eux, le duc, pâle, agité, l’œil rivé

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