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La Fausta

Titel: La Fausta Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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croisa les bras. Guise haussa les épaules.
    — Allons, dit-il, j’étais venu pour voir un paladin, un fier-à-bras… Gardes, conduisez-le à la Bastille… je suis fort marri de m’être dérangé pour ne voir qu’une figure de lâche.
    Pardaillan se mit à sourire. Mais ce sourire était livide. Il étendit le bras : du doigt, il désigna le visage du duc. Et d’une voix qui parut être très calme à ceux qui l’entendirent, mais qui n’eût été reconnue d’aucun de ceux qui la connaissaient, il dit :
    — Je croyais me rendre au bourreau ; je me suis trompé : je ne me suis rendu qu’à Henri le Souffleté. Tenez-moi bien, Henri de Lorraine, pendant que vous me tenez ! Tuez-moi bien, pendant que vous pouvez m’assassiner ! Et si vous croyez au Dieu à qui, voici seize ans, vous avez offert vingt mille cadavres d’innocents, si vous croyez à ce Dieu que vous allez prêchant, pour voler un trône, priez-le bien ! Car j’en jure par le nom de mon père, si vous ne me tuez pas, je vous tuerai moi ! Et ce mot que vous venez de me jeter, je le ramasse et je vous le renfoncerai dans la gorge avec la pointe de ma dague !… Gardes, en avant !…
    Pardaillan se mit à marcher, entouré par les arquebusiers qu’il paraissait conduire, tant ils avaient semblé obéir à son commandement… et il passa non comme un prisonnier qu’on emmène, mais comme un roi qu’on escorte…
    — A la Bastille ! gronda le Balafré en jetant autour de lui des regards sanglants comme s’il eût cherché quelqu’un sur qui faire retomber sa haine et sa rage. A la Bastille ! Et qu’on prévienne à l’instant le tourmenteur-juré !…
    Huguette, à genoux dans la grande salle de la
Devinière
, murmurait :
    — Maintenant, c’est à moi de le sauver !…
    q

Chapitre 44 CONSEIL DE FAMILLE
    G uise se mit en marche vers son hôtel. De furieuses acclamations le saluèrent. Dans l’amour de ce peuple délirant, il comprit qu’il y avait une grande haine. Et songeant à la parole de Pardaillan, Guise tressaillit et, pensif, leva sa tête violente vers le ciel, comme pour lui demander si l’heure était venue d’un nouveau carnage, d’un nouvel holocauste.
    — Vive ! vive Henri le Saint ! Vive ! vive le pilier de l’Eglise !…
    — La messe ! La messe ! vive le roi de la messe !…
    — Mort à Hérode ! Mort à Navarre ! Mort aux parpaillots ! Vive Lorraine !…
    — Dieu le veut ! Dieu le veut !…
    Au même moment, Henri de Guise fut enlevé, arraché de sa selle, et porté sur les épaules du peuple. Au loin dans la rue, des coups d’arquebuse retentirent. On tirait sur des maisons suspectes. Les gens se regardaient avec des yeux hagards, exorbités par la haine, et malheur à ceux qui ne portaient pas le chapelet autour du cou ! En un instant, catholique ou non, quiconque n’avait pas le signe tombait assommé, éventré, déchiqueté… il y en eut une trentaine tués sur le passage de Guise qui souriait aux femmes, et du haut des épaules qui le portaient, flamboyant, heureux, en plein dans son élément, soulevait son chapeau et criait :
    — Oui, mes amis ! Dieu le veut !…
    Ce fut ainsi que, ce jour-là, le Balafré regagna son hôtel.
    Le soir tombait. Dans Paris, la houle inapaisée continua à déferler ; des rumeurs passaient ; dans chaque quartier, les ligueurs s’assemblaient ; les capitaines endossaient à la hâte la cuirasse ; déjà la liste des maisons suspectes passait de mains en mains…
    Le duc de Guise avait fait fermer les portes de son hôtel. Non qu’il eût peur de cet orage qui se préparait. D’abord la foule ne le menaçait que de trop d’enthousiasme ; ensuite, même si elle eût été hostile, Guise, prince, grand seigneur, prétendant au trône, avait un grand mépris pour le populaire ; enfin, son hôtel était comme une forteresse hérissée d’arquebuses, et capable de tenir tête à une armée. Guise ne craignait donc rien. Mais il avait besoin de se recueillir, de réfléchir sur ce qu’il venait de voir. De toute évidence, Paris était à bout de patience. Il fallait trouver un moyen de l’occuper et de l’amuser.
    Guise entra dans son vaste cabinet. Il était suivi de Maineville et de Bussi-Leclerc, ses favoris.
    — Mais je ne vois pas Maurevert, dit-il.
    — Monseigneur, fit Maineville, Maurevert digère…
    — Il choisit bien son temps pour dîner et digérer. Qu’on aille me le chercher.
    — Laissez-moi achever,

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