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La Fausta

Titel: La Fausta Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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qu’une pensée qui compte pour moi : c’est mon amour ; il n’y a qu’une image qui se précise dans mon esprit : c’est celle de Violetta… Vous voyez que je ne suis pas du tout ce que vous pouviez penser, et que ce que vous avez de mieux à faire, c’est de m’abandonner…
    Charles avait prononcé ces derniers mots d’une voix de plus en plus basse. A la fin, deux grosses larmes jaillirent de ses yeux.
    — Pauvre petit ! murmura Pardaillan en le contemplant avec un admirable attendrissement.
    Et il croyait se revoir lui-même, dans la fleur de sa jeunesse, pleurant et soupirant après celle qu’il aimait. Un sourire très doux vint voltiger sur ses lèvres. Car rien n’est cher au cœur de l’homme comme le souvenir inoubliable de ce qui fut son premier amour.
    — Je vous fais honte, n’est-ce pas ? reprit Charles avec une sorte de fierté timide.
    Pardaillan se leva, marcha au jeune homme et lui prit la main.
    — Non, mon enfant, dit-il simplement. Et à ce mot « mon enfant », Charles se sentit frémir, tant il y avait de douceur consolatrice et puissante dans ce mot. Pourquoi vous mépriserais-je ? Pourquoi jugerais-je que vos pensées sont pauvres ?… De toutes les occupations, l’amour est la plus noble, la plus humaine, en ce sens que c’est elle qui fait le moins de mal aux autres hommes. L’ambitieux est un fauve. Un jour viendra où les hommes condamneront le crime d’ambition comme ils condamnent le crime de meurtre ou de vol…
    — Pardaillan ! Pardaillan ! s’écria Charles éperdu, quelles sont ces pensées que je ne comprends pas ?…
    — Quant à la vengeance, poursuivit le chevalier, j’avoue qu’elle peut procurer quelque satisfaction aux esprits inquiets. Mais l’amour, voyez-vous, mon prince, c’est la vie elle-même. Le reste est malfaisance ou néant. Par la mort-dieu, la conquête de la femme aimée est autrement précieuse et intéressante que la conquête d’un trône ! Vivez votre vie, morbleu ! Vivre ! c’est aimer tout ce qui est aimable. Le soleil et la pluie sont aimables. L’air pur des grandes plaines, les forêts vertes l’été, couvertes de neige l’hiver, la terre, la bête qui vous regarde d’un œil craintif et suppliant, le pauvre hère qui passe, mon camarade, mon ami… j’aime tout cela, moi ! Aimez donc, si vous voulez savoir la vie, aimez la vie partout où elle se trouve et, par-dessus tout, aimez votre Violetta, qui est bien, après celle que j’aimais, la créature la plus exquise que j’aie jamais vue dans le rayonnement de la lumière du jour…
    Le fils de Charles IX frémissait. Son cœur se gonflait d’amour et de désespoir. Et c’était bien l’enfant de ce bon bourgeois un peu poète, un peu musicien, un peu fou qu’avait été Charles IX, lequel n’avait qu’un bonheur : c’était de fuir le Louvre et de venir reposer sa tête sur le sein de Marie Touchet.
    — Pauvre petit ! répéta Pardaillan. Allons, reprit-il à haute voix, ne vous chagrinez pas ainsi. Il n’y a qu’une chose au monde qu’il n’y ait vraiment pas moyen de réparer : c’est la mort. Tout le reste s’arrange. Ah ! si votre Violetta était morte, je concevrais votre désespoir, mais…
    — Qui sait si elle n’est pas morte ! fit sourdement Charles. Ou pis encore, Pardaillan ! qui sait si elle n’est pas au pouvoir de cet homme !…
    — Bon ! Supposons même cela ! Eh bien, vous pouvez m’en croire, la femme qui aime est capable de toutes les malices et de tous les héroïsmes pour se garder à celui qu’elle a élu. Si Violetta vous aime, vous pouvez être assuré que vous la reverrez…
    Longtemps encore, Pardaillan parla sur ce ton. Et pour ceux qui ne le connaissaient pas, qui ne l’avaient jamais vu que dans le flamboiement de l’épée, dans le tumulte des bagarres, c’était une chose étonnante que les paroles si bonnes et si simples par quoi il berçait la douleur de celui qu’il appelait pauvre petit.
    Charles, écrasé de fatigue par ces journées de recherches ardentes et inutiles, s’était jeté dans un fauteuil. Peu à peu ses yeux se fermèrent. La nuit était venue. Pardaillan, doucement, referma la fenêtre, jeta un dernier regard de pitié sur son compagnon ; puis, ce regard de pitié, si nous pouvons dire, rejaillit sur lui-même :
    — Et moi ? murmura-t-il, qui me consolera ?… Bah ! je n’ai pas besoin d’être consolé, moi !
    Et il sortit sur la pointe des pieds.
    Sur la

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