Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
La fée Morgane

La fée Morgane

Titel: La fée Morgane Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean Markale
Vom Netzwerk:
appartient cette
demeure est l’un des meilleurs hommes du monde, du moins lorsqu’il reçoit des
voyageurs à sa table. Il te fera bon accueil et tu pourras te reposer tant que
tu voudras. » Yvain prit congé de Luned et partit, toujours accompagné de
son lion. Il eut tôt fait de découvrir la forteresse avec ses hautes tours. Mais,
si l’ensemble des bâtiments qui la composaient paraissait solide et imprenable,
tout le terrain, au-dessous, était ravagé, et l’on y voyait des ruines de
maisons à profusion.
    Yvain se présenta à la porte de la forteresse. Aussitôt, six
ou sept valets descendirent le pont et allèrent à sa rencontre. Mais ils furent
fort effrayés quand ils virent le lion et prièrent le chevalier de laisser l’animal
à la porte. « Il n’en est pas question ! s’écria Yvain. Je n’entrerai
pas sans lui. Nous logerons ici tous les deux, ou je resterai dehors moi-même, car
ce lion est mon ami. D’ailleurs, vous n’avez rien à craindre de lui. Je le
garderai bien, soyez tranquilles. » On les fit entrer et l’on s’occupa du
cheval, mettant de la nourriture en abondance devant lui.
    Yvain fut accueilli par le comte, qui était un bel homme aux
cheveux blancs. Il ordonna aux valets et aux écuyers de désarmer le chevalier
et de l’emmener dans la grande salle après lui avoir permis de se laver.
« Sois le bienvenu, seigneur, dirent-ils. Que Dieu te donne de demeurer
ici et d’en repartir joyeux et comblé d’honneurs. »
    Du plus noble jusqu’au plus humble, tous s’empressèrent autour
de lui et lui firent fête. Nulle part assurément, Yvain n’avait remarqué un
service aussi courtois et aussi bien fait. Mais il se rendit compte que ceux
qui l’entouraient pouvaient à peine dissimuler la grande tristesse qui les étreignait.
Pourtant, ils s’efforçaient de faire bon visage à leur hôte. Ils se mirent à
table. Le comte s’assit auprès d’Yvain, et sa fille unique, qui était d’une
grande beauté, de l’autre côté. Jamais Yvain n’avait vu une personne aussi
accomplie que cette jeune fille. Le lion alla s’installer sous la table, entre
les jambes d’Yvain qui lui donna de tous les mets qu’on lui servait. Le seul
défaut qu’Yvain trouvait dans ce château, c’était la tristesse de ses habitants.
Alors, au milieu du repas, il dit à son hôte : « Il est temps pour
toi d’être joyeux !
    — Dieu m’est témoin, répondit le comte, que ce n’est
pas à cause de toi, ni contre toi, que nous éprouvons tant de tristesse ! Je
vois qu’il faut que je t’explique notre situation. Mes deux fils sont allés hier
chasser dans la montagne. Mais il y a là un monstre qui mange de la chair humaine
et qui porte le nom de Harpin de la Montagne. Jusqu’à présent, il s’était
contenté de ravager mes terres et de brûler les maisons qui se trouvaient en
dehors de la forteresse. Hier, il s’est emparé de mes deux fils, et m’a fait
savoir qu’il les tuera devant moi si je ne lui donne pas ma fille unique. Ce n’est
pas qu’il veuille l’épouser, mais il veut m’humilier : il raconte à qui
veut l’entendre qu’il la livrera, pour leur plaisir, aux garçons les plus vils
et les plus dégoûtants qu’il puisse trouver. Or, c’est demain le jour fixé par
lui : je dois lui livrer ma fille, sinon il tuera mes fils devant moi. C’est
un monstre qui a une figure humaine, mais la taille d’un géant. – Voilà qui est
affreux, dit Yvain, et quel parti vas-tu prendre ? – Tu vas comprendre la
raison de notre détresse : j’ai décidé de ne pas lui livrer ma fille, car
il y va de son honneur et de notre honneur à tous. J’aime encore mieux
sacrifier mes fils que de voir cette innocente aux mains de ce monstre et de
ses abominables serviteurs. Je crois que si je commettais pareille action, j’en
mourrais de honte et dans le déshonneur le plus complet. – Tu as sans doute
raison, dit Yvain mais, en fait, cet Harpin de la Montagne, comme tu l’appelles,
ne mérite pas de vivre. » Et ils s’entretinrent d’autres sujets, sans pour
autant lever de l’atmosphère la tristesse qui régnait sur l’assemblée. Et, lorsqu’il
fut l’heure d’aller se coucher, Yvain gagna la chambre qu’on lui avait
attribuée et y dormit profondément en compagnie de son lion.
    Le lendemain, peu après le lever du jour, on entendit un
bruit effroyable : c’était le géant qui venait avec les deux jeunes gens
et qui réclamait la fille du

Weitere Kostenlose Bücher