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La fée Morgane

La fée Morgane

Titel: La fée Morgane Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean Markale
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d’abord
quand on le pourchassait dans la forteresse de Landuc, pour lui faire épouser
Laudine ensuite. Yvain se sentit brusquement rempli d’espoir : puisque
Morgane avait voulu cela, ne voulait-elle pas aussi qu’Yvain se réconciliât
avec la Dame de la Fontaine ? « Je connais le moyen de la fléchir »,
se dit-il. Et, sans plus attendre, il prit le bassin, le remplit d’eau dans la
fontaine et versa le tout sur le perron.
    La tempête fut terrifiante. Il semblait que toute la forêt
allait s’engloutir dans un abîme insondable. Dans la forteresse de Landuc, la
dame craignit que son château ne s’effondrât tout d’un coup. Les murs se
lézardèrent en plusieurs endroits, la tour trembla, et il s’en fallut de peu qu’elle
ne se renversât. Les gens avaient tellement peur qu’ils maudissaient leurs
ancêtres. « Honni soit le premier homme qui éleva une maison dans ce pays,
honnis soient ceux qui construisirent ce château ! Car, sous le ciel, ils
n’auraient pas trouvé un endroit aussi détestable, puisqu’un seul homme peut
nous envahir et nous persécuter ! » La tempête se calma cependant. Mais,
le lendemain, Yvain versa de nouveau de l’eau sur le perron, et le surlendemain
également. Il subissait lui-même les effets de l’orage et de la pluie, mais peu
lui importait : il savait bien que Laudine allait réagir d’une façon ou d’une
autre. Et quand la tempête cessait, il se réjouissait d’écouter le chant des
oiseaux sur le pin.
    Le troisième jour, Luned alla trouver Laudine. « Dame, lui
dit-elle, cela ne peut plus durer ainsi. Il nous faut trouver de toute urgence
un défenseur pour la fontaine. Or, aucun de ceux qui sont avec nous dans cette
forteresse n’est assez courageux pour affronter le péril. Nous devons aller
chercher ailleurs. – Oui, répondit Laudine, mais où aller le chercher ? As-tu
un avis, toi qui donnes parfois de si bons conseils ? – Je n’en ai pas, répondit
sèchement Luned. Et puisque nécessité fait loi, prends un de tes vassaux et
ordonne-lui de surveiller la fontaine. Je ne garantis pas le résultat, mais il
faut faire avec ce que l’on a. – Tu n’y penses pas ! s’écria la dame. Ils
sont tous plus couards les uns que les autres, et le seul bruit de la tempête
les fait se terrer dans des caves ! – Je n’ai plus rien d’autre à proposer »,
dit Luned. Et elle sortit de la chambre.
    Elle était à peine dans le corridor qu’elle entendit la
porte se rouvrir. « Attends, disait la dame, il faut que nous parlions encore. »
Luned rentra dans la chambre et s’assit en face de Laudine. Celle-ci lui
demanda : « Connais-tu bien celui qu’on appelle le Chevalier au Lion  ? – Certes, puisque c’est
lui qui m’a sauvée du bûcher où voulaient me jeter des menteurs et des félons. Et
je sais qu’il a accompli bien d’autres exploits. – C’est lui qu’il nous faut !
s’écria la dame. – Comment ? s’écria Luned. Mais tu n’y penses pas ! Il
m’a dit lui-même qu’il n’entreprendrait plus rien tant qu’il sentirait la
rancune et le mauvais vouloir d’une femme qu’il aime tendrement, car il en
meurt d’ennui et de désespoir. – Et si nous l’aidions à se réconcilier avec sa
dame ? – Ma foi, dit Luned, ce serait une bonne chose, mais c’est
impossible. – Pourquoi donc ? – Il n’a jamais voulu dire à quiconque qui
était cette femme et quelle était la raison de leur brouille. – Eh bien, tâchons
de l’apprendre. Nous ferons ainsi une bonne action vis-à-vis de lui, et il nous
le rendra en gardant la fontaine. Voyons, Luned, tu as connu le Chevalier au Lion . Je suis sûre que tu sais le
moyen de l’approcher. Va donc le trouver et fais-lui part de ma proposition :
je le réconcilie avec sa dame et il défend ma fontaine. – Je veux bien essayer,
dit Luned, mais je pense que ce sera difficile de le convaincre. » En prononçant
ces paroles, Luned riait sous cape. Elle prit congé de la dame, se fit préparer
un cheval et s’en vint immédiatement à l’endroit où elle pouvait trouver le Chevalier au Lion , c’est-à-dire près de la
fontaine.
    Yvain était assis contre le tronc d’un arbre, et le lion
dormait, blotti à ses pieds. Quand il vit Luned approcher, Yvain se leva.
« Quelles nouvelles m’apportes-tu ? demanda-t-il. – Fort bonnes, à
mon avis », répondit-elle. Et elle lui expliqua ce que proposait Laudine. Yvain
fut tout à coup envahi par une joie

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