La Femme Celte
de
virginité, mais dans son sens le plus étroit et finalement le moins sûr.
Or la racine werg n’est pas
isolée. En grec, elle a donné έργον, l’action, ainsi
que ses dérivés ένεργεια, énergie, όχγιον,
cérémonie religieuse, orgie, όργανον, instrument,
organe. On peut y rattacher le gaulois ver ,
grand puissant, qui a vraisemblablement donné le préfixe augmentatif gallois guor- , irlandais for- ,
ainsi que la préposition bretonne war , sur (au
sens latin de super ). Quant au latin vis , la force (au pluriel vires ),
ainsi que vir , l’homme (irlandais fêr , breton gour ),
il est difficile de ne pas les faire provenir de la même racine. Ainsi, la
Vierge, d’après l’étymologie (et toute étymologie peut être contestée), serait
en relation avec les idées de force, d’action, de
claustration , le tout recouvert par la féminité .
Cela est en tout cas parfaitement compatible avec la notion archaïque de la Féminité,
divine et créatrice, capable à elle seule d’assumer la prospérité et la parturition.
Cette recherche linguistique, qui repose sur des analogies ,
celles-ci étant souvent révélatrices d’un état d’esprit, nous confirme dans
cette idée que la Vierge Mère est la première divinité que les humains aient
adorée.
D’ailleurs, on en apprend beaucoup en allant fouiller dans
la Bible et dans la tradition rabbinique, à propos de la définition de la
Vierge. En effet, la Bible utilise trois termes différents pour qualifier ce
que nous nommons d’un même mot : naara, betula et alma . Le terme naara provient d’une racine qui exprime le mouvement, l’agitation, la précipitation,
et désigne « une jeune fille mariée ou non mariée », virgo intacta ou non. C’est très vague. Dans le Deutéronome (XXII, 15,16), c’est le terme employé
pour parler d’une femme mariée accusée d’avoir perdu son innocence avant le
mariage. Dans Ruth (II, 16), il s’agit d’une
veuve non remariée. Dans la Genèse , c’est le
nom donné à Rebecca qui est virgo intacta ;
mais dans la même Genèse (XXXIV, 3), à propos
du viol de Dina par Sichem, le terme naara ne
peut désigner qu’une jeune fille ayant perdu – par la force – son innocence. Il
faut noter que le masculin de naara est naar , qui veut dire « garçon, adolescent, puis
esclave », au sens latin de puer . Il n’y
a, au masculin aucune idée de chasteté dans ce mot, et d’ailleurs tout laisse à
penser que naara est un nom qu’on peut donner
à toute jeune femme, à l’exclusion des
vieilles.
Le terme betula paraît au
contraire désigner une jeune ou une vieille femme considérée comme virgo intacta ( Lévitique ,
XXI, 1, 2, 3) : le grand prêtre, qui ne doit pas s’approcher d’un corps
humain inanimé, peut cependant rendre les derniers devoirs à sa sœur si elle a
été betula , n’ayant jamais été mariée. Il faut
remarquer que la racine du mot betula signifie
« éloignement, séparation », et qu’un des dérivés du mot, le pluriel betulim , désigne l’hymen (au sens anatomique). Par
conséquent, on peut affirmer qu’une betula est
une femme, jeune ou vieille, qui a encore ses betulim .
Mais, c’est là où rien ne va plus, et il faut bien dire que les commentateurs
juifs de la Bible s’en sont donné à cœur joie sur ce thème, sans aucun
complexe ; en effet, il est reconnu médicalement – et les anciens Hébreux
le savaient parfaitement – qu’une femme ayant « connu » un homme peut
conserver cette partie de la membrane muqueuse qu’on appelle hymen, cette
membrane n’ayant jamais exactement la même forme, ni la même dimension, ni la même souplesse . Et faire de cette membrane le
signe ordinaire de la virginité physique, c’est en quelque sorte donner raison
à ces horribles maquerelles, qui de tout temps, et sous tous les climats, ont
fait commerce de fausses virgines intactae .
D’ailleurs, le Talmud (traité Kutubot, fol. 11)
prévoit le cas où une femme pourrait perdre cette précieuse partie de sa
personne par accident, par chute sur un corps saillant, ou, selon l’expression
rabbinique qui semble en dire long sur l’usage de certaines pratiques, en se blessant
avec un morceau de bois [169] .
Le troisième terme, alma ,
provient d’une racine qui signifie « cacher, soustraire aux
regards ». Il désigne une jeune fille dans l’innocence la plus totale, et
soustraite aux regards des hommes [170] . Le mot alma se
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