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La Femme Celte

La Femme Celte

Titel: La Femme Celte Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean Markale
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retrouve en phénicien avec le sens de virgo intacta (saint Jérôme, Comment. VII), mais il semble bien qu’il s’agisse d’ une virginité plus morale
que matérielle  : car le masculin elem désigne un jeune homme non marié, et donc vierge en principe. Seulement, chez
les Sémites, il ne pouvait exister aucune preuve de la virginité physique du
garçon puisque la circoncision était obligatoire. De toute façon les
commentaires rabbiniques sur ce thème sont assez déroutants et relèvent la
plupart du temps d’une casuistique comparable avec ce qu’il y a de plus
spécieux chez les Molinistes. On lit dans le Talmud (Traité Hhaghiga, fol. 14) : « Une vierge ( betula )
qui est devenue enceinte peut-elle être l’épouse du grand prêtre ?… Car
Schemuel (Samuel) dit : je puis connaître une femme plusieurs fois sans
qu’elle perde sa virginité. » Cela se rapporte au Lévitique (XXI, 13-14). D’ailleurs, on trouve dans
les Proverbes (XXX, 19) ce curieux
passage : « Il y a trois choses qui sont au-dessus de ma portée et
j’ignore la quatrième : la voie de l’aigle dans le ciel, la voie d’un
serpent sur un rocher, la voie d’un navire au milieu de la mer. Enfin la voie d’un homme dans une vierge (alma) . Telle est
la voie de la femme adultère : elle mange et s’essuie la bouche, et
dit : je n’ai point commis d’iniquité ». Le Talmud (Traité Kutubot, fol. 6) affirme catégoriquement :
« La plupart des hommes sont exercés à s’approcher d’une femme sans léser
les signes de la virginité. » Il y a même une glose à ce chapitre, où sont
exposées gravement les recettes pour ce genre d’opération. Un commentaire
d’Aben-Ezra sur la Genèse (XXIV, 16) signale
que « Rébecca était betula , et nul homme
ne l’avait approchée. Il n’est pas probable que le texte entende exclure par
cette répétition, le commerce contre nature, mais le sens est qu’elle ne
s’était jamais souillée d’aucune manière que ce soit. Car une jeune fille pourrait
rester betula tout en se livrant à un homme et
même en devenant enceinte ». On voit que la Virginité de Marie peut, dans
un contexte entièrement biblique, être discutée âprement, puisque personne
n’est d’accord sur la signification même de la virginité, et qu’il existe des
termes différents n’ayant pas exactement le même sens suivant les
circonstances. Cela doit nous permettre de mieux comprendre l’énigme que renferme
l’histoire d’Arianrod, cette figure un peu isolée de la Grande Déesse Mère des
Celtes insulaires.
    En fait, l’histoire d’Arianrod repose sur une confusion de
termes on a l’impression que Math et Gwyddyon d’une part, et Arianrod, d’autre
part, ne parlent pas la même langue, ou qu’ils ne donnent pas le même sens au
même mot. Quand Math demande à Arianrod si elle est vierge, quand plus tard
Gwyddyon se moque de sa sœur qui est furieuse d’avoir perdu son nom de pucelle , le terme employé est morwyn , c’est-à-dire l’équivalent du français
pucelle, lequel mot ne veut pas dire autre chose que « petite jeune
fille » (latin pucella , diminutif de puella ). Il faudrait d’ailleurs rattacher le mot morwyn au breton morgan qui désigne un être féerique et mystérieux résidant au fond de la mer, ainsi
qu’au nom de la fée Morgane, sœur du roi Arthur. L’énigme pourrait rester
complète si l’on n’établissait pas la différence fondamentale du sens dans la
bouche d’Arianrod, d’une part, et dans celle de Math et de Gwyddyon, d’autre
part, du mot morwyn . Pour Arianrod, c’est un
mot qui signifie « jeune fille libre, hors de toute contrainte
masculine », c’est-à-dire la femme définie selon les critères d’une société
gynécocratique : or Arianrod est encore l’image de l’ancienne déesse des
sociétés gynécocratiques précédentes. Pour Math et Gwyddyon, qui sont les
représentants de la nouvelle société paternaliste, le terme, par contre, ne
peut désigner que la virginité physique.
    Une telle explication peut paraître hasardeuse : elle
permet cependant de comprendre pourquoi, innocemment ,
Arianrod passe par-dessus la baguette magique de Math. Mais alors, objectera-t-on,
pourquoi Arianrod s’enfuit-elle en abandonnant ses deux nouveau-nés et en
refusant de les reconnaître ?
    Une première réponse s’impose : en tant que vierge,
c’est-à-dire selon sa propre définition de femme non soumise au contrôle

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