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La Femme Celte

La Femme Celte

Titel: La Femme Celte Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean Markale
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Là encore nous
retrouvons la filiation matrilinéaire et la prédominance donnée à la famille
utérine. Et cette conception se retrouvera, dans d’autres légendes plus
connues, comme celle de Tristan et Yseult où le neveu ravit la Souveraine
Yseult à son oncle maternel le roi Mark, dans l’histoire de Guenièvre et
d’Arthur où Gauvain (auquel se substituera Lancelot dans la version française
chrétienne), puis plus tard Mordret seront les ravisseurs-amants de la Reine, authentique
détentrice de la Souveraineté.
    Mais Math, qui est impuissant, répétons-le, ne peut avoir
d’épouse. Il se contente de la « pucelle », qui est le substitut de
la Mère, la dernière incarnation du pouvoir féminin. Mais il fallait cela pour
que l’autorité du roi Math, roi de type paternaliste bien qu’empêtré dans les
contradictions nées des souvenirs du régime antérieur, fût légitime et reconnue
par tous. Cette « pucelle » est la source même de son pouvoir, ou de
son manque de pouvoir, ce qui, paradoxalement, revient au même. Elle est
exactement à l’image de la Vierge Marie, qui, dans les Mystères et les légendes
du Moyen Âge, est la médiatrice entre les hommes (ses fils) et Jésus (son
fils-époux). C’est la Vierge Marie qui intercède auprès de son divin Fils en
faveur des malheureux, mais aussi des voleurs, des parjures, des assassins. Si
l’on y songe bien, elle est libre de faire libérer les coupables, à partir du
moment où elle tient les pieds de Jésus dans son giron, elle agit exactement
comme le troediawc de la législation galloise,
ou plutôt comme la Pucelle grâce à qui Math peut vivre. Qui ne se souvient des
nombreuses représentations de la Mise au Tombeau du Christ, et dans lesquelles
représentations la Vierge serre les pieds de son fils contre sa poitrine ?
Et à ce moment-là, le Christ, qui n’est pas véritablement mort, qui est en dormition , n’est-il pas à l’image du roi celtique du Mabinogi  ?
    Ces curieuses constatations, qui mettent en relief le rôle
de la « pucelle » chez les Celtes, comme symbole de la divinité, doivent
nous faire souvenir de tous ces personnages bien mystérieux dont l’univers des
légendes irlandaises ou galloises, des Romans de la Table ronde, est peuplé,
que ce soient les Pucelles rencontrées au détour du chemin, les gardiennes des
fontaines, les belles châtelaines au regard alangui, les prisonnières de méchants
seigneurs, la Pucelle du Graal elle-même, et la troublante Impératrice du récit
de Peredur . Et ces Pucelles sont incontestablement
« vierges » au sens le plus large du mot, c’est-à-dire qu’elles ne
sont pas en puissance d’époux, qu’elles ne sont pas
sous l’autorité d’un homme  : car finalement, dans la tradition
celtique comme dans toutes les traditions méditerranéennes pré-chrétiennes, la
Virginité n’est pas physique, elle est purement morale et ne concerne que l’indépendance de la Femme vis-à-vis de l’homme . La
Vierge, c’est la Femme libre, toujours disponible, toujours neuve, toujours possible , symbole éclatant du renouvellement, de la
jeunesse, et aussi, corollairement, de la liberté sexuelle. Car la Vierge est
aussi la Prostituée. N’oublions pas qu’étymologiquement, elle représente la Force  : or, la force abandonne les uns pour
aller vers les autres, c’est une vérité qu’on ne peut guère discuter. La
Vierge, dans la définition qu’en donnent toutes les traditions non-chrétiennes,
c’est la Putain Royale, toujours libre d’elle-même, et dont les hommes se
disputent les faveurs, car ses faveurs sont le gage de la force et de
l’autorité souveraine qu’elle détient, biologiquement ,
par son pouvoir de donner la vie.
    Nous avons mis en valeur le fait qu’elle n’est jamais
esclave de l’Homme. C’est une sorte d’Amazone. Elle refuse le mariage, mais pas
les amants. Elle refuse l’esclavage, mais elle peut tenir les hommes en
esclavage ; l’Amour courtois n’est pas loin, cet amour courtois qui, dans
le Lancelot de Chrétien de Troyes, fait du
chevalier-amant l’objet docile de la Souveraineté. C’est pourquoi, confusément,
les auteurs de Romans courtois ont senti le danger, comme en témoigne
l’histoire de Merlin et de Viviane dans la version francisée et qui est
vraisemblablement d’origine bretonne-armoricaine, alors que le mythe de Merlin
lui-même est originaire du nord de la Grande-Bretagne.
     
    Viviane et Merlin

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