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La Femme Celte

La Femme Celte

Titel: La Femme Celte Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean Markale
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avant le péché ,
c’est-à-dire avant la première parturition  :
et celle-ci est un péché parce qu’elle rompait avec l’ordre établi, qu’elle
détruisait l’œuvre de Dieu (l’unique créateur), et qu’elle mettait, selon certains
commentaires rabbiniques, un point final à la création divine. Ainsi
s’expliquerait la malédiction transmise à l’homme (et à la femme), depuis
l’époque la plus lointaine ou, par suite de circonstances que nous ne
connaîtrons jamais, l’être humain créé par Dieu (toujours d’après la Genèse ), s’est mis à créer pour son propre compte
une créature nécessairement imparfaite. La tradition juive fait état d’une
souillure que le serpent aurait jetée en Ève, et qui serait à l’origine de nos
maux : c’est cette souillure qui aurait engendré Caïn, synonyme de mort , et qui, par lui, se serait transmise
à ses descendants [179] .
    C’est un point important qui se rapproche d’ailleurs de la
conception des Cathares, pour qui le monde de la chair est une création
diabolique : on peut en conclure qu’avant que le serpent (c’est-à-dire l’Esprit
du Mal, ou l’Esprit de Révolte) n’ait glissé la souillure (la faculté de procréer) en Ève, celle-ci pouvait se permettre d’avoir des
rapports sexuels non suivis de parturition. C’est ce qui ressort d’un courant
de pensée très important dans la tradition juive. Le serpent a donné à Ève le
pouvoir d’enfanter, pouvoir qu’elle n’avait pas auparavant. Ainsi s’expliqueraient
les paroles ambiguës du Christ dans l’Évangile des Égyptiens : il est venu
pour détruire l’œuvre de la Femelle. On sait que son enseignement, si tel était
son enseignement, n’a pas été suivi d’effet, bien que Jésus se présente comme
le défenseur de la Nouvelle Femme (Marie) face à l’ancienne femme à jamais
souillée (Êve), et qu’il faudrait insister bien davantage sur la lutte entre
Marie et Ève, en considérant d’ailleurs qu’Ève n’est pas la première femme
mythique, mais qu’elle a pris la place d’une inavouable Lilith [180] .
    Il est curieux de constater qu’Ève, d’après différents
textes hébraïques, n’a pas tellement le sentiment de cette
« souillure ». Elle semble, au contraire, croire que ce qui lui
arrive est une bénédiction. « Quand Ève vit Caïn d’une nature supérieure à
celle de tous les autres hommes, elle s’écria : J’ai
acquis un homme avec un dieu  ! » Il est incontestable qu’il
s’agit d’un hiérogame . Ève est en accord avec
la croyance qui était peut-être celle des peuples primitifs, à savoir que
l’homme n’est pour rien dans la parturition, et que celle-ci se produit par
l’intervention d’un dieu. La naissance de Caïn préfigure donc étrangement la
naissance du Christ, mais si Caïn est l’enfant mauvais, Jésus sera son antithèse,
l’enfant de la Charité. À partir de là, il y a, comme le démontre la
psychanalyse, une équivalence mythique entre le Fils et l’Époux : le fils
représente l’homme jeune, le père-époux, l’homme vieux. Et le but de la femme
est toujours , ne serait-ce que par transfert,
de remplacer l’homme vieux par l’homme jeune. Ainsi s’explique l’attitude de
Morgane voulant tuer Uryen, de Modron voulant sauver Mabon, et même de
Rhiannon, veuve de Pwyll, et mariée par son fils Pryderi à son ami Manawyddan.
    Corollairement, le but de l’homme jeune, du jeune fils, de Mabon , par conséquent, est de tenter, inconsciemment
ou non, de revenir à la Mère, soit en la soustrayant au Père et en se
l’appropriant (Œdipe), soit en s’identifiant à elle, spirituellement ou
matériellement. C’est ce dernier point, moins connu, qui doit être étudié.
    En effet, le mythe celtique de la Femme peut s’éclairer d’un
jour nouveau si l’on tient compte à la fois de cette mise en valeur par la
psychanalyse de l’identification à la mère, et du souvenir des filiations
utérines dans tous les textes littéraires bretons ou irlandais. Juridiquement,
la famille celtique est agnatique , mais pas
purement agnatique : les privilèges réservés aux femmes nous le prouvent
et témoignent d’une hésitation entre la famille agnatique et la famille cognatique , c’est-à-dire la famille reposant
entièrement sur la femme, centre incontesté de toute filiation et de toute
succession.
    Cette nostalgie, car c’en est une, de l’époque cognatique s’exprime dans le droit

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