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La Femme Celte

La Femme Celte

Titel: La Femme Celte Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean Markale
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plus
tard), intitulé l’Élucidation , précise bien en
effet que le Roi-Pêcheur était un homme « qui moult savait de nigromance
qu’il muast cent fois sa semblance (qui savait tellement de magie qu’il pouvait
transformer cent fois son aspect) ». Cela prouve d’ailleurs son appartenance
à l’Autre Monde, et aussi le fait que sa fille (la Pucelle au Graal), ou sa
sœur (Branwen), ou sa maîtresse (Kundry), peuvent prendre tant de formes
différentes pour apparaître aux héros de la quête. Cependant l’aventure de
Gauvain, dans une autre continuation de Perceval ,
devient une aventure de son frère Gahériet, avec de curieuses variantes.
     
    Seconde Continuation
de Perceval (Pseudo Wauchier II) : Gahériet arrive dans un beau
château sis sur les bords d’une rivière. Les rues sont richement décorées mais
entièrement vides. Il pénètre dans une salle déserte, descend dans un jardin et
voit un nain disparaître dans une tente, un
hanap d’argent à la main. Gahériet se précipite à l’intérieur de la tente et y
découvre un chevalier blessé, immense, couché sur un lit. Lorsque Gahériet
entre, les blessures du chevalier se mettent à saigner. Un « petit chevalier »
apparaît et provoque Gahériet, le jette à terre et l’oblige à s’enfuir sous les
quolibets de la foule qui emplit maintenant tout le château (éd. Roach).
     
    Il est bien évident que le chevalier blessé, le nain et le
petit Chevalier ne sont que trois aspects du même personnage, ce Roi-Pêcheur
qui joue les Protée. Mais là le thème de la blessure rejoint très étroitement
le thème de la lance qui saigne. Il n’est pas inintéressant de noter que, selon
une croyance celtique prouvée par de nombreux textes, les blessures d’un homme
blessé ou mort peuvent se mettre à saigner lorsque le meurtrier entre dans la
pièce. Gahériet est-il responsable de la blessure du Roi-Pêcheur ?
    Mais revenons à la Tête. Dans le roman français de Perlesvaux , qui est construit sur la tradition de
Robert de Boron, et qui date des environs de 1200, on voit Lancelot, dans un
château désert, faire la rencontre d’un chevalier richement armé. Le chevalier
demande à Lancelot de lui couper la tête avec une hache. S’il refuse, c’est
Lancelot qui aura la tête coupée. Mais de toute façon, Lancelot devra revenir
dans un an se faire couper la tête par le même chevalier. Lancelot accepte et
coupe la tête du chevalier, puis il quitte le château : alors il
s’aperçoit que la tête et le corps ont disparu [264] .
    L’auteur de Perlesvaux n’a
pas compris grand-chose à ce « jeu de décapité » qu’il raconte
pourtant complaisamment. Nous en trouvons, sinon l’explication, du moins un
archétype complet dans le récit irlandais du Festin
de Bricriu  :
     
    Le Jeu du Décapité (Irlande) : Les trois champions ulates Cûchulainn, Loégairé et Conall se
disputent le « morceau du héros » qui doit être donné au plus
vaillant d’entre eux. Après s’être soumis à différents jugements qui ont tous
donné le premier rang à Cûchulainn mais qui ont été contestés par les deux
autres, les trois champions vont obtenir l’arbitrage de Uath Mac Immonainn
(terrible fils de Grande Crainte), un géant sauvage et redoutable. Celui-ci
leur dit : « J’ai une hache. Que l’un de vous la prenne en main et me
coupe la tête aujourd’hui, moi, je lui couperai la tête demain. » Conall
et Loégairé refusent le marché. Cûchulainn accepte : « Uath, après
avoir fait une incantation sur le tranchant de sa hache, met sa tête sur la
pierre devant Cûchulainn ; Cûchulainn, prenant la hache du géant, le
frappe et lui coupe la tête. Puis Uath partit et plongea dans le lac, tenant
d’une main sa hache, de l’autre sa tête sur la poitrine. » Et le
lendemain, lorsque Cûchulainn vient au rendez-vous et met la tête sur la
pierre, Uath, qui apparemment se porte aussi bien qu’avant, se contente de
brandir trois fois sa hache sur le cou et le dos du héros en le déclarant digne
de l’honneur qu’il réclame (D’Arbois de Jubainville, L’Épopée
celtique en Irlande , p. 133-135).
     
    Toute interprétation précise de cette anecdote serait périlleuse,
mais il en sort deux choses : d’une part il s’agit d’une sorte de
sacrifice réciproque qui se conclut par un simulacre (sacrifice par
substitution de victime ou par geste rituel symbolique), ce sacrifice étant une
véritable vengeance

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