La Femme Celte
les Enfances Vivien . Or la forme occitane de Vivien est Vezian , et comme les chansons du cycle de Guillaume
d’Orange sont toutes centrées autour de Saint-Gilles du Gard, pèlerinage célèbre
au Moyen Âge, rendez-vous de tous les peuples, il faut peut-être voir dans le
saint Vezianus qu’on y honorait un équivalent du Gwyddyon gallois (prononcer Gouézionn ), ce qui permettrait de rattacher Viviane
à l’histoire d’Arianrod. Car si les rapports entre Arianrod et son frère
Gwyddyon sont ambigus, les rapports entre Merlin et sa sœur Gwendydd ne le sont
pas moins. Mais cette hypothèse est beaucoup trop hasardeuse pour être un
argument valable.
[174] Nous n’avons pas à insister ici sur le personnage de Lancelot du Lac.
Mais alors que la plupart des événements relatés dans les Romans de la Table
ronde peuvent être localisés indifféremment en Grande et en Petite-Bretagne,
les enfances de Lancelot sont typiquement marquées par la géographie armoricaine.
Le royaume de Bénoïc se trouve aux limites du pays breton et pays des Francs.
La guerre entre Ban et Claudas est le reflet des luttes qui se sont déroulées
au cours des IX e et X e siècles entre les rois bretons et les
Carolingiens, luttes qui ont été d’ailleurs à l’avantage des Bretons. C’est
l’époque de la pénétration bretonne la plus orientale. La forteresse du roi Ban
s’appelle Treb, ce qui est un nom breton désignant un établissement récent
dépendant d’une ancienne paroisse. D’après le contexte, Treb est situé dans les
marais de Redon. Le voyage du roi Ban fugitif se fait en suivant l’Oust
jusqu’aux limites de l’ancienne Brocéliande qui recouvrait tout le centre de la
péninsule. Quant au nom de Lancelot du Lac, il résulte d’une francisation
maladroite d’un ancien nom qu’on retrouve en gallois (Llwch Llawmynyawc) et en
irlandais (Lug Lamfada = Lug à la longue lance), avec une confusion entre Lug,
Llwch et Lac (d’ailleurs llwch signifie bien
« lac »). Mais le personnage n’apparaît pas dans les plus anciens
textes gallois concernant le roi Arthur, sauf dans Kulhwch
et Olwen où il joue un rôle insignifiant, sans aucune comparaison
possible avec ce qu’il deviendra dans la légende continentale.
[175] Non seulement les théories romanistes qui se refusent obstinément à
admettre l’origine celtique des romans courtois, mais aussi des ouvrages
d’exégèse comme celui de Denis de Rougemont sur L’Amour
et l’Occident , qui, partant de l’étude du mythe de Tristan sans se
référer aux modèles irlandais, aboutit à des conclusions indiscutablement
fausses sur le plan psychologique comme sur le plan sociologique.
[176] Le Chevalier à la Charrette , trad.
Jean Frappier, p. 80.
[177] C’est une bretonne contemporaine, l’actrice Jeanne Moreau, qui résume
admirablement, pour son propre compte, le mythe du Val sans Retour. Elle a en
effet déclaré : « J’aimerais avoir une immense maison, avec des tas
de chambres, pour y loger tous les hommes que j’ai connus dans ma vie… Ce sont
tous mes fils » ( Life Magazine ,
20 janvier 1967). Cette déclaration prend tout son sens quand on sait que
Jeanne Moreau, ce n’est pas un secret, a signé le fameux manifeste sur
l’avortement ( cf. Le
Monde , 6 avril 1971). Jamais la notion de Fils-Époux, ou de
Fils-Amant, n’a été plus clairement définie.
[178] Évangile des Égyptiens, cité par C. R. S. Mead, Thrice Greatest Hermes , I, 153.
[179] « Sammaël, c’est le serpent qui a jeté en Ève le venin et la
souillure » (Abraham Seba, Tzerôr Hammôr ,
fol. 7, col. 2). « Et Adam connut Ève, sa femme, qui avait déjà conçu de
l’ange Sammaël, et elle devint enceinte en enfantant Caïn. Et celui-ci
ressemblait aux êtres d’en haut et non à ceux d’ici-bas. Alors elle dit :
j’ai acquis un homme, un ange de Jehovah » (Jonathan Ben Uziel, paraphrase
de la Genèse , IV, I). « Sache que Caïn a été produit de la souillure
(de Sammaël) et du germe d’Adam auquel s’unit cette souillure. Cet esprit-là
n’aurait pas eu la faculté de revêtir un corps humain et de sortir à l’air du
monde. C’est le germe d’Adam qui lui a offert de quoi se revêtir »
(Menahhem de Recanati, Traditions sur la Genèse ,
p. 31).
[180] Que nous étudierons dans le chapitre sur « la Révolte de la
Fille-Fleur », car c’est un autre aspect de la féminité.
[181] Histoires , I, 105.
[182] Braunschweig-Fain,
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