La Femme Celte
détails, toutes les anecdotes de cette œuvre géniale ne sont que des travestissements, même pas
des transpositions, de la quête celtique, de la Femme Engloutie représentée par
le Graal. Quand on sait cela, il est difficile de s’en tenir à l’apparence
quant au Cerf Blanc au collier d’or. Il est blanc comme le cerf chassé par
Arthur dans Érec et Énide, comme la Biche blanche de Guigemar. Il a un collier
d’or, surtout, c’est-à-dire un symbole nettement solaire. On dira que le Christ
est lui aussi revêtu de symboles solaires. C’est un fait, mais les imagiers se
sont servis de détails païens pour en arriver là. Le collier d’or n’est autre
chose que les fameux torques d’or des anciens
chefs gaulois, les torques que porte à son cou
le dieu Cernunnos, comme insigne non seulement de sa divinité, mais aussi de
son origine solaire. Pourquoi, en étudiant cette apparition du Cerf blanc au
Collier d’Or, n’a-t-on pas pensé à cette plaque du Chaudron de Gundestrup qui
représente Cernunnos, aux cornes de cervidé, portant les torques à son cou, et entouré de quatre
animaux ? Et pourquoi n’a-t-on pas mis l’accent sur l’analogie qu’il y a
entre cette anecdote de la Quête , cette représentation
du Chaudron de Gundestrup, et l’image de la biche aux
bois de cerf , c’est-à-dire Sadv, la mère d’Oisin, entre les quatre
chiens qui marquent son destin, les deux limiers de Finn, Brân et Scolann, qui
la tirent de l’ombre, et les deux limiers des enfers, ceux du druide Fîr
Doirche, qui l’entraînent dans l’ombre ?
Car en définitive, tout se ramène à l’histoire de Sadv, la
déesse aux bois de cervidé, la biche au bois, pourchassée par la colère de
l’Homme Noir, le druide représentant l’ordre social et religieux, et protégée
par Finn et les Fiana , derniers chevaliers de
Notre-Dame de la Nuit. Il ne faut pas oublier que le nom véritable de Finn (qui
n’est qu’un surnom donné plus tard et signifiant « beau »,
« blanc » ou « blond ») est Demné, dans lequel on peut
retrouver un ancien * damnijo , c’est-à-dire
« Petit Cerf », que le nom d’Oisin, son fils, signifie « le
Faon », que le nom du fils d’Oisin est Oscar, c’est-à-dire « Qui aime
les Cerfs », qu’une partie du Leinster porte le nom d’Osraïge, autrement
dit « Peuple du Cerf », et que tout le cycle épique de Finn, ou de
Leinster, est en fait placé sous le patronage symbolique du Cerf, alors que le
cycle d’Ulster est sous le signe du Taureau ou de la Vache [136] .
Cela suffit pour donner à Sadv et à l’histoire d’Oisin une particulière
importance : car la déesse-biche, ou déesse à la biche, se réfère à
l’image la plus ancienne d’Artémis-Diane, la déesse solaire des peuples qui ont
précédé les Indo-Européens sur le territoire de l’Europe occidentale.
LA DÉESSE AUX OISEAUX
Nous avons vu que Rhiannon n’était pas seulement la
déesse-jument, mais qu’elle était également liée aux oiseaux. Les « Oiseaux
de Rhiannon » sont en effet très célèbres dans toute la tradition
galloise. Dans le récit de Kulhwch et Olwen ,
Yspaddaden Penkawr réclame des dons fantastiques à Kulhwch qui lui demande sa
fille Olwen en mariage, et parmi ces choses, « les oiseaux de Rhiannon,
qui réveillent les morts et endorment les vivants, je les veux pour me recréer
cette nuit-là [137] ». Ces oiseaux
merveilleux, nous les retrouvons dans le récit de Branwen ,
le second volet de ce qu’on appelle le Mabinogi :
L’Hospitalité de la
Tête Sacrée (Pays de Galles) : Après une désastreuse expédition en
Irlande qui avait pour but de délivrer Branwen, sœur de Brân, et de récupérer
le chaudron de résurrection, Brân est blessé. Il demande aux sept survivants de
lui couper la tête, de l’emporter avec eux et de regagner l’île de Bretagne.
« À Harddlech vous resterez sept ans à table, pendant que les oiseaux de
Rhiannon chanteront pour vous. Ma tête sera pour vous une compagnie aussi
agréable qu’aux meilleurs moments lorsqu’elle était sur mes épaules. »
Ainsi en est-il. « Ils se rendirent à Harddlech et s’y installèrent. Ils
commencèrent par se pourvoir en abondance de nourriture et de boisson, et se
mirent à manger et à boire. Trois oiseaux vinrent leur chanter certain chant
auprès duquel était sans charme tous ceux qu’ils avaient entendus. Les oiseaux
se tenaient au loin, au-dessus des flots et
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