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La fête écarlate

La fête écarlate

Titel: La fête écarlate Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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Blainville contraint de se battre contre ses alliés !
    – Vertaing !
    À grandes taillades, l’écuyer d’Alençon s’approchait de Blainville. Deux hommes tombèrent. Anglais ou Français ?
    « Il nous faut sortir d’ici, le comte et moi ! »
    Ogier tenta de s’ouvrir une voie. Un taillis d’acier hérissé d’épées se dressa devant lui, impénétrable. Et pourtant, il fallait passer !
    Quelqu’un le rejoignit à sa droite : Thierry, enfin, aux prises avec un chevalier à l’armure safran, au bassinet rond orné de cornes de bélier. Champartel, d’un coup d’estoc, le renversa et un piéton – un Génois armé d’un épieu – le cloua au sol.
    Un homme à gauche. France. Montmorency… Allons, ils n’étaient ni trop dispersés ni vaincus. S’ils tenaient bon, si d’autres arrivaient – chevaliers et piétons –, ils auraient l’avantage du nombre ! Et songeant cela, Ogier continuait d’avancer dans cette multitude anglaise surgie de ses défenses, et tellement au corps à corps avec les assaillants que les archers n’osaient tirer, de crainte de se tromper d’homme.
    Deux armures devant. Nues. Chacun de ces Français brandissait une épée d’arçon, très longue, très épaisse, sans doute forgées l’une et l’autre à Bordeaux, célèbre pour ces sortes d’armes. Dans une telle presse, ces lourdes lames devenaient une gêne plutôt qu’un avantage. Assaillis de l’arrière par des guisarmiers, puis renversés d’une poussée aux genoux, les deux hommes s’effondrèrent. Les percemailles anglais plongèrent à plusieurs reprises dans le défaut des colletins : c’en était fait. Les épées changèrent de main.
    Des chevaux encore. Ogier, pour éviter l’un d’eux, perdit Vertaing de vue. Les seigneurs juchés sur ces bêtes, obligés de les travailler aux flancs pour se garder des atteintes, augmentaient leur angoisse et leur nervosité. Un des roncins rua, assommant un homme agenouillé sur un vaincu et prêt à l’égorger. Un autre chevalier, brandissant une hache, reçut en plein heaume une pierre lancée par un frondeur, si grosse qu’il vida les arçons. Hennissant de joie ou de frayeur, sa monture aussitôt galopa vers Crécy.
    Ogier taillait, taillait toujours. N’importe comment. Atteint au-dessus du genou, il se félicita de la solidité de son cuissot de fer, et à toute volée trancha le camail de son adversaire. Il s’aperçut alors qu’il titubait. « Ma jambe !… Pourvu qu’elle me supporte longtemps ! » Il sentait des picotements à l’endroit où Oyré l’avait rompue. Et comme il s’angoissait, il s’aperçut qu’Alençon était loin.
    Le rejoindre !
    D’autres chevaux encore, fous de douleur, certains agonisant. Cris de rage et d’horreur. Des heaumes s’ouvraient, et dessous, des crânes. Parfois, une visière cédait, libérant une face empouacrée de sang et de cervelle. Des têtes dodelinaient, broyées par des fléaux d’armes ; des bras pendaient, disloqués à coups de masse ou de plommée ; des jambes atteintes par les fers des fauchards ou les haches danoises s’arrachaient aux hommes hurlants. Et les doloires dont les charpentiers de la Tamise et du pont de Poissy se servaient pour équarrir les arbres, coupaient, tranchaient, hachaient, tandis que les huées devenaient plus fortes, plus stridentes.
    De jeunes coustiliers goddons s’insinuèrent dans la presse : à eux les blessés ! D’autres, armés de vouges et de corsesques coururent au-devant de la Chevalerie de France qui toujours galopait sur la pente. Redoutant ces audacieux, certains seigneurs reculaient un moment puis, la lance pointée, piquaient vers eux ; mais ces piétons ne fuyaient pas : dressés pour ces jeux-là, ils éludaient le coup et lâchant leur arme sautaient en croupe des chevaux pour déloger leur cavalier. S’il résistait, ils l’égorgeaient au poignard.
    La boucherie continuait. Alençon se battait. Comme Ogier allait l’atteindre, il vit Jean de Hainaut s’effondrer. Aussitôt un cheval noir fendit la mêlée comme par enchantement. Thierry de Senseilles sauta hors de selle, saisit le blessé aux aisselles et le jucha sur le destrier qui galopa vers le bas de la pente.
    Et Senseilles s’enfonça dans la presse.
    – Chandos ! cria quelqu’un. Je reconnais sa bannière.
    N’était-il donc pas en Poitou ?
    – Montjoie ! Montjoie ! vociférait Alençon.
    Ogier s’en trouva tout près. Et proche de Thierry, son

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