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La fête écarlate

La fête écarlate

Titel: La fête écarlate Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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que redoutant quelque difficulté près du trône, à cause de cet homme-là, plus clairvoyant que son frère Philippe, le Normand souhaitait l’occire. Le contentement qu’il en obtiendrait se doublerait du plaisir de satisfaire Édouard d’Angleterre.
    – Mon ami, continua le comte, je ne sais quelles conspirations se trament çà et là en ce royaume. Quant à celles concernant ma personne, il y a quelques mois que je les ai flairées !… Mais vous avez bien fait de venir céans !… Demain je n’échangerai pas mon harnois contre celui de Vertaing… auquel j’interdirai l’entrée en lice.
    « Voilà qu’il se méfie de son propre écuyer ! »
    Ogier sourit. D’un seul coup, son angoisse s’était allégée :
    – Vous avez raison, monseigneur… Vous allez en mécontenter quelques-uns !
    Alençon rit sans retenue, comme un adolescent préparant un bon tour. Ses yeux qui, jusque-là, étaient demeurés sombres et fuyants, contemplèrent avec fierté l’armure érigée au pied de son lit et son regard parut soudain ébloui en se posant sur le heaume solide où scintillait l’énorme fleur de lis :
    – Je compte sur vous pour me protéger, Fenouillet, au cas où ces malandrins, sans souci d’être découverts, voudraient tout de même attenter à ma vie.
    Le sourire quitta le visage d’Ogier :
    – C’est que, monseigneur, j’aurais voulu éviter ce tournoi.
    – Hein ?
    – Je sollicite avec empressement, monseigneur, un sauf-conduit me donnant accès auprès de notre roi, Philippe… J’aurais voulu partir à l’aube pour Paris.
    – Sans béhourder !
    Ogier soupira. Aucun doute : si Alençon ne s’offensait nullement qu’il tînt à rencontrer son frère sans lui fournir le motif de cette entrevue, il se scandalisait qu’il voulût renoncer au tournoi.
    – C’est impossible, Fenouillet ! Il vous faut être dans le champ clos avec moi !
    La voix conservait son affabilité ; le regard, lui, devenait exigeant.
    – Je ne vous en prie pas : je vous le commande.
    – Monseigneur, je vous adjure…
    La tête sursauta sur le traversin ; la main saisit le percemaille :
    – Il suffit. Je vous requiers de demeurer à mon service. Vous me dites menacé ? Votre devoir est de veiller sur ma personne au cours de ce tournoi qui s’annonce mal. Nous partirons dans deux jours pour Paris. Nous verrons Philippe ensemble…
    Alençon toussa, gémit, feignant d’être exténué. Il avait tout d’un grand enfant maladif et têtu. Ogier insista :
    – Mais, monseigneur, les Anglais s’apprêtent à…
    Un sourire, un clignement de paupières :
    –… à nous embrener (151)  ? Ils en ont coutume !
    Puis, l’œil dur, la bouche crispée, Alençon lâcha un pet.
    – Laissez-moi et obéissez, Fenouillet. Je suis las. Vous devez l’être également. Sans moi, vous ne pourriez franchir les portes du palais…
    Et, le visage tourné vers le seuil de la tente :
    – Henri !
    Le vieux vougier apparut.
    – Henri, messire Fenouillet est un ami sûr. La conduite qu’il vient d’avoir envers moi me conforte grandement… Mais il est jeune, prêt à commettre des sottises. Je tiens à ce que tu veilles sur lui jusqu’à demain après-midi, afin qu’il soit à mes côtés sur le pré.
    – Monseigneur !… Ma parole de chevalier…
    Alençon se dressa presque tout entier sur sa couche ; la pointe de sa lame piqua le nombril d’Ogier.
    – Soyez sans crainte, ami : vous n’êtes pas en mon pouvoir mais sous ma protection. Votre ardeur, votre jeunesse pourraient vous inciter à commettre des actions déraisonnables… Hé oui !… Je veux vous voir demain parmi les défendants que je conduirai à l’assaut de Chauvigny et de ses hommes… Et vous ferez en sorte que nous remportions la victoire… Ensuite, nous gagnerons Paris en quatre jours… Bonne nuit !
    La rage au cœur, Ogier réintégra la nuit pleine d’odeurs et de vacarme. Du des ribaudes – il semblait même qu’il y en eût plusieurs – des rires pointaient, mêlés parfois aux hennissements des chevaux à l’attache. Thierry, anxieux, s’approcha.
    – Viens, je te raconterai… Mais au fait : as-tu vu Vertaing partir avec Blainville ?
    – Oui… Il l’avait amené. (L’écuyer se retourna :) Dites donc, ce soudoyer nous suit !
    – Hélas oui !… Par décision du comte.
    Au souvenir de cette entrevue décevante, Ogier sentit une bouffée de fièvre et de sang lui monter à la

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