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La Fille de l’Archer

La Fille de l’Archer

Titel: La Fille de l’Archer Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Serge Brussolo
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pas prétendu qu’il avait été tué par un ours au cours d’une partie de chasse ? Ou encore victime d’un éboulement qui l’aurait réduit en bouillie ?
    — Tu crois que je n’y ai pas pensé, petite maligne ? Oui, rendre la chose publique aurait été une solution, mais nous avons eu peur qu’une enquête ne soit ouverte. Les crevasses, aux alentours, recèlent des dizaines de corps que les chiens du guet n’auraient aucun mal à découvrir. Et puis il y a la rumeur… Les accusations de sorcellerie. Ornan le loup-garou, l’homme qui pratique des sacrifices humains. Je ne suis pas noble, Gérault non plus, cela signifie qu’on nous aurait torturés pour nous faire avouer ce qui s’était réellement passé. Sous la souffrance, on dit n’importe quoi. On nous aurait déclarés complices d’un hérétique, d’un chevalier converti à la magie sarrasine ; la présence des esclaves maures n’aurait rien arrangé… Non, il était impossible de faire passer la mort d’Ornan pour un accident. On n’expédie pas le décès d’un héros comme celui d’un savetier, surtout lorsqu’il est riche. L’évêque se serait déplacé en personne, car Ornan, par moquerie, lui avait promis de lui laisser en héritage de quoi bâtir une cathédrale. À peine serait-il arrivé ici que les rumeurs auraient éveillé ses soupçons. Il aurait été tenté d’y prêter l’oreille. En effet, déclarer Ornan de Bregannog hérétique aurait permis à l’Église de s’approprier la totalité de ses biens !
    « Non, crois-moi, avec Gérault nous avons retourné le problème en tous sens. C’était impossible. Il fallait continuer à faire comme si… et s’éclipser en catimini avec le trésor. C’est à ce moment qu’Anne nous a rendu toute fuite impossible. Voilà où nous en sommes. En ce moment même, il est probablement occupé à égorger tes compagnons. C’est aussi pour cela que j’ai tenu à ce que tu m’accompagnes, je ne voulais pas te laisser derrière moi.
    Wallah hoche la tête.
    — Alors tu t’appelles Jehan, dit-elle. Et tu n’es pas noble.
    — Non, mon père était palefrenier aux armées de Flandres, mais comme, tout jeune, je présentais des dispositions pour le combat, Ornan de Bregannog a jugé amusant de m’attacher à son service. J’ai appris le métier sur les champs de bataille. Les chevaux, l’entretien des armes, la réparation des armures. Soldat, palefrenier et forgeron, tout cela à la fois. Ça ne me déplaisait pas, du moins tant qu’Ornan se comportait à peu près conformément aux lois de la chevalerie.
    — À peu près ?
    — Oui. Ils sont tous comme ça. Un mélange curieux de barbares et d’hommes d’honneur. Tantôt se comportant comme des bêtes, tantôt faisant des politesses à leurs pires ennemis. Le peuple n’a aucune importance à leurs yeux. Si l’on n’a pas été adoubé, on n’existe pas, on n’est quelque chose d’à peine plus évolué qu’un mouton. Ils s’estiment d’une autre race à qui tout est permis.
     
    Wallah réfléchit. La stratégie déployée par Anne de Bregannog lui paraît bonne. Gunar, son père, lui a souvent répété qu’un bon archer – pourvu qu’il soit embusqué à l’emplacement idéal – peut tenir en échec une colonne de cavaliers bardés de fer. Elle sait qu’elle-même serait capable d’empêcher Jehan et Gérault de mettre le nez hors du château. Le chemin qui descend vers la forêt des sorcières est long et tortueux. On ne peut espérer s’y cacher car aucun arbre ne le borde. Dès qu’on le foule, on constitue une cible parfaite.
    — Avez-vous envisagé de contourner la route en rampant dans la caillasse ? demande-t-elle.
    Jehan hausse les épaules.
    — C’est impossible, surtout si l’on est chargé, lâche-t-il sans dissimuler son agacement. Les pierres s’éboulent au moindre faux pas. Anne nous aurait repérés de loin… De toute manière on ne pouvait déménager le trésor du baron sans l’aide de plusieurs mulets ou d’une paire de chevaux ; or, comme tu l’as constaté, nos écuries sont vides. Anne a massacré nos montures.
    — Et tu n’envisages pas de partir les mains vides.
    — Je ne veux pas, à mon âge, me retrouver en train de mendier un bol de soupe aux portes des abbayes. Si tu veux tout savoir, j’estime avoir droit à un dédommagement. J’enrage qu’un homme seul soit capable de nous retenir prisonniers. Qu’il puisse être partout à la

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