Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
La Fille Du Templier

La Fille Du Templier

Titel: La Fille Du Templier Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Michel Thibaux
Vom Netzwerk:
ventre d’une bougresse.
    Le Bâtard était à vingt foulées ; ils se montrèrent. Sept
armés jusqu’aux dents.
    — Ah, vous êtes là ! Préparez-vous. Ils sont sur
le chemin à une demi-lieue, dit-il en jetant un regard méfiant au chef de bande.
    — Combien ?
    — Trois, comme prévu. Deux femmes et un prélat. Vous m’apporterez
la tête de la plus jeune et vous pourrez vous partager leurs biens, sauf la
bague de la plus âgée.
    — C’est un bijou de prix ? s’enquit Isembart sur
un ton calculateur.
    — Non, un symbole que je dois remettre au seigneur des
Baux. Je me tiendrai à l’écart, sauf si vous avez besoin d’un renfort.
    Isembart acquiesça tandis que ses hommes ricanaient. Proies
faciles. Argent facile. Peut-être s’amuserait-on un peu avec la jeunette avant
de la vider de son sang. Il soutint le regard du Bâtard, se demandant pourquoi
un haut personnage tel que Hugon des Baux désirait la disparition de pèlerins
insignifiants. On ne devait pas se fier aux apparences. Que cachait le front
bas d’Odet d’Alègre ? Quel secret partageait-il avec le comte des Baux ?
Que celaient ces cervelles de brutes, ces cœurs impitoyables, ces êtres liés
par des ambitions féroces ?
    Un souffle de vent lui caressa le visage ; il fit signe
à ses hommes et se laissa couler le long du versant de la route qui tournait en
épingle.
     
    La chaleur devint fournaise. Elle étourdissait les esprits
et engourdissait les membres. Les cigales stridulaient et prenaient possession
de l’espace quand le mistral faiblissait. Les écouter, c’était se fondre dans les
coulées d’or brûlantes des blés sauvages, au milieu des herbes jaunes qui
bordaient le chemin. À chaque pas, les insectes bondissaient. Ils picotaient
les chevilles des deux femmes, sautaient au visage empourpré de Guillaume, agaçaient
la mule qui rechignait à grimper avec son fardeau.
    Puis le mistral se renforçait au détour d’une colline et le
monde alentour se soumettait. Les trois pèlerins regrettaient alors ces moments
de grand calme, les minutes qui n’appartenaient pas au vent ni aux cigales. Les
voyageurs pesaient ces silences ; ils les mesuraient avec crainte. Surtout
Guillaume.
    — On n’est pas seuls, dit-il à deux ou trois reprises
entre ses dents tout en épiant les futaies et les moindres plis du terrain.
    Bertrane et Stéphanie, alertées par les appréhensions du
chapelain, demeuraient sur le qui-vive, retenant leur respiration quand un
oiseau prenait son envol. Le prieur s’énervait de plus en plus, tâtait sa masse
dans le sac. Soudain, ils perçurent un bruit familier venant de la forêt. Un
cheval s’ébrouait au sein des chênaies.
    — Nom de Dieu ! jura Stéphanie qui troqua d’un
coup sa peau de pèlerin contre celle du soudard qu’elle avait été pendant cinq
ans. Guillaume ! Mon épée !
    Le gros moine n’avait pas attendu l’ordre de sa dame. D’une
main preste, il délia la corde d’un sac, s’empara de l’épée de Stéphanie et la
lui lança. Elle l’attrapa au vol et en baisa le quillon avant de fendre l’épais
tissu de son vêtement entre ses jambes. Elle se sentit plus libre ; elle
regrettait cependant sa cotte de mailles, son casque et son bouclier.
    Guillaume posa sa masse sur son épaule et se signa en
prévention des péchés qu’il allait commettre. Prendre des vies, même sans faire
couler le sang, n’était pas du goût du Seigneur. Le chapelain avait souvent
enfoncé des crânes et des poitrines avant de purifier son âme par de longues
prières. Il pensa subitement à Bertrane.
    — J’ai ce qu’il te faut ! s’exclama-t-il.
    La dame de Signes ne comprit pas. Son œil s’écarquilla quand
elle vit le saint homme lui tendre un long poignard génois, une arme terrible
utilisée par les marins lors des abordages.
    — Prends-le, ma fille ! exigea-t-il.
    Comme elle n’esquissait pas un geste, il le lui fourra de
force dans la main.
    — Sers-t’en, je t’absous d’avance.
    — Fais ce qu’il te demande, ajouta Stéphanie d’une voix
qui n’admettait aucune réplique. Saigne le premier qui s’approchera de toi !
    Bertrane jeta un regard désespéré à son amie. La comtesse
des Baux avait le visage dur. Jambes écartées, épée pointée vers la lisière des
arbres, elle attendait l’ennemi.
    Le mistral tardait à se manifester, les cigales se taisaient.
Le silence était si profond et si prégnant que le temps semblait s’être

Weitere Kostenlose Bücher