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La Fin de Pardaillan

Titel: La Fin de Pardaillan Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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Fontenay-aux-Roses. Mais ils pensaient bien aussi que le sacrifice serait particulièrement pénible pour lui. S’ils avaient voulu suivre, c’était pour voir, pour se réjouir extérieurement de la tête qu’il ne manquerait pas de faire. Ils furent désappointés. Mais l’ordre étant formel et, dressés à une stricte discipline, ils obéirent en faisant la lippe, mais sans se permettre de discuter.
    Ecumant, plus furieux que jamais, et plus que jamais résolu au meurtre, si Concini essayait seulement d’embrasser la jeune fille, Rospignac suivit son maître, sans que celui-ci y fît attention. Il ne devait plus le lâcher.
    Parvenu au premier étage, Concini ouvrit une porte et entra. Dans la pièce, meublée avec le même luxe effréné qui s’étalait insolemment dans tout cet intérieur louche, se tenait la petite Loïse en compagnie de la femme à qui Stocco l’avait confiée. Concini donna quelques ordres brefs à cette femme et se retira aussitôt, sans avoir jeté un coup d’œil à l’enfant.
    Il passa dans une autre pièce, une chambre à coucher où un lit monumental se dressait sur une estrade surélevée de deux marches : l’autel des sacrifices dans ce temple de l’amour. Ce fut dans cette pièce qu’il attendit, tantôt rêvant, nonchalamment étendu dans un fauteuil, tantôt foulant d’un pied nerveux l’épais tapis qui recouvrait le parquet. Son attente fut longue, très longue. Elle dura deux heures, trois heures peut-être. Au bout de ce temps, la porte s’ouvrit, une femme introduisit Muguette et se retira discrètement en fermant soigneusement la porte derrière elle.
    La jeune fille était très pâle. Cependant sa démarche était assurée, elle paraissait très calme, très résolue. Elle tenait obstinément les mains croisées sur son sein comme pour en comprimer les battements tumultueux. En réalité, son poing se crispait nerveusement sur le manche du petit poignard qu’elle avait caché là.
    Etait-elle résignée à l’abominable sacrifice ? A cette question, nous pouvons répondre hardiment : non. Que voulait-elle faire ? Elle n’en savait rien. Depuis l’enlèvement de la petite Loïse, depuis que Concini lui avait fait la hideuse menace et proposé cyniquement le honteux marché, elle s’était creusé le cerveau à chercher la solution du redoutable problème : sauver l’enfant en évitant le déshonneur. Et elle n’avait rien trouvé. Rien que ce moyen extrême, terrible : se plonger elle-même, dans le cœur, ce petit poignard sur lequel sa main se crispait.
    Cette résolution suprême, elle l’avait adoptée intrépidement. Quand même, ce n’était là qu’un pis aller effrayant, auquel elle ne pouvait pas songer sans déchirement. Et c’était très naturel, en somme : on a toutes sortes de raisons de tenir à la vie quand on en est à son aurore, que le cœur vient, pour la première fois, de gazouiller la chanson d’amour, et que l’avenir s’ouvre devant vous, rose et radieux.
    Au fond, Muguette, qui ne savait pas ce qu’elle ferait, Muguette qui était venue quand même, malgré l’affreux déchirement qu’elle éprouvait à se dire que c’était à la mort qu’elle marchait, Muguette espérait malgré tout. Quoi ? Est-ce qu’elle savait !… Peut-être qu’un miracle se produirait au dernier moment.
    En la voyant paraître, Concini s’était levé vivement. Il s’inclina galamment devant elle et, souriant, très sûr de lui maintenant, les yeux brillants, sentant déjà le désir se déchaîner en lui :
    – Je vous l’avais bien dit que vous viendriez ! fit-il.
    Et déjà, haletant sous le coup de fouet de la passion, il dardait sur elle deux yeux ardents qui la déshabillaient avec une cynique impudeur, qui semblaient déjà prendre possession de ce corps de vierge et le violenter brutalement. Et pas une fibre secrète ne vibra en lui, ne vint l’avertir que la pure enfant qu’il salissait ainsi de son regard lubrique, en attendant qu’il pût la souiller de son baiser monstrueux, était sa propre fille.
    Elle, elle ferma les yeux, toute secouée par un long frisson de dégoût.
    Alors seulement, et trop tard, elle comprit quelle irréparable faute elle avait commise en venant dans son antre, se placer d’elle-même entre les griffes du fauve en rut. Elle sentit, toujours trop tard, qu’elle était irrémédiablement perdue. Et l’épouvante s’abattit sur elle en rafale irrésistible. Toute sa résolution,

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