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La Fin de Pardaillan

Titel: La Fin de Pardaillan Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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chacun. Ces pauvres diables partaient en célébrant les louanges de la généreuse duchesse, en la couvrant de bénédiction, sans l’avoir vue.
    Quelques-uns, plus intrigants ou plus chanceux, entraient dans la maison, parvenaient jusqu’à la duchesse qui leur accordait une audience particulière. Ces audiences avaient toujours lieu dans l’oratoire. Et, par une délicatesse hautement appréciée de tous, nul ne pénétrait dans l’oratoire à ce moment : la duchesse épargnait ainsi à ces malheureux l’humiliation de révéler leur misère ou leurs affaires personnelles à d’autres qu’à elle-même. Tous les jours, il y avait ainsi un certain nombre de ces privilégiés admis à l’honneur d’un entretien en tête à tête avec la duchesse. Ces entretiens étaient généralement assez brefs. Tous ces privilégiés tiraient sans doute une assistance satisfaisante de la bienfaisante duchesse, car, comme les autres, ils se retiraient tous en chantant ses louanges.
    Enfin, il arrivait parfois qu’un pauvre diable se présentait en dehors de l’heure fixée pour ces sortes de réceptions. Celui-là, s’il insistait, était toujours conduit au comte d’Albaran, qui l’écoutait avec bienveillance et décidait s’il devait être reçu ou non par là duchesse.
    Or, ce mercredi matin, pendant que Valvert s’entretenait avec Muguette près de l’hospice des Quinze-Vingts, un de ces miséreux, qui avait passé auprès d’eux sans qu’ils eussent fait attention à lui, s’était présenté à l’hôtel en dehors de l’heure réglementaire. L’homme n’avait pas l’allure ni le costume sordide d’un mendiant. C’était ce que l’on appelle un pauvre honteux. Un de ces hères qui semblent mettre leur orgueil à dissimuler leur misère sous les dehors d’une propreté méticuleuse. Celui-ci, à en juger par son costume, très propre mais usé jusqu’à la corde, paraissait être un bourgeois : quelque commerçant qui n’avait pas réussi dans ses affaires.
    Suivant l’habitude en pareil cas, l’homme fut conduit à d’Albaran, devant lequel il se présenta, humble et courbé ainsi qu’il convenait à un solliciteur. Quant à d’Albaran, il avait cette attitude de bienveillance un peu hautaine qu’il prenait dans ces occasions-là. Mais dès que la porte se fut refermée sur le laquais qui avait introduit l’humble bourgeois, l’attitude des deux hommes se modifia instantanément : le bourgeois se redressa, d’Albaran quitta son air protecteur, s’avança, souriant et la main tendue, et en espagnol, prononça :
    – Enfin, vous voilà, mon cher comte. Et vous avez fait bon voyage ?
    – Autant qu’il est possible de le faire en pareil équipage, répondit le« cher comte » en serrant cordialement la main qu’on lui tendait et avec une moue fort dépitée.
    – C’est-à-dire on ne peut plus mal, traduisit d’Albaran en riant. Je vous plains de tout mon cœur.
    – Bah ! fit l’homme en levant insoucieusement les épaules, le service est le service.
    – Venez, trancha d’Albaran, Son Altesse vous attend avec impatience.
    Il le conduisit lui-même à l’oratoire, l’introduisit et se retira dans l’antichambre qui précédait cet oratoire. Il demeura là, prêt à accourir au premier appel de sa maîtresse.
    Le mystérieux solliciteur, qu’il avait accueilli comme un ami, qui était espagnol comme lui et à qui il avait donné le titre de comte, se trouva seul devant la duchesse assise dans son fauteuil. Il fit trois pas. A chaque pas il s’arrêta et exécuta la plus savante, la plus impeccable des révérences de cour. Et cela s’accomplissait avec tant d’élégante distinction que, malgré son misérable costume, il gardait fort grande allure. Ces trois pas l’amenèrent devant le fauteuil de la duchesse, qui attendait, sans un mot, sans un geste, calme et majestueuse comme une reine. Et, comme s’il eût été, en effet, devant une reine, il fléchit le genou et attendit.
    – Bonjour, comte, prononça la duchesse de sa voix grave et harmonieuse, dans le plus pur castillan.
    Et, avec un sourire gracieux, elle lui tendit la main en un geste de souveraine. Le comte prit respectueusement du bout des doigts cette main blanche et l’effleura du bout des lèvres.
    – Relevez-vous, comte, autorisa gracieusement la duchesse.
    Le comte obéit en silence, fit une nouvelle révérence, aussi profonde, aussi impeccable que les précédentes, et, se redressant,

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