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La Flèche noire

La Flèche noire

Titel: La Flèche noire Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Louis Stevenson
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quelques pas et ils se trouvèrent devant les ruines de la maison. Elle avait été une habitation agréable et bien défendue. Un fossé desséché était creusé profondément tout autour, mais il était, à présent, plein de gravats, et une poutre, tombée en travers, formait pont. Les deux murs opposés étaient encore debout, le soleil brillait à travers leurs fenêtres vides, mais le reste s’était effondré et ne formait plus qu’un grand tumulus de ruines, noircies par le feu. Déjà, dans l’intérieur, quelques plantes poussaient, vertes, dans les crevasses.
    – À présent, j’y pense, murmura Dick, ce doit être Grimstone. C’était un fort à un certain Simon Malmesbury. Sir Daniel fut un fléau pour lui   ! C’est Bennet Hatch qui l’a brûlé, il y a maintenant cinq ans. Et, ma foi, c’est dommage, car c’était une belle maison.
    Dans le fond du vallon, où le vent ne soufflait pas, il faisait chaud et tout était tranquille   ; et, Matcham, posant la main sur le bras de Dick, leva un doigt   :
    – Écoutez   ! dit-il.
    Alors on perçut un son étrange, qui troublait le calme. Il fut répété deux fois avant qu’ils n’en reconnussent la nature. C’était le bruit d’un gros homme s’éclaircissant la gorge   ; puis une voix rude et fausse chanta   :
    – Alors, debout, il parla, le maître, le roi des Outlaws   :
    – Que faites-vous là, mes joyeux compagnons, parmi les forêts vertes   ?
    – Et Gamelyn répondit – il ne regardait jamais à terre   ;
    – Oh, il faut qu’ils errent dans les bois, ceux qui ne peuvent aller en ville.
    Le chanteur s’arrêta, un léger cliquetis de fer suivit, puis le silence.
    Les deux jeunes gens se regardèrent. Quel qu’il fût, leur invisible voisin était de l’autre côté de la ruine. Tout d’un coup la figure de Matcham s’anima, et, en un instant, il franchit la poutre renversée et se mit à grimper avec précaution sur la haute pile de décombres qui remplissait l’intérieur de la maison sans toit   ; Dick aurait voulu le retenir s’il en avait eu le temps, mais il ne put que le suivre.
    Juste dans un coin de la ruine deux poutres étaient tombées en croix et protégeaient une place grande comme un banc d’église. Dans ce coin, les deux jeunes gens se blottirent en silence. Ils étaient parfaitement cachés et, par un trou de flèche, ils voyaient le côté opposé.
    En regardant par là, ils furent paralysés de terreur en constatant leur position. La retraite était impossible   ; à peine osaient-ils respirer. Sur le bord même du fossé, à trente pieds à peine de l’endroit où ils se tenaient accroupis, un chaudron de fonte bouillait et fumait sur un feu brillant. Tout auprès, dans l’attitude de quelqu’un qui écoute, comme s’il avait perçu le bruit de leur ascension parmi les ruines, un homme, grand, à la face rouge et basanée, était debout. Il tenait dans la main droite, une cuillère, et à sa ceinture pendaient une corne et une formidable dague. Sans aucun doute, c’était le chanteur   ; et, sans doute aussi, il était en train d’agiter le contenu de la marmite, lorsque le bruit de quelque pas maladroit sur les plâtras, était venu à son oreille   ; un peu plus loin, un autre homme sommeillait, étendu et roulé dans un manteau brun   ; un papillon voltigeait autour de sa figure. Ils étaient dans un espace découvert, tout blanc de marguerites et, au bout opposé, un arc, un carquois avec des flèches et un morceau de carcasse de daim étaient suspendus à une aubépine fleurie.
    Bientôt l’individu se relâcha de son attitude attentive, porta la cuillère à sa bouche, goûta, fit un signe de tête et recommença à remuer et à chanter.
    Oh   ! il faut qu’ils errent dans le bois ceux qui ne peuvent aller en ville.
    croassa-t-il, reprenant son chant où il l’avait laissé.
    Ô Seigneur, nous ne sommes pas du tout ici pour mal faire,
    Mais, si nous nous rencontrons avec un cerf du bon roi, pour lui lancer une flèche.
    Tout en chantant, il prenait de temps en temps une cuillerée de bouillon, soufflait dessus et la goûtait en se donnant des airs de cuisinier expérimenté. Enfin, quand il jugea le ragoût prêt, il prit la corne de sa ceinture et en donna trois appels modulés. L’autre se réveilla, se retourna, chassa le papillon et regarda autour de lui.
    – Eh quoi, frère   ? dit-il. Dîner   ?
    – Oui, ivrogne, répliqua le cuisinier, c’est le dîner,

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