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La Flèche noire

La Flèche noire

Titel: La Flèche noire Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Louis Stevenson
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    Lawless, hélas   ! qui roulait, ivre, errant dans la maison pour chercher un coin où cuver ses libations. Dick rageait intérieurement. L’espion d’abord effrayé, s’était rassuré en voyant qu’il n’avait affaire qu’à un ivrogne, et avec un mouvement d’une rapidité féline glissa hors de la chambre et disparut de la vue de Dick.
    Que faire   ? S’il perdait contact avec Lawless pour la nuit, il était également incapable de combiner un plan pour l’enlèvement de Joanna et de l’exécuter. Si, d’autre part, il se risquait à interpeller l’outlaw ivre, l’espion pouvait être encore à portée de voix, d’où les conséquences les plus funestes.
    Dick se résolut à courir cette chance. Se dégageant de la tapisserie, il resta dans l’ouverture de la porte la main levée en signe d’avertissement. Lawless, la figure cramoisie, les yeux injectés vacillait sur ses jambes, s’avançait en titubant. Enfin son œil aperçut vaguement son chef, et malgré les signaux impérieux de Dick, le salua aussitôt à haute voix par son nom.
    Dick sauta sur lui et secoua furieusement l’ivrogne.
    – Brute   ! siffla-t-il, et non homme   ! C’est pis qu’une trahison d’être aussi stupide. Nous pouvons être tous perdus grâce à ta sottise.
    Mais Lawless ne fit que rire et chancela en voulant frapper le jeune Shelton sur l’épaule.
    À ce moment l’oreille fine de Dick perçut un rapide frémissement dans la tapisserie. Il sauta vers le bruit, et, en un instant, un morceau de tenture était déchiré, et Dick et l’espion se débattaient tous deux dans ses plis. Ils roulaient l’un sur l’autre, cherchant mutuellement à se prendre à la gorge, tous deux gênés par la tenture et tous deux silencieux dans leur furie mortelle. Mais Dick était de beaucoup le plus fort, et bientôt l’espion était étendu sans défense sous son genou et, d’un seul coup du long poignard, il expira.

CHAPITRE III

L’ESPION MORT
    À tout ce combat furieux et rapide Lawless avait assisté inutile, et même lorsque tout fut fini et que Dick, déjà relevé, écoutait avec l’attention la plus passionnée le bourdonnement lointain qui venait des étages inférieurs de la maison, le vieil outlaw, flageolant encore sur ses jambes comme un rameau agité par le vent, continuait à fixer stupidement le visage du mort.
    – C’est bien, dit enfin Dick, ils ne nous ont pas entendus, les saints soient loués   ! Mais qu’est-ce que je vais faire maintenant de ce pauvre espion   ? Au moins je vais reprendre mon gland dans sa poche.
    Ce disant, Dick ouvrit l’aumonière   ; il y trouva quelques pièces de monnaie, le gland et une lettre adressée à Lord Wensleydale, et scellée du sceau de Lord Shoreby. Ce nom réveilla la mémoire de Dick, et il brisa aussitôt la cire et lut la lettre. Elle était courte, mais à la grande joie de Dick, elle donnait la preuve certaine que Lord Shoreby correspondait traîtreusement avec la maison d’York.
    Le jeune homme portait habituellement sur lui de quoi écrire   ; ainsi pliant un genou auprès du cadavre de l’espion, il put écrire ces mots dans un coin de la feuille   :
    « Monseigneur de Shoreby, vous qui avez écrit la lettre, savez-vous pourquoi votre homme est mort   ? Mais, je vous conseille, n’épousez pas.
    « Jean RÉPARE-TOUT. »
    Il posa ce papier sur la poitrine de l’espion, et alors, Lawless, qui avait assisté à ces dernières opérations avec de vagues retours d’intelligence, tout à coup tira une flèche noire de dessous sa robe, et en épingla la feuille. La vue de cette insolence ou, comme il semblait presque, de cette cruauté pour le mort, arracha un cri d’horreur au jeune Shelton   ; mais le vieil outlaw ne fit qu’en rire.
    – Hé, je veux avoir le bénéfice pour mon ordre, fit-il, avec un hoquet. Mes joyeux compères doivent en avoir le bénéfice… le bénéfice, frère   ; puis, levant les paupières et ouvrant la bouche comme un chantre, il se mit à tonner d’une voix formidable.
    Si vous buvez du vin clair…
    – Paix, imbécile, cria Dick, et il le poussa durement contre le mur. En deux mots… s’il peut se faire qu’un homme puisse me comprendre, étant plus plein de vin que de bon sens… en deux mots et au nom de Marie, sortez de cette maison, ou, si vous continuez à rester, non seulement vous serez pendu, mais moi aussi   ! Allons   ! debout, vivement   ! ou par la messe, j’oublierais que

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