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La force du bien

La force du bien

Titel: La force du bien Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marek Halter
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1942. Je suis arrivé en pleine tempête de neige. C’était sinistre… et ça m’a emballé ! Voilà. »
    Marc et Jacqueline Monod éclatent de rire.
    « Est-ce que vous connaissiez les lois d’exception de Pétain ?
    — Oui, bien sûr. Tout le monde était au courant.
    — Et comment avez-vous réagi, à l’époque ?
    — Avec indignation, avec horreur ! Mais comment réagir autrement ?
    — Y avait-il déjà des Juifs, beaucoup de familles juives réfugiées dans le pays ?
    — Une bonne partie était déjà là. Mais j’ai su très vite ce qu’il se passait. En fait, un premier couple juif était arrivé, avait trouvé l’endroit très agréable, avec une population très accueillante et des possibilités d’approvisionnement, d’alimentation, comme il n’y en avait plus dans les villes. Ils se sont installés, et le bouche-à-oreille a fait le reste. Beaucoup de leurs amis, et des amis de leurs amis, en provenance de Hollande, de Belgique, sont peu à peu venus habiter Le Malzieu.
    — Ces nouveaux et nombreux arrivants ne risquaient-ils pas, un jour ou l’autre, d’être repérés ou dénoncés ?
    — On pouvait le redouter. Un jour, ces Juifs auraient des ennuis. C’était prévisible. Il y en avait jusque sous les voûtes de l’église, qui étaient cachés là grâce au curé, M. Béraud !… C’est en pensant aux risques de dénonciation que nous avons pris langue avec le pasteur Gourdon : afin de pouvoir les prévenir et les protéger. Il était préoccupé, comme nous, des menaces qui pesaient sur eux, et avait ses entrées à la préfecture, à Mende. Il savait ce qu’il se passait ou allait se passer. Et nous étions au courant des rafles qui avaient déjà eu lieu dans les Cévennes. Il devait nous avertir de toute nouvelle inquiétante, et surtout d’une éventuelle rafle. Ce qu’il a d’ailleurs fait quand il l’a fallu… De notre côté, nous sommes entrés dans la Résistance, ma femme et moi, à la fin de 1942, par l’entremise de Gilbert de Chambrun, le responsable régional de la Résistance en Lozère.
    — Est-ce le fait d’être dans la Résistance qui vous a conduits à aider des Juifs, ou est-ce par conviction personnelle ?
    — Ah non, pas du tout ! C’est par conviction personnelle, aussi bien ma femme que moi. Nous sommes protestants, et la tradition protestante, en France, est aussi peu antijuive que possible. Et je suis d’une famille qui était dreyfusarde. Il y a une espèce de tradition projuive, dans ma famille, qui ne se discute pas, qui va de soi. Même si auparavant nous avions été antisémites, ce qui n’était pas le cas chez nous, le sort qui était fait aux Juifs nous aurait imposé d’être prosémites et de les aider au maximum. Il ne s’agissait pas d’amour, mais… Comment vous dire ? Ces Juifs étaient martyrisés, pourchassés : il fallait leur éviter d’être pris… En fait, ça n’avait aucun lien avec la Résistance, c’était un engagement à nous, inévitable…
    — Mais n’était-ce pas multiplier les risques par deux que d’être en même temps engagé dans la Résistance et dans une action de soutien aux Juifs ?
    — À l’époque, je n’ai même pas réfléchi à ça ! C’est possible, oui, c’est possible que le risque ait été multiplié par deux. Mais vous savez, on a retrouvé, après la guerre, un paquet de lettres de dénonciation contre ma femme et moi dans les dossiers de la police judiciaire, à Mende ! Au moins une par semaine… En fait, ce qui nous a protégés de la Gestapo, c’est qu’elle n’aimait pas trop s’aventurer loin de ses bases, dans des coins retirés comme ici. Depuis le décret du STO du 2 février 1943 sur le travail obligatoire en Allemagne, beaucoup de jeunes avaient pris le large. Dans la région, nous avions créé une multitude de maquis armés et donc dangereux pour une voiture de la Gestapo qui se serait risquée dans le secteur…
    — Est-ce que vous saviez, monsieur et madame Monod, qu’il y avait d’autres gens qui aidaient les Juifs, ici, pendant la guerre ? Comme M. René Raoul, par exemple ? Lorsque j’ai parlé avec lui, hier, il m’a donné l’impression qu’il agissait tout seul dans son coin, sans rien dire… »
    Le couple s’exclame de concert :
    « Mais c’est ça ! C’est tout à fait ça ! On était très discrets, les uns et les autres… »
    Je leur parle de René Raoul, de son soutien à la famille Radacz, à

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