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La force du bien

La force du bien

Titel: La force du bien Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marek Halter
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mort, alors nous l’avons caché jusqu’à ce qu’il passe à Mostar grâce à des partisans. Sa famille avait pu partir avant lui.
    — Avez-vous eu peur ?»
    La vieille dame secoue la tête dans un sourire de défi.
    « Non », dit-elle simplement.
    Elle se penche aussitôt vers moi pour ajouter cette phrase étonnante :
    « L’ humanité ne connaît pas la peur. »
    La solidarité, la charité spontanée ne connaissent pas la peur – ou, à tout le moins, la surmontent. Voilà ce qu’affirme Zaneiba Hardaga, une Juste qui finit sa vie sous les bombes, aujourd’hui comme jadis, à Sarajevo. Les différences de religion ne comptaient pas  : voilà le secret de cette musulmane qui a sauvé des Juifs.
     
    Qu’était donc la communauté juive de Yougoslavie ? On sait que les premiers Juifs à se fixer à Sarajevo sont arrivés vers 1465. La première synagogue a été édifiée en 1581. Cette communauté était surtout composée de Séfarades qui avaient fui les persécutions espagnoles. Avant la Seconde Guerre mondiale, il y a douze mille Juifs à Sarajevo, soit vingt pour cent de la population de la ville.
    Les nazis envahissent la Yougoslavie en mars 1941 ; ils arrivent d’Autriche et de Hongrie. Les Italiens en profitent pour occuper une partie de la côte adriatique, dont la ville de Mostar.
    Hitler partage aussitôt la Yougoslavie en deux provinces : la Croatie catholique, et la Serbie orthodoxe. Anton Pavlovic, le chef du parti fasciste Oustachi, devient le président de l’État croate et participe à l’extermination des orthodoxes serbes et du judaïsme yougoslave, vieux de plus de cinq siècles.
    À l’arrivée des Allemands, un groupe de jeunes musulmans va incendier la grande synagogue de Sarajevo. C’est en Bosnie que le grand mufti de Jérusalem, Hadj Amin el-Husseini, va constituer la Division musulmane promise à Hitler pour combattre, aux côtés des nazis, « le communisme et les Juifs »…
    En dépit de cette honteuse connivence, ce couple musulman, Zaneiba et Mustapha Hardaga, a protégé et sauvé ses amis juifs, les Kabilio.
    Et c’est ici que le miracle se perpétue d’une génération à l’autre, pour que le monde puisse survivre , puisque à présent c’est la famille sauvée qui se porte au secours des descendants de ses anciens sauveteurs.
     
    Venu de Sarajevo, me voici maintenant à Jérusalem chez Tova Grinberg-Kabilio. Elle est en compagnie d’Amra Hardaga, petite-fille de Zaneiba Hardaga. Toutes deux, devant la luxuriante verrière pleine de plantes vertes et de fleurs de son appartement, répondent à mes questions.
    « Je suis née à Sarajevo en 1938, me dit Tova. Quand les nazis ont envahi la Yougoslavie, j’avais trois ans. Je me rappelle donc peu de choses de la première année de l’Occupation. Mes premiers souvenirs sont liés à un appartement qui n’était pas le nôtre. C’était celui d’un voisin musulman ami de mes parents : Mustapha Hardaga, et de sa femme Zaneiba… Dès que les nazis, aidés par des fascistes croates catholiques et musulmans, ont commencé la chasse aux Juifs, Mustapha et Zaneiba nous ont pris chez eux, sous leur protection. »
    Tova Grinberg-Kabilio est une femme à l’expression posée, au visage rond et calme. Elle dégage une impression de force, de bonté, que souligne un sourire plein d’affection. Il y a en elle une générosité maternelle évidente, le sens de la protection.
    Elle me tend une photographie usée, patinée par le temps.
    « Voici l’une des rares photos qui me restent de cette époque. On y reconnaît Zaneiba Hardaga, voilée comme l’était la majorité des musulmanes. À côté d’elle, il y a ma mère, qui cache avec son sac à main l’étoile jaune sur sa poitrine. Les deux fillettes, c’est moi en compagnie de ma meilleure amie, Amra, la petite-fille de Mustapha et de Zaneiba… Quand la situation est devenue dangereuse pour nous à Sarajevo, à cause des dénonciations, Mustapha Hardaga nous a emmenés, ma mère, mon frère et moi, chez des amis à lui, en zone italienne…
    — Et votre père ?
    — À la fin, il ne savait plus où se cacher : il est retourné chez nos amis Hardaga. À la Libération, nous nous sommes tous retrouvés à Sarajevo et, comme notre appartement avait été dévasté, nous nous sommes installés à nouveau chez Mustapha et Zaneiba. C’est plus tard, en 1950, que nous sommes partis en Israël.
    — Êtes-vous restée en contact avec la

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