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La France et les étrangers: du milieu du XIXe siècle à nos jours

La France et les étrangers: du milieu du XIXe siècle à nos jours

Titel: La France et les étrangers: du milieu du XIXe siècle à nos jours Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Christophe Verneuil
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comme n'importe quel autre prêtre. C'est ainsi qu'après une visite à l'évêque Santefiore de San Francisco-vieil ami de Mgr Orbella-et des vacances pendant lesquelles il roula de San Francisco à Chicago il arriva dans la paroisse Sainte-Bernadette, o˘ il trouva beaucoup de plaisir à exécuter les t‚ches les plus humbles de la vie d'un curé. Sans jamais le moindre regret, le moindre doute.
    Les yeux tournés vers l'enfant de choeur qui se vêtait, le père Cronin regretta la foi simple qui l'avait si longtemps soutenu et réconforté. L'avait-elle abandonné provisoirement ou l'avait-elle fui à tout jamais ?
    Dès qu'il fut prêt, Kerry passa la porte de la sacristie donnant sur la chapelle. Il se retourna au bout de quelques pas. Le père Cronin ne le suivait pas.
    Brendan Cronin hésita. Il apercevait par la porte le grand crucifix mural et la plate-forme de l'autel. La partie la plus sacrée de l'église lui semblait très étrange, comme s'il la découvrait objectivement pour la première fois. Et il ne comprit pas comment il avait pu y voir un territoire sacré. Ce n'était qu'un lieu banal, rien de plus. S'il passait cette porte et se mettait à débiter ses litanies, il ne serait rien d'autre qu'un hypocrite, il tromperait tous les membres de la congré-gation.
    Comment puis-je dire la messe alors que je ne crois plus ? se demanda Brendan.
    Le calice dans la main gauche, la main droite posée sur la bourse et le voile, il serra le vase sacré contre lui et rejoignit finalement Kerry dans le sanctuaire, o˘
    le Christ en croix parut lui lancer un bref regard accu-sateur.
    Comme à l'ordinaire, moins d'une centaine de personnes étaient venues pour la première messe. Leurs visages étaient anormalement p‚les et radieux, comme si Dieu n'avait pas permis à de véritables fidèles d'entrer ce matin dans l'église et les avait remplacés par une cohorte d'anges susceptibles de témoigner du sacrilège d'un prêtre osant célébrer bien qu'ayant perdu la foi.
    Le désespoir du père Cronin empira au cours de la cérémonie. Dès l'instant o˘ il prononça l'Introibo ad altare Dei, chaque phase de la messe lui infligea une douleur plus grande. Au moment o˘ Kerry McDevit fit passer le missel d'un côté à l'autre de l'autel le découragement du père Cronin fut si grand qu'il se sentit accablé. Son épuisement spirituel et émotionnel était tel qu'il pouvait à peine lever les bras, se concentrer sur l'Evangile, réciter les paroles sacrées. Au moment du canon, il bredouillait. Kerry le regardait, incrédule, et il était clair que l'assistance se doutait que quelque chose n'allait pas. Il était en sueur. Une ombre grise s'abattit sur lui, puis il se sentit glisser dans une spirale de ténèbres effrayantes.
    C'est à l'instant de l'Elévation, au moment de dire les mots chargés du mystère de la transsubstantiation, qu'il s'en prit soudain à lui-même d'être incapable de croire, à l'Eglise de ne pas l'avoir mieux protégé du doute, à
    sa vie tout entière qui s'était perdue dans la recherche de mythes sans fondement ni signification. Sa colère monta, bouillonna et, tout à coup, se changea en fureur.
    A son grand étonnement, il lança un cri affreux et projeta le calice dans le sanctuaire. Il heurta le mur avec un bruit métallique, répandant le vin consacré en tous sens, retombant au pied de la statue de la Vierge pour finir devant le lutrin sur lequel étaient posés les saints Evangiles.
    Kerry McDevit recula, terrifié, et dans la nef, les dizaines de fidèles poussèrent un seul cri de surprise.
    Mais cela ne suffit pas à calmer Brendan Cronin.
    Cédant à la fureur qui était sa seule protection contre le désespoir et l'envie de suicide, il jeta à terre les hosties consacrées puis, hurlant toujours de colère et de douleur, il arracha son étole, la foula aux pieds et s'enfuit en courant dans la sacristie. Là, la colère le quitta aussi rapidement qu'elle était venue, le laissant dans la plus grande confusion.
    C'était le 1er décembre.
    Laguna Beach, Californie En ce premier dimanche de décembre, Dom Corvaisis déjeuna avec Parker Faine à la terrasse du Las Brisas, à une table ombragée dominant la mer éclaboussée de soleil. Le beau temps semblait vouloir durer. La brise marine leur apportait le cri des mouet-tes, le go˚t de la mer, le parfum des jasmins sauvages.
    Dominick fit à Parker le récit détaillé de sa lutte contre le somnambulisme.
    Parker Faine était

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