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La France et les étrangers: du milieu du XIXe siècle à nos jours

La France et les étrangers: du milieu du XIXe siècle à nos jours

Titel: La France et les étrangers: du milieu du XIXe siècle à nos jours Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Christophe Verneuil
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satisfait de lui-même et du monde, bien qu'en fait il f˚t profondément troublé.
    Il suivit un petit chemin dallé, longea des parterres de fleurs clairsemés o˘ la terre apparaissait par endroits. Il ouvrit la porte de la sacristie et entra.
    L'odeur d'encens se mêlait à celle de la cire dont étaient soigneusement recouverts les boiseries et les objets de bois de l'église.
    Le père Cronin n'eut pas besoin d'allumer. La petite flamme rouge et vacillante de la sacristie lui suffisait Il s'agenouilla sur le prie-Dieu et inclina la tête. En silence, il implora le Seigneur de le rendre digne de sa t‚che. Dans le temps, cette prière secrète, avant l'arrivée du sacristain et de l'enfant de choeur, ne manquait pas d'emplir son esprit de joie à l'idée de bientôt célébrer la messe. Mais aujourd'hui, comme pratiquement tous les jours depuis quatre mois la joie le fuyait. Il n'éprouvait qu'un vide sinistre qui lui tordait le coeur et enfonçait un fer glacé dans ses entrailles.
    Serrant les dents comme pour se plonger volontairement dans un état d'extase spirituelle, il réitéra sa prière, mais en vain.
    Après s'être lavé les mains, le père Cronin déposa sa barrette sur le prie-Dieu et ouvrit l'armoire contenant les vêtements consacrés. C'était un homme sensible, doté d'une ‚me d'artiste, et il voyait dans la beauté
    grandiose du cérémonial l'écho subtil de la gr‚ce divine. D'ordinaire, quand il arrangeait l'aube blanche de telle sorte qu'elle tomb‚t parfaitement sur ses chevilles, un frisson sacré le parcourait à l'idée que lui Brendan Cronin, allait accomplir le mystère sacré.
    D'ordinaire, mais pas aujourd'hui. Et pas depuis plusieurs semaines.
    Le père Cronin passa son aube avec aussi peu d'attention qu'un ouvrier enfilant son bleu de travail pour aller à l'usine.
    quatre mois plus tôt, début ao˚t, le père Brendan Cronin avait commencé à perdre la foi. L'imperceptible et pourtant implacable feu du doute s'était allumé
    en lui et consumait les choses auxquelles il croyait pourtant le plus.
    Pour n'importe quel prêtre, la perte de la foi est un événement terrible, mais ce l'était plus encore pour Brendan Cronin. Simplement parce qu'il avait été
    appelé à la prêtrise très jeune. Maintenant, la foi éva-nouie, sa personne était tout entière vouée à l'office sacré, toutefois il savait qu'il ne pourrait continuer très longtemps à dire la messe, à prier et à réconforter les affligés alors que tout cela n'avait plus aucun sens.
    Le père Cronin plaça l'étole autour de son cou. Au moment o˘ il s'emparait de la chasuble, la porte de la sacristie donnant sur la cour s'ouvrit et un jeune garçon se précipita dans la pièce, allumant l'électri-cité, ce que le prêtre avait négligé de faire.
    ´ Bonjour, mon père !
    - Bonjour, Kerry. Tu as l'air en forme, ce matin. ª
    A l'exception de ses cheveux qui étaient bien plus roux que ceux du père Cronin, Kerry McDevit aurait pu être un parent très proche du prêtre. Il était un peu grassouillet, avec des taches de rousseur et de grands yeux verts espiègles. ´ «a va, mon père, mais il fait drôlement froid dehors, un vrai temps à se geler les...
    - Ah oui ? A se geler quoi ?
    - ... les oreilles, fit le garçon, embarrassé. Ce qui veut dire qu'il fait vraiment très très froid. ª
    En temps normal, Brendan se serait amusé de la gêne du garçon. Son humeur était cependant telle qu'il n'afficha pas le moindre sourire. Kerry s'empressa de se dévêtir et de passer les habits de cérémonie.
    Brendan prit le manipule, baisa la croix en son centre, la plaça sur son avant-bras gauche et ne ressentit rien. Une sensation de froid et de creux avait pris la place de la foi et de la joie d'autrefois.
    Jusqu'à la fin ao˚t, il n'avait jamais douté de la sagesse de son engagement envers l'…glise. Il s'était montré si brillant en étudiant à la fois les matières classiques et la théologie qu'on l'avait choisi pour compléter sa formation au Collège américain de Rome. Il aimait la Ville éternelle-son architecture, son histoire, sa population aimable. Après avoir été ordonné
    et accepté dans la Société de Jésus, il passa deux ans au Vatican en tant qu'assistant de Mgr Giuseppe Orbella, conseiller doctrinal de Sa Sainteté le pape.
    Cet honneur aurait pu être suivi d'une affectation auprès du cardinal de Chicago, mais le père Cronin avait demandé une cure dans une petite paroisse,

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