Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
La France et les étrangers: du milieu du XIXe siècle à nos jours

La France et les étrangers: du milieu du XIXe siècle à nos jours

Titel: La France et les étrangers: du milieu du XIXe siècle à nos jours Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Christophe Verneuil
Vom Netzwerk:
événements importants s'étaient produits ici, ils n'auraient pas pu s'enfuir comme ça de son esprit. Il avait une excellente mémoire et n'était pas du genre à réprimer les souvenirs désagréables.
    Sa nuque continuait cependant à le picoter. Par là, pas très loin dans ces plaines sans chemins du Nevada, s'était produit quelque chose qui maintenant l'aiguil-lonnait depuis son inconscient, une chose qui s'y trouvait profondément enkystée et qui le piquait tout à fait comme une aiguille laissée par accident dans un édre-don pourrait piquer un dormeur et le tirer de son rêve.
    Jambes écartées, pieds solidement plantés dans le talus, sa tête carrée vissée sur son torse r‚blé, Ernie semblait mettre le paysage au défi de s'exprimer plus clairement. Il fit un effort pour réveiller le souvenir assoupi lié à cet endroit (s'il en existait un), mais plus il tentait de s'approcher de la révélation, plus vite celle-ci paraissait s'éloigner de lui. Puis il n'y eut plus rien.
    La sensation de déjà-vu s'évanouit aussi complètement que s'était évaporé avant cela le sentiment d'une imminente épiphanie. Le picotement ne se faisait plus sentir dans sa nuque. Les battements frénétiques de son coeur avaient repris un rythme plus normal.
    Abasourdi, la tête lui tournant un peu, il étudia le paysage qu'envahissait rapidement le crépuscule, devant lui: les pentes légères, les épines dorsales et les dents proéminentes des rochers, les broussailles et l'herbe, les creux et les bosses battus des intempéries de la terre immémoriale-sans arriver à imaginer ce qu'il avait pu y trouver de spécial. C'était juste une portion des hautes plaines, que pratiquement rien ne distinguait d'autres endroits identiques d'ici à Elko ou d'ici à Battle Mountain.
    Désorienté par la brutalité de son plongeon depuis les hauteurs de sa conscience transcendantale, il se retourna pour regarder la camionnette, qui l'attendait au nord de l'autoroute. Il se sentit bien en vue et un peu ridicule quand il pensa à la façon dont il avait foncé ici, sous l'emprise d'une étrange excitation. Il espéra que Faye ne l'avait pas vu; si par hasard elle avait regardé par une fenêtre donnant par ici, elle n'aurait pu manquer son numéro, car le motel était à
    quatre cents mètres et les signaux de détresse de son véhicule en faisaient l'objet de loin le plus frappant dans l'obscurité qui gagnait.
    L 'obscurité.
    L'approche de la nuit frappa Ernie Block de plein fouet. Un instant, le magnétisme du lieu avait été plus fort que sa peur des ténèbres. Mais il venait de se rendre compte que la région orientale du ciel était d'un violet foncé presque noir et que l'occident ne jouirait plus que pendant quelques minutes d'une vague lueur blanch‚tre.
    Il poussa un cri de terreur et courut vers la route, traversant la chaussée comme un fou, risquant plusieurs fois de se faire renverser par des véhicules. Des pneus crissèrent, des klaxons vengeurs retentirent à
    ses oreilles. Arrivé devant la Dodge, il prit conscience de l'obscurité absolue qui régnait sous la camionnette.
    Elle voulait l'attirer, l'étouffer.
    Il ouvrit la portière. Il grimpa sur la banquette, mit la fermeture de sécurité.
    Il se sentait mieux mais s'il n'avait pas été aussi près de chez lui, il serait cértainement mort de froid parce que incapable de bouger. Il ne lui restait plus que quelques centaines de mètres à parcourir. Il mit pleins phares et l'obscurité recula quelque peu. Il n'avait pas le courage de revenir sur une voie rapide et préféra rouler au pas sur la bande d'arrêt d'urgence.
    La bretelle de sortie était éclairée par des arcs au sodium. Il n'était plus très loin à présent. Cent cinquante mètres tout au plus. Et bientôt, il fut sur le parking du motel. Il gara la camionnette devant la réception, coupa les phares et le moteur.
    Derrière les baies de la réception, il put voir Faye au comptoir. Il se précipita dans le b‚timent, referma violemment la porte derrière lui. Il lui adressa un sourire qu'il souhaitait convaincant.
    Je commençais à m'en faire, dit-elle en lui rendant son sourire.
    -J'ai crevé ª, dit Ernie en ôtant son blouson.
    Il se sentit quelque peu soulagé. La tombée du jour était plus facile à accepter quand il n'était pas seul.
    Faye lui donnait des forces, mais il se sentait encore un peu mal à l'aise.
    Elle dit: ´ Tu m'as manqué.
    -Je suis parti après déjeuner.
    -«a

Weitere Kostenlose Bücher