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La Gloire Et Les Périls

La Gloire Et Les Périls

Titel: La Gloire Et Les Périls Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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Schomberg
se rasséréna, gloutit viandes et vin à cœur content et, se tournant à la fin
vers le capitaine de Clérac, dit sur ce ton cavalier, enjoué et militaire qu’il
prenait avec les officiers, je dis avec « les officiers » et non avec
« ses officiers » car les mousquetaires du roi ne dépendaient que de
Sa Majesté :
    — Eh bien, Clérac ! Que diantre est devenu ce
message oral que tu devais délivrer au comte d’Orbieu ? L’aurais-tu avalé ?
Ou ne serait-il propre qu’aux seules oreilles du comte ?
    — Le message n’est nullement secret, Monsieur le
Maréchal, dit Clérac. Il concerne mon frère Nicolas. Le roi avait arrêté de longue
date qu’il devait, à la fin de ce mois-ci, rejoindre les mousquetaires. Mais le
roi, considérant qu’il serait malaisé à Monsieur le comte d’Orbieu de recruter
un autre écuyer en pleine guerre, le laisse libre de garder Nicolas jusqu’à la
fin du siège, si tel est son désir.
    — Cela m’agréerait fort, dis-je aussitôt, pourvu que
Nicolas soit consentant.
    — Et comment ne le serais-je pas, Monsieur le
Comte ? dit Nicolas, sa tant belle et juvénile face rosissant de plaisir.
    — Dès lors, tout va bien qui finit bien, dit Schomberg
qui eût toutefois souhaité que les choses se fussent autrement terminées, à
tout le moins quant aux destinées d’Angoulême. Comte, dit-il en se levant, si
vous voulez voir la digue, il est temps d’y aller, car le soleil, si soleil il
y a, se couche tôt en ces mois froidureux.

 
CHAPITRE V
    Par le fait, quand nous saillîmes du logis de Monsieur de
Schomberg, il n’y avait pas le moindre soleil en vue, mais un ciel bas et noir,
une pluie qui tombait à seaux et un vent si violent qu’un homme avait peine à
se tenir debout. L’orage, en outre, était glacé, et en raison du vent, au lieu
de vous tomber sus, il vous frappait en oblique avec tant de force qu’il vous
contraignait à lui tourner le dos, autant pour échapper aux coups d’épingle
dont il vous eût criblé la face que pour ne point qu’il vous clouît le bec et
vous fit perdre vent et haleine.
    — Or çà ! dit Schomberg, prenons ma carrosse pour
gagner la pointe ! Que nous rapporterait d’y aller à cheval et d’être
trempés comme des soupes ? C’est assez que nos pauvres soldats poursuivent
leur labeur sur la digue par un temps pareil.
    Mais dès que la carrosse se mit à rouler, les rafales la
secouèrent comme prunier et les chevaux de tête peinaient fort pour ne marcher
qu’au pas, alors même que la route de la circonvallation avait été creusée dans
la terre de six bons pieds pour échapper au tir des Rochelais. Ce que je
trouvais fort rassurant, car le chemin creux nous protégeait non seulement des
mousquetades mais aussi, en partie, des brusques bourrasques qui, à mon
sentiment, étaient assez fortes pour projeter carrosse, chevaux et nous-mêmes
dans la boue.
    On parvint enfin à la pointe elle-même, laquelle était
située à quelque distance au nord du village de Chef de Baie et là, en mettant
pied à terre, nous fumes si sauvagement accueillis par un coup de vent que
Schomberg, nous criant de le suivre, courut se réfugier dans une baraque de
bois, laquelle était ancrée par des câbles dont l’extrémité était fixée au sol
par des crochets noyés dans un mortier. J’aperçus deux de ces câbles d’un œil
en me mettant à l’abri, mais je supposai qu’il y en avait d’autres et qu’il en
fallait bien au moins quatre pour que la baraque elle-même ne fut pas emportée
par la tempête.
    L’huis une fois reclos sur nous, je ne vis rien d’autre de
prime qu’un poêle, une grande table entourée de chaises rustiques, et dont le
large tableau était encombré de feuilles quadrillées, maintenues aux quatre
coins par des galets. Deux hommes se trouvaient là, simplement et chaudement
vêtus, desquels Schomberg me donna le nom et la qualité : l’ingénieur
Métezeau et Monsieur Thiriot, maître d’œuvre.
    — Comte, dit Schomberg, ces deux messieurs répondront à
toutes vos questions. L’un a fait les plans de la digue, et à l’autre le roi a
confié sa construction.
    — Monsieur le Maréchal, dit Métezeau, qui, tout maigre,
estéquit et grisonnant qu’il fut, paraissait cependant bien allant, à en croire
sa parole, qui coulait de source, distincte et bien timbrée : j’ai, en
effet, dessiné les plans de la digue, mais les améliore tous les jours en
suivant les

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