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La Gloire Et Les Périls

La Gloire Et Les Périls

Titel: La Gloire Et Les Périls Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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qu’elle ne se termine pas en pointe, mais en plateau. Elle a une
forme fortement pyramidale qui, présentant des côtés en pente, évitera que les
vagues ne se brisent contre eux avec autant de force que si ses côtés avaient
été verticaux. En outre, de place en place, des trous à sa base ont été
pratiqués, afin que s’y engouffre une partie du flux, ce qui diminuera d’autant
le volume, et partant la force des lames qui s’écrasent sur ses flancs. Au
centre de la digue, permettant l’entrée et la sortie des vaisseaux, ainsi
qu’une partie du flux montant et du flux descendant, il y aura un goulet de
trente toises de large.
    — Monsieur, dis-je, il me semble que ce goulet implique
qu’une longueur de digue est construite céans, à partir de Coureille, et une
autre, de l’autre côté de la baie, à partir de Chef de Baie.
    — C’est cela même, Monsieur le Comte. De reste, le ciel
s’étant éclairci et la pluie ayant cessé, vous plairait-il de sortir pour
distinguer la partie de la digue qui part de Chef de Baie ?
    J’acquiesçai à cette suggestion, mais non le maréchal de
Schomberg qui dit connaître l’autre côté et préféra demeurer dans la baraque.
Monsieur Métezeau proposa alors de lui faire apporter du vin chaud, proposition
que le maréchal, pour une fois gracieux, accepta.
    Nous remîmes hongrelines et chapeaux, mais la Dieu merci,
l’huis passé, nous ne fumes pas assaillis par la rafale que nous attendions,
mais par un vent qui, si froidureux qu’il fut, n’était pas tant violent et
insufférable.
    — Cela va mieux, dit Thiriot, le temps soulage. Mais il
ne soulagera pas longtemps. Ce n’est qu’une bonace entre deux bourrasques.
Monsieur le Comte, voici une longue-vue. Vous verrez mieux les travaux qui se
font de l’autre côté de la baie.
    Je lui sus gré de ce prêt et lui dis un merci qui fut
accompagné d’un sourire auquel il répondit par un sourire tout aussi
chaleureux. Ce gros homme était fin et il n’avait pas été sans apercevoir que
la rebuffade de Schomberg à son endroit m’avait fort rebroussé.
    Le ciel d’un noir d’encre à notre advenue était devenu gris
foncé, et sur ce gris, les pierres blanches du tronçon de digue à Coureille se
distinguaient assez bien, mais les soldats, ou si l’on préfère les ouvriers,
n’étaient que des petites taches sombres qui s’agitaient sur du blanc.
    — Monsieur Métezeau, dis-je, à défaut de voir comment
on procède à Coureille pour construire la digue, pourrait-on s’approcher céans
plus près du bord afin de voir vos hommes à l’ouvrage ?
    Peut-être dois-je expliquer ici, pour la clarté du récit,
que le grand chemin de la circonvallation, en arrivant à la pointe de
Coureille, se divisait en deux, une branche sur la dextre montant jusqu’à la
petite hauteur où s’élevait la baraque dont nous venions de saillir et l’autre
branche aboutissant à la mer. Tant est qu’en revenant à pied sur nos pas,
jusqu’au carrefour que nous avions traversé en carrosse quelques minutes plus
tôt, nous aboutîmes à un terre-plein creusé dans la terre et le roc, et large
assez pour accueillir les chariots qui déchargeaient continuellement des
pierres, celles-ci étant aussitôt grossièrement mises en tas par les soldats,
de façon à libérer assez d’espace pour le charroi suivant. Les arrivées de ces
chariots étaient si fréquentes qu’on avait placé une sentinelle à la croisée
des deux chemins pour que le chariot survenant se garât sur l’embranchement de
dextre afin de laisser passer le chariot qui repartait à vide.
    Il n’est pas que ma belle lectrice n’ait vu, au moment des
vendanges, ce que c’est qu’une hotte : un grand panier, de forme oblongue,
que l’on porte derrière le dos, grâce à des bretelles qui pèsent sur les
épaules. Une hotte qui transporte de grosses pierres et non pas des raisins
est, d’évidence, plus solidement construite, ainsi que les bretelles qui les
soutiennent et, puis-je aussi ajouter, les épaules et les dos de ceux qui
portent le tout.
    Voici comment le chargement se faisait. Le porteur (il n’y
en avait pas qu’un, mais plusieurs douzaines et d’ailleurs, ils se relayaient)
présentait sa hotte vide en tournant le dos aux deux chargeurs de son équipe,
et ceux-ci déposaient les pierres dans la hotte non sans quelque délicatesse,
pour que leur poids, en retombant, ne donnât pas une secousse aussi inutile que
douloureuse

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