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La Gloire Et Les Périls

La Gloire Et Les Périls

Titel: La Gloire Et Les Périls Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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placer en bonne
et due forme à la tête de l’armée, du camp et des provinces avoisinantes.
    — Monsieur de Guron ? dit Richelieu.
    — Oui, dit Monsieur de Guron, mais qu’il le fasse par
commission, et non par lettre de cachet, une lettre de cachet étant trop
facilement révocable.
    — Messieurs, je vous remercie, dit Richelieu en se
levant.
    Soit qu’elles eussent séché de soi, soit qu’il les eût
essuyées sans que je m’en aperçusse, il n’y avait plus trace, sur son visage
serein et quelque peu altier, des larmes qu’il avait répandues.
    — Je vais dormir sur vos bons conseils, Messieurs,
poursuivit-il, et au matin, la nuit portant conseil, je prendrai une décision.
Il se peut, reprit-il avec un petit brillement de l’œil, que je fasse un bon
général, si je trouve une bonne marmite pour y mijoter à loisir…
    Sans nous permettre le moindre sourire, nous nous retirâmes,
avec les coutumières révérences, et comme j’atteignais la porte, Richelieu me
rappela.
    — Monsieur d’Orbieu, voulez-vous, je vous prie,
demeurer ?
    La porte s’étant reclose sur Guron et le père Joseph, le
cardinal me dit sur un ton vif et expéditif :
    — Monsieur d’Orbieu, voulez-vous être céans demain sur
le coup de neuf heures ? Je vous emmènerai avec moi en carrosse à
Surgères, et vous pourrez conter au roi votre visite chez Madame de Rohan.
    — Je serai là, Monseigneur, dis-je avec un nouveau
salut.
    Je retrouvai Nicolas, ma jument et la pluie – la pluie
interminable. Et tout en cheminant, je me fis à moi-même trois remarques dont
je voudrais faire une relation en trois parties selon la méthode chère au
cardinal.
    Primo, le père Joseph n’avait suggéré son souple et
habile plan que parce que, connaissant bien Richelieu, il savait que c’était là
le parti où il s’arrêterait. Secundo, le cardinal ne m’emmenait avec lui
à Surgères que pour avoir un prétexte plausible pour voir le roi. Tertio, il
n’allait pas « dormir sur sa décision » : elle était déjà prise.

 
CHAPITRE VII
    Nicolas se trouva fort déconfit le lendemain, quant on eut
atteint la maison du cardinal à Pont de Pierre : il apprit de ma bouche
qu’il allait y demeurer seul en garde de nos montures, le cardinal ayant décidé
de m’emmener dans sa carrosse visiter le roi à Surgères.
    — Eh quoi ! Nicolas ! dis-je. Te voilà tout
remochiné ! Ramentois que si l’envie te prend de jouer du plat de la
langue, tu trouveras toujours quelque garde du cardinal avec qui clabauder.
    — Moi ! dit Nicolas, faisant par gausserie le fier
et le fendant (ce qu’il n’était à aucun degré), moi, futur mousquetaire du roi,
j’irais me commettre avec un mousquetaire du cardinal qui, se peut, ne sera
même pas gentilhomme !
    — Nicolas, dis-je, affectant de prendre sa remarque au
sérieux, c’est le service qui ennoblit et rien d’autre. Et le titre n’est rien,
si le gentilhomme ne continue pas à le mériter par les peines et les périls
encourus au service du roi.
    — Monsieur le Comte, dit Nicolas, je vais serrer avec
respect cette autre perle de sagesse dans la gibecière de ma mémoire.
    — Impertinent Nicolas ! Je ne sais ce qui me
retient de te bailler incontinent quelques bonnes buffes et torchons !
    — C’est qu’il se peut, Monsieur le Comte, que je sois
bien dépité ce jour d’hui de n’être point présent à ce qui se va passer à
Surgères. Je trouve déjà si émerveillable de vous suivre partout, et à mon âge
et à mon rang, de voir le roi si souvent. J’en ferai des contes à l’infini à
mes enfantelets.
    — Tes « enfantelets » ! Que voilà du
nouveau ! Mais, dis-moi ! N’est-ce pas mettre la charrue avant les
bœufs ? Allons, Nicolas, d’ores en avant, tu ne seras pas si seul en mes
absences : un beau visage, dans tes songes, te tiendra compagnie…
    — Il ne me quitte pas, dit Nicolas. Mais c’est tout
ensemble plaisir et déplaisir. Qu’est le pensement sans la présence ?
    — Allons ! Allons ! Nicolas !
Réchauffe-toi le cœur avec un beau feu d’espoir ! Patience ! Pourquoi
perdrais-tu ton petit paradis ? La belle n’a pas dit son dernier
mot ! Et dès que l’amour chez les dames prend de la force, il passe fer et
feu et saute les murailles.
    Là-dessus, étant son père plus que son maître, je le pris
dans mes bras et lui donnai une forte brassée, laquelle il me rendit, les
larmes au bord des cils.
    Le

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