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La grande vadrouille

La grande vadrouille

Titel: La grande vadrouille Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Georges TABET , André TABET
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Anglais contre l’invincible Germanie. Le sabotage était partout dans ce maudit pays, du haut en bas de l’échelle. Il allait s’en occuper personnellement et ne pas laisser à un sous-ordre la poursuite d’une piste peut-être fructueuse et l’interrogatoire d’un homme retors.
    Il frappa à la porte du maestro d’un index discret.
    La suave musique du Menuet des Sylphes s’éteignit en un arpège inachevé à l’intérieur de la loge, et la voix du maestro cria :
    — Entrez !
    Avec toute l’affabilité dont il était capable, le major glissa précautionneusement sa volumineuse corpulence dans la pièce surchargée d’objets d’art : une entrée d’éléphant dans un magasin d’opalines.
    Le chef d’orchestre était au piano. Près de lui (Mac Intosh) un harpiste, à son instrument, semblait s’acharner sur le passage rédhibitoire qui avait déchaîné tant de reproches à la répétition.
    — Qu’est-ce que c’est ? dit Stanislas, agacé.
    Extérieurement il jouait à l’artiste dérangé, dans son labeur, par un événement inopportun. Mais intérieurement, il sentait la poigne de l’inquiétude l’assaillir à la gorge.
    Le major ne vit que l’extérieur, fort heureusement.
    Le harpiste (Mac Intosh) déployait mille astuces afin d’échapper aux regards de l’Allemand. Il dissimulait son visage derrière la console de l’instrument qu’il serrait contre lui avec passion tant il le sentait tutélaire.
    Achbach avança, salua et s’excusa :
    — Cette fois je n’arrête pas la musique. Bitte ! Continuez…
    Le maestro prit le parti de s’indigner comme un génie persécuté :
    — Non ! dit-il avec une théâtrale hauteur. Cette fois, c’est moi qui arrête !
    Il referma violemment le couvercle du piano à queue et se dressa.
    — Que cherchez-vous encore ? Toujours votre Anglais ? Vous ne l’avez pas encore trouvé ? Et voilà pourquoi, pour la deuxième fois, vous venez clouer le bec à Berlioz ?
    Achbach, imbu d’éducation germanique, fut aussitôt persuadé que le maestro devait être innocent : des clameurs de véhémente protestation sont pour un Allemand la meilleure expression de la bonne foi.
    Stanislas haussa encore le ton, se drapant dans sa dignité offensée.
    — Monsieur le Militaire, dit-il solennellement au major, l’Allemagne rend aujourd’hui la visite que lui a faite jadis la Grande Armée de Napoléon I er . Á cette époque de sa glorieuse Histoire, la France alla occuper votre pays. Mais elle le fit avec tact, à tel point que votre Beethoven écrivit en hommage de bienvenue et de reconnaissance le Concerto « L’Empereur » !
    Rien n’était historiquement plus faux, mais le ton de Lefort s’affermissait en une telle autorité que le major, fort ignorant de la genèse des chefs-d’œuvre, fut touché en plein cœur.
    — J’écoute…, dit Stanislas, faisant mine de tendre l’oreille, avec une irrévérence calculée.
    — Vous écoutez… Euh !… quoi ? hasarda Achbach un peu désemparé.
    — J’écoute, tonna le chef d’orchestre, et je n’entends rien en France qui puisse laisser aux siècles futurs un témoignage de gratitude à l’égard de votre « courtoisie ».
    Et, lui ayant lancé cette tirade bien sentie, le maestro entraîna Achbach dans un tourbillon de mouvements autour de la loge.
    — Je vais vous aider moi-même à rechercher votre Anglais ! dit-il. Venez donc, regardez ! Là ? Là ?…
    Il ouvrait tous les placards, tous les tiroirs qui se présentaient sous sa main.
    Il désirait surtout éviter que l’attention de l’Allemand ne s’implantât trop longtemps sur Mac Intosh.
    L’armoire fut entrebâillée avec nervosité, les rideaux écartés.
    — Là ! Un Anglais ? annonça Lefort irrité. Oui : mon habit de soirée coupé à Saville Row, à Londres, avant le début des hostilités !
    Tous les tiroirs de la coiffeuse furent ouverts, laissant apercevoir des perruques de rechange.
    — Pas d’Anglais ! constatait Lefort. Il n’y est pas ! Á moins qu’il ne se cache sous les perruques !
    Il souleva le couvercle du piano :
    — Là ? Il n’y est pas !…
    Il déploya la tenture de la penderie :
    — Là ? Il n’y est plus !… Euh !… je veux dire : il n’y est pas non plus !
    Il attira à lui le tiroir d’une commode.
    — Là ? voyez vous-même !
    Dans sa hâte gesticulante, il avait découvert le parachute enfoui…
    Il referma vivement, maudissant

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