La guerre de l'opium
d’escalier, était capitonnée de tissu rose fuchsia. Un grand miroir fixé au plafond permettait aux protagonistes d’assister à leurs ébats. La géante à la peau cuivrée lui avait attaché les pieds et les mains aux montants avant de grimper à califourchon sur son torse pour l’empêcher de bouger. Elle était si lourde qu’il avait manqué d’étouffer. En un tournemain, elle s’était dévêtue et ses longs cheveux noirs qu’elle avait laissés libres lui balayaient la poitrine.
— Pourriez-vous me détacher, s’il vous plaît ?
La courtisane avait ri aux éclats, laissant apparaître une impressionnante rangée de dents blanches à l’éclat carnassier. L’ogresse avait la mine gourmande.
Elle ne parlait évidemment pas un traître mot de français.
Puis, avec les gestes précis d’une vieille praticienne de l’exercice et sans toucher aux liens qui empêchaient Antoine de bouger, la géante l’avait entièrement déshabillé avant de le lécher de pied en cap à grands coups de langue, en insistant longuement - à croire qu’elle voulait le dévorer tout cru ! - sur le bout de son sexe dressé, vibrant et déjà au bord de l’épanchement, tandis que ses tétons noirs et grumeleux comme des mûres à point allaient et venaient sur le haut des cuisses du Français.
Incapable de résister à un traitement aussi efficace, Antoine s’était peu à peu senti aspiré par l’inépuisable et délicieuse énergie de l’entreprenante courtisane mauresque.
Mais hélas pour lui, son attente avait été déçue car brusquement la grosse danseuse avait redressé la tête avant de frotter d’un air entendu le pouce contre l’index et le majeur de sa main droite.
La garce voulait de l’argent et il n’avait pas le moindre sou vaillant…
Brûlant de découvrir la fin du traitement qu’elle avait commencé à lui administrer, il en était à se creuser les méninges pour lui faire comprendre que toutes ses consommations étaient prises en charge par Robert Leduc, quand la mère maquerelle avait fait irruption dans la chambre rose, tout excitée et hurlante, intimant l’ordre à la Mauresque, laquelle avait promptement remisé ses seins dans son corsage, de lui emboîter le pas.
Manifestement, un événement important venait de se produire puisque les deux femmes avaient promptement quitté la pièce sans lui jeter le moindre regard. Furieux d’être traité de manière aussi désinvolte, Antoine avait bien essayé, en gesticulant de façon désordonnée, de libérer ses mains et ses pieds, mais cela avait été en vain. Il gigotait comme un poirier secoué par le vent lorsqu’il avait soudain découvert, penché au-dessus de lui, le visage d’un homme dont les yeux avaient l’air aussi lubriques que son haleine était putride.
— Jeune… très bon… avait susurré ce personnage si peu engageant, dont la face était presque entièrement mangée par une barbe poivre et sel.
Il essaya de dévisager l’intrus. Le grain sombre de sa peau, sa lippe ainsi que son nez épaté témoignaient d’origines à coup sûr africaines. Il avait déjà descendu son pantalon bouffant à mi-cuisses.
Terrorisé par les visées de cet homme barbu qui s’apprêtait à le prendre comme un vulgaire giton à sa disposition, Antoine s’était mis à hurler de toutes ses forces :
— Robert Leduc ! Leduc ! Au secours ! A l’aide !
Grâce au miroir fixé au-dessus du lit, il pouvait constater que les gestes de son agresseur, dont l’index avait commencé à se fourvoyer à l’intérieur de ses fesses, devenaient de moins en moins équivoques.
Notre pauvre apprenti consul se voyait déjà passer à la casserole, violé et souillé au plus profond de lui-même, lorsque Leduc était enfin apparu, avant de tapoter sur l’épaule de l’homme au nez épaté qui s’était vivement retourné. Il avait suffi au douanier de dire à l’agresseur d’Antoine quelques mots pour le faire rengainer son sexe turgescent à l’intérieur de sa culotte bouffante. Puis, l’air penaud, l’individu avait rajusté sa ceinture et battu en retraite sans demander son reste, non sans avoir bredouillé à l’adresse du Français quelques phrases qui ressemblaient à des excuses.
— Il était temps que vous arriviez… J’ai bien failli passer à la casserole ! avait murmuré l’apprenti diplomate, pâle comme un linge.
— J’ai fait le plus vite possible. Je me trouvais dans une
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