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La guerre de l'opium

La guerre de l'opium

Titel: La guerre de l'opium Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jose Frèches
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épisode de ces ascètes qui servaient de pièges à aumônes.
    Elle ferma les yeux et se revit, toute petite, lorsque ses parents lui faisaient admirer l’or, la soie violette et rouge, les dentelles immaculées et arachnéennes, les chaînes d’argent pur ornées de croix pectorales serties de pierreries ainsi que les coiffures impeccables des prêtres du clergé anglican qui haranguaient la foule des fidèles sous les voûtes gothiques de la cathédrale de Durham à Pâques ou à Noël.
    —  Les Églises anglaises sont également très riches. Leurs évêques y sont habillés comme des princes. Ils sont rémunérés par la couronne britannique.
    —  Jamais un bonze n’accepterait de dépendre financièrement du Fils du Ciel   !
    —  Chez nous, il n’y a pas de Fils du Ciel. C’est une impératrice, du nom de Victoria, qui règne sur l’Empire britannique. Le catholicisme anglican est la religion officielle.
    —  Vos prêtres ont rang de mandarins   ?
    La comparaison, somme toute, était terriblement exacte.
    —  En quelque sorte… fit-elle en riant.
    Existait-il des religions qui n’abusaient pas de la crédulité des fidèles   ? Pourquoi les croyances des hommes les conduisaient-elles à des comportements parfois inhumains   ? Au nom de quelle sorte d’amour certains n’hésitaient-ils pas à tuer   ? La chrétienté avait mené les croisades tout en condamnant ce que les musulmans appellent « guerre sainte   »… Certains bonzes allaient jusqu’à faire payer le prix fort aux dévots qui souhaitaient assister à la crémation d’un moine persuadé qu’il s’agissait du meilleur moyen d’acquérir les mérites lui permettant d’atteindre la délivrance… Certains prêtres anglicans infligeaient à leurs fidèles d’abominables châtiments corporels qui consistaient, par exemple, à rester sans boire pendant deux jours ou à porter une ceinture d’épineux à même la peau   !
    La Pierre de Lune entraîna Laura Clearstone vers l’immense Bouddha couché de vingt mètres de long vers lequel convergeaient tous les fidèles. Le Bienheureux y était représenté expirant, apaisé et souriant devant le nirvana qui s’offrait enfin à lui. Au creux de la toge noircie par les fumées d’encens qui recouvrait ses jambes, des familles, la plupart en haillons, déposaient des guirlandes de fleurs de lotus ainsi que des bananes.
    —  Regarde-moi ces pauvres gens   ! Ils mangent à peine à leur faim et voilà qu’ils acceptent de se priver de tout pour honorer une simple statue de pierre   ! Quelle pitié   ! soupira-t-elle.
    —  Je sens que je vais finir moi aussi par me méfier des croyances… même si Confucius, dont les préceptes ont nourri mon enfance, ne s’est jamais pris pour un dieu   ! lui répondit La Pierre de Lune en éclatant de rire.
    Entre eux, il suffisait de peu pour que la joie reprît ses droits.
    Avant de quitter le temple, il emmena Laura planter un bâtonnet d’encens dans l’un des immenses chaudrons de bronze remplis de sable où en brûlaient déjà plusieurs centaines.
    —  Quand on offre à Bouddha un bâtonnet d’encens, on a le droit de faire un vœu   !
    Aussitôt, le visage de la jeune fille s’illumina.
    —  Oublier à jamais l’enfer… aller au paradis   ! Et toi, quel est ton vœu   ? pouffa-t-elle.
    S’il avait osé, il lui y eût répondu qu’il serait bien allé dans son paradis avec elle…
    Il regardait Laura souffler doucement, dans un crépitement d’étincelles, sur le tapis de braises rougeoyantes que laissaient les bâtonnets après s’être consumés.
    Chaque jour qui passait, elle le séduisait un peu plus : cette ineffable beauté si différente de celle des Chinoises dont ses longs cheveux blonds étaient le point d’orgue; son intelligence, cet incroyable sens de l’humour et de la repartie qui l’amenait à parler des choses les plus sérieuses avec légèreté… mais surtout ce profond respect avec lequel elle le traitait, lui, le banni qui vivait dans la rue comme un clochard…
    À son tour, il se mit à rêver.
    Ne jamais quitter Laura… Prendre son Yin et lui donner son Yang. Fusionner avec elle. Traverser, du même coup, les Dix Mille Vies en sa compagnie…
    Il osa lui prendre la main. La jeune fille, qui, jusque-là, avait toujours eu l’initiative, se laissa faire. Sur le coup, une bouffée d’euphorie lui monta aux narines et il lui lança avec allant :
    —  Chez nous, on dit serein

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