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La guerre de l'opium

La guerre de l'opium

Titel: La guerre de l'opium Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jose Frèches
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    —  Mais où ça, mon amour   ?
    —  Qu’importe   ! Là où nous pourrions faire notre vie sans être jugés par personne… Si tu décidais de repartir là-bas, derrière la mer, chez toi, à Londres, je t’y suivrais volontiers. Ici, je n’ai plus aucune attache. Mon seul pays, à présent, c’est toi, ma fleur sauvage   ! s’exalta La Pierre de Lune.
    —  Le voyage par bateau coûte très cher. Nous n’avons pas les moyens…
    —  Je gagnerai l’argent nécessaire… Je m’en sens capable   !
    —  Je n’en doute pas   !
    —  Grâce à ton Yin, Laura, tu décuples mes forces   ! Pour toi, d’un seul coup d’épée, je serais capable de terrasser n’importe quel dragon   !
    —  Remarque, nous pouvons aussi bien rester en Chine. Le pays est si vaste… Je suis sûre que nous y trouverons facilement un petit coin où on nous fichera la paix et où nous vivrons heureux et tranquilles… où nous pourrons élever nos enfants   ! fit-elle en souriant.
    Toujours le pragmatisme des femmes…
    Un papillon venait de se poser sur l’épaule de Laura.
    La Pierre de Lune voulait prendre cela pour un bon présage. Il voulait ne plus jamais devoir la quitter. Pendant qu’il lui faisait l’amour, pour la première fois depuis la mort atroce de son père, il s’était senti heureux et en paix avec lui-même.
    Il frissonna. L’idée de perdre Laura lui était insupportable. Pris de vertige, il ferma les yeux, chassa ce démon de l’angoisse qui venait le titiller, se ressaisit et déposa un baiser sur ses lèvres. Son corps chaud palpitait tendrement contre le sien. Sa poitrine à nouveau frémissante était prête à s’abandonner à ses assauts.
    Elle posa sa main sur sa cuisse en même temps qu’il mit sa main sur la sienne.
    Pour une fois, deux infimes portions de la Chine et de l’Occident s’étaient rencontrées, découvertes, comprises… et allaient s’aimer   !

 
    15
     
    Canton, 18 mai 1847
     
    Un soleil douteux n’allait pas tarder à pointer, faisant virer au gris pâle puis au jaune poussiéreux le bas du ciel jusque-là opaque et sombre d’une de ces nuits lourdes, oppressantes, accablantes même, qui annonçaient des journées voilées et caniculaires, où le moindre mouvement vous fait ruisseler des pieds à la tête.
    Barbara Clearstone, déjà levée depuis deux bonnes heures, sortit ses mains de la lessive et les regarda, plutôt satisfaite. Ses mains la rassuraient. Elle les observait avec fierté, contente. Râpeuses et gonflées, de plus en plus douloureuses aux articulations, rongées par la chaleur humide, ne témoignaient-elles pas mieux que tout de la nouvelle vie qu’elle s’était choisie   ?
    Elle menait enfin une existence sainte, une de ces existences où l’on reconstitue par le sacrifice le stock de bonnes actions qu’on a dilapidées et qui vous permet, grâce au rachat de vos fautes, de revenir dans le droit chemin qui mène au paradis. Une nouvelle vie qui vous chamboule des pieds à la tête, où plus votre corps souffre, se traîne, s’affaiblit, se disloque et plus vous vous sentez heureux…
    Depuis qu’elle avait quitté la maison aux allures de chalet de montagne, peu après le retour de Brandon en Angleterre, pour s’installer avec Laura et Joe chez le pasteur Roberts, Barbara Clearstone ne se sentait plus la même femme. Elle goûtait avec délices à cette exaltation des sens que lui procurait l’adoption de sa nouvelle posture sacrificielle…
    Le baptiste américain lui avait alloué l’un des minuscules baraquements fermant l’arrière-cour du presbytère où son propriétaire logeait jadis sa nombreuse domesticité. Trois de ces taudis menaçaient tellement ruine qu’il était hors de question d’y mettre un pied, tandis que les deux autres, rafistolés tant bien que mal, étaient occupés, l’un par Mélanie Bambridge et l’autre par les trois Clearstone.
    Volontairement entrée dans un monde où elle se sentait en paix, loin d’être un fardeau, l’existence harassante menée par cette pauvre Barbara lui paraissait désormais plus légère qu’une plume. Aux tâches ancillaires dont elle s’acquittait avec scrupule et abnégation dès l’aurore et jusque tard le soir, s’ajoutait, au cours de la journée, la distribution de brochures sur la religion chrétienne aux habitants de Canton. Postée pendant des heures, tant sous la pluie battante que sous un soleil de plomb, aux carrefours que Roberts lui avait

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