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La guerre de l'opium

La guerre de l'opium

Titel: La guerre de l'opium Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jose Frèches
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« élastique   », qui avait été à l’origine de leur interdiction AL , continuait à leur valoir, outre de multiples tracas au Vatican, des réflexions désobligeantes de la part des autres congrégations catholiques présentes en Chine, et surtout une condamnation sans appel de la part des Églises protestantes, lesquelles voyaient dans les « soldats de Dieu   » une engeance constituée de papistes sans foi ni loi.
    Ce jour-là, la petite communauté dont Freitas était le « tuteur   » recevait la visite du père Juan de Suarez, un Espagnol originaire de Grenade, à la face noiraude, court sur pattes et maigre comme un échalas. Suarez était l’« assistant spécial   » du père supérieur de la Province de Chine où il effectuait sa première tournée d’inspection. Nommé dix-huit mois plus tôt à ce poste, il s’était installé à la fin de l’année précédente à Macao et avait pour tâche de s’assurer de l’efficacité sur le terrain de l’armée des « princes noirs   », ainsi qu’on appelait les jésuites en raison de la couleur de leur vêtement.
    —  Comment se passe cette première tournée en Chine, père Juan   ? demanda le Portugais à son collègue, qui venait de célébrer la messe avec lui.
    —  Elle ne fait que commencer… La semaine prochaine, je serai à Hangzhou, puis je me rendrai à Pékin par le Grand Canal Impérial. De là, si Dieu le veut, je partirai pour Canton où je rendrai visite au père Toubert avant de repartir à Macao où je ferai mon rapport au père Giardini qui, entre-temps, sera revenu de Rome…
    —  Vaste périple   ! s’écria Freitas, tout en essuyant avec soin le calice et le ciboire en or massif utilisés pour la liturgie.
    —  Il me faudra six bons mois… si tout se passe bien   !
    Freitas, à présent, s’était mis à plier ses vêtements liturgiques.
    —  Vos premières impressions sur ce pays, père Juan   ? Je parie que vous allez déjà me raconter plein de choses passionnantes   ! fit-il avec flagornerie et sur un ton enjoué, désireux de se mettre son inspecteur dans la poche.
    —  Comment dire… On est surpris par la foule. C’est vrai, je n’ai jamais vu autant de monde dans les rues… Pas même à Séville, lors de la procession du Vendredi Très Saint. Ni à Rome sur la place Saint-Pierre, les jours de canonisation   !
    Le ton angoissé du père Juan trahissait l’agoraphobie dont il souffrait depuis sa tendre enfance. Il n’en avait jamais parlé à personne et n’avait aucune envie que son collègue portugais s’en aperçût.
    —  La Chine a toujours été le pays le plus peuplé de la planète… Il est probable qu’il le restera, si du moins les famines et les épidémies n’y mettent pas leur grain de sel…
    —  Comme vous y allez… souffla Suarez en épongeant son front sur lequel perlaient de grosses gouttes de sueur.
    C’était peu de dire qu’il avait du mal avec ces milliers de Chinois qui se pressaient dans la moindre ruelle de Shanghai, cette immense ville tentaculaire à côté de laquelle Macao n’était qu’un village. Comment ses habitants pouvaient-ils y vivre entassés à ce point les uns sur les autres   ! Ils lui faisaient penser à ces rats qui sont capables de se rassembler par milliers dans des caves autour de leur roi et finissent par s’entre-dévorer.
    Il réprima un frisson en pensant au périple qu’il avait à accomplir. Dans quel état reviendrait-il à Macao, si tant est qu’il y revînt   ?
    —  Vous savez, ici, tout est gigantesque, presque hors de proportion… Une crue du fleuve Bleu peut provoquer jusqu’à cinquante mille morts dans les faubourgs d’une seule ville. Il y a deux ans, la famine qui a sévi au nord du pays a entraîné le déplacement de plusieurs centaines de milliers de personnes en moins de quinze jours…
    —  Quand on pense à toutes ces âmes qui ne connaissent pas la Lumière de Notre-Seigneur Jésus… Nous avons un immense travail à accomplir   ! soupira l’Espagnol en s’efforçant de ne pas trembler, tandis que le Portugais enveloppait le calice et le ciboire de feutrine avant de les ranger dans le tabernacle de la sacristie.
    —  Surtout, mon père, il nous faudrait des moyens d’action plus importants que ceux dont nous disposons actuellement. Le nerf de la guerre est essentiel quand on mène un combat comme le nôtre… ajouta le père de Freitas Branco après en avoir refermé la porte à double

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