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La guerre de l'opium

La guerre de l'opium

Titel: La guerre de l'opium Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jose Frèches
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aller prêcher la bonne parole de Notre-Seigneur Jésus-Christ dans des villages de pêcheurs sur la côte méridionale… Ils ne rentreront de leur tournée apostolique que lundi prochain.
    —  Vous leur transmettrez mes fraternelles pensées et ma bénédiction apostolique.
    —  Je n’y manquerai pas. Ce matin, j’ai pensé qu’il serait judicieux de vous amener sur nos deux principaux chantiers à Shanghai : notre imprimerie et notre usine de fabrication d’ornements liturgiques. Cela vous convient-il   ?
    Pour la première fois, le visage noiraud de l’Espagnol afficha un sourire gourmand.
    —  Le père Giardini m’a déjà parlé avec enthousiasme de ces deux entreprises et il souhaite que je lui fasse un compte rendu exhaustif de leur état d’avancement.
    —  Eh bien, je vous propose d’y aller de ce pas   ! Ces établissements sont situés juste derrière notre maison… Cela me permet de les surveiller facilement, répondit Freitas d’un air complice.
    Nos deux jésuites se dirigèrent vers deux maisonnettes coincées entre un canal où croupissait une eau saumâtre et un petit champ de cultures maraîchères que des paysans étaient déjà en train de fumer avec les excréments familiaux. Comme il avait plu pendant la nuit et que le père Suarez était peu habitué à marcher dans la boue, il s’accrochait tant bien que mal à l’un des pans de la soutane de son collègue.
    Enfin, ils atteignirent les bicoques en question. Bien qu’elles fussent de construction récente, leurs murs tavelés de taches grisâtres paraissaient fondre comme du sucre mouillé et plier sous le poids de leurs toits.
    En Chine, en raison de la démographie et du climat, ce qui est neuf s’use très vite.
    —  Dans celle-ci, nous imprimons le catéchisme du père Ricci, lui expliqua le Portugais lorsqu’ils arrivèrent devant la porte du premier atelier.
    À l’intérieur, une dizaine de Chinois hâves et en nage s’affairaient devant les planches sur lesquelles avaient été gravées à l’envers les pages du Tianzhu Shiyi , littéralement Traité de la véritable doctrine de Dieu , ce catéchisme qui avait ému l’empereur Kangxi au point de l’amener à promulguer, en 1692, le fameux édit de tolérance pour le christianisme. Dans un cliquetis ininterrompu, les trois presses de l’atelier de xylographie tournaient à plein régime.
    —  Combien d’exemplaires sortez-vous par jour   ? s’enquit Suarez.
    —  Une cinquantaine. Depuis l’ouverture de l’atelier, nous en avons tiré plus de dix mille exemplaires que nous distribuons gratuitement à Shanghai et dans ses environs. Le mois dernier, nous en avons expédié trois cents au père de Vleughels. Cette activité nous accapare.
    —  Mais elle est essentielle… et sûrement très rentable   ! coupa l’Espagnol.
    —  Nos marges ne sont pas mauvaises, convint Freitas, d’un air de chien battu et qui désespérait de séduire son vétilleux inspecteur.
    —  A ce propos, ajouta ce dernier, où en êtes-vous des projets viticoles de la Compagnie   ? À Rome, ils conseillent tous de faire du vin. Selon eux, le vin est l’activité qui rapporte le plus. Je suis sûr que vos Chinois ne détesteraient pas en consommer…
    Face à des coriaces du genre de Freitas, remuer le fer dans la plaie était un bien doux exercice…
    —  Je n’ai pas encore eu le temps de me pencher sur la question du vin de messe, s’écria le Portugais en grimaçant.
    Suarez avait de quoi exulter : il avait mis dans le mille   ! Enfin un terrain sur lequel ce diable de Portugais Freitas pouvait être pris en faute. Cela faisait des mois que le père Giardini le tarabustait au sujet de la fameuse vigne qu’il eût souhaité voir plantée quelque part dans les environs de Shanghai.
    —  Nos réserves sont pratiquement épuisées et nous nous ruinons en frais de transport   ! lâcha, triomphant, l’Espagnol.
    —  N’ayant aucune connaissance en agronomie, j’ignore si le climat de Shanghai est propice à la vigne. Dès que j’aurai eu le temps de compulser des manuels adéquats, je compte bien m’y mettre, père Suarez. Vous le direz au père Giardini, n’est-ce pas   ?
    —  Si Shanghai n’est pas propice, il doit bien y avoir ailleurs des endroits où le sol et le climat s’y prêtent   ! La Chine est un pays si vaste… ajouta Suarez, rayonnant et impitoyable.
    —  C’est sûr…
    Sentant que Freitas rendait les armes, Suarez enfonça

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