La Guerre Des Amoureuses
dira où.
Olivier
Stupéfaite, elle
relut la missive plusieurs fois. La dernière lettre qu’elle avait reçue d’Olivier
avait été portée avant l’été par Michel de Montaigne, et il n’y faisait aucune
allusion à un prochain départ. Que s’était-il passé ?
Elle pensa immédiatement à un piège. Mais deux
choses lui prouvaient que ce ne pouvait en être un. D’abord l’écriture, qui
était bien celle d’Olivier, mais surtout la phrase :
Mon
cœur, si jamais vous m’avez fait cet honneur de m’aimer,
Il faut que vous me le montriez à cette
heure.
Quand M. de Mornay l’avait trouvée à
Dieppe, quelques jours après la Saint-Barthélemy, abandonnée, ne sachant même
pas son nom, il avait été intrigué par un médaillon qu’elle portait au cou. L’ayant
ouvert, il avait découvert cette phrase gravée à l’intérieur. Que
signifiait-elle ? Venait-elle de son père ou de sa mère ? Elle
ignorait tout de ses parents sinon qu’ils avaient sans douté été assassinés à
la Saint-Barthélemy. Quoi qu’il en soit, elle terminait toujours ses lettres à
Olivier avec ces deux lignes. C’était leur signe de reconnaissance.
Certaine que la lettre était de lui, elle fit
appeler le messager.
C’était un gentilhomme d’une cinquantaine d’années
au visage franc et souriant. Il portait une épée à manche de cuivre, une toque
à aigrette et un manteau brodé sous lequel elle aperçut un corselet.
— D’où venez-vous, monsieur ? lui
demanda-t-elle en l’examinant.
— De Chenonceaux, madame.
Elle leva un sourcil interrogateur.
— La reine est à Chenonceaux avec la Cour,
expliqua-t-il. Une personne que vous connaissez, M. Nicolas Poulain, a
reçu la charge de prévôt de l’hôtel. Comme il avait besoin d’un commis d’intendance,
il a proposé à monsieur Hauteville de l’accompagner…
Elle digéra l’explication avant de demander :
— Comment les connaissez-vous ?
— Le hasard, madame. M. Poulain m’a
sauvé la vie en forêt alors que mon cheval s’était emballé. J’étais dans la
maison de monsieur de Montpensier. Nous sommes devenus amis, ainsi qu’avec M. Hauteville.
— Et vous êtes venus à Montauban ? ironisa-t-elle.
— Il y a de cela trois semaines, monsieur
Hauteville nous a dit, à M. Poulain et à moi-même, qu’il voulait tout
quitter et vous rejoindre. M. Poulain lui a répondu que c’était folie de
traverser la France en ce moment, mais Olivier ne voulait rien savoir. M. Poulain
ne pouvait l’accompagner, cela aurait été faillir à son devoir, alors, comme je
n’avais pas d’obligations, je lui ai proposé de le remplacer. La vie de Cour m’ennuie
en ce moment, et j’aime ce genre d’entreprise un peu folle.
Le discours de Puyferrat mêlait ainsi
adroitement la vérité et le mensonge. Il avait été préparé par Mme de Montpensier
à partir de souvenirs sur les conversations qu’elle avait eues avec Poulain et
Hauteville.
Cassandre resta silencieuse, malgré tout
méfiante.
— Pourquoi est-ce vous qui êtes venu ici,
et non M. Hauteville ?
Il écarta les mains en signe d’évidence.
— Il n’avait qu’un passeport signé par M. de Cheverny.
M. de Montpensier, à qui j’ai demandé mon congé, possédait des
passeports signés de monseigneur de Navarre, son cousin. Il m’en a remis un.
— Il aurait pu en remettre un à M. Hauteville.
— C’était impossible, je ne lui ai jamais
parlé de lui. Je lui ai juste dit que je devais revenir chez moi, dans le
Périgord, pour une affaire de famille.
De nouveau elle resta silencieuse. Ce que lui
disait ce gentilhomme avait l’accent de la vérité. Néanmoins, un mauvais
pressentiment, inexplicable, l’incitait à rester sur ses gardes.
— Où est Olivier ? s’enquit-elle.
— Il vous attend à la tuilerie, sur la
route de Saint-Hilaire. C’est à environ une lieue d’ici.
— Je connais…
Elle regarda à nouveau la lettre, hésitante. Si
elle attendait le retour de Mme de Mornay, elle était certaine qu’elle
l’empêcherait d’y aller.
— Olivier m’avait prévenu que vous étiez
méfiante, aussi m’a-t-il remis ceci pour vous convaincre…
Le gentilhomme fouilla dans son manteau et en
sortit une lettre qu’il lui tendit.
Elle l’ouvrit. C’était la première qu’elle lui
avait écrite. Cette fois, le doute s’évanouit.
— Je m’habille et je vous rejoins. Attendez-moi
en bas.
Elle appela un
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