La Guerre Des Amoureuses
elle s’était une nouvelle fois appuyée sur les Lorrains. Elle avait
pourtant gracié Louis de Condé, mais sa clémence n’avait pas fait revenir la
concorde entre catholiques et protestants.
Comme les violences se déchaînaient dans le
royaume, elle avait convoqué un colloque de cardinaux et de ministres genevois
afin de réduire les divergences entre les deux croyances. Ayant échoué, elle
avait appliqué les préceptes de Machiavel, un admirateur de son
arrière-grand-père Laurent le Magnifique : Si tu peux tuer ton ennemi, fais-le,
sinon fais-t’en un ami. Elle avait donc fait assassiner quelques chefs
catholiques et protestants et envoyé dans leur couche des filles de son haras
de putains, comme ses ennemis nommaient son escadron volant de dames d’honneur.
Louise de La Béraudière – la Belle Rouet – s’était occupée d’Antoine de Bourbon
et Isabeau de Limeuil de Louis de Condé.
Avec la Belle Rouet, Antoine de Bourbon était
revenu au catholicisme, mais Isabeau de Limeuil s’était amourachée de Louis de
Condé qui avait repris les armes. Antoine avait été tué à Rouen, François de
Guise avait été assassiné par Poltrot de Méré – un conjuré d’Amboise – et Louis
de Condé était mort à Jarnac [27] battu par Henri [28] , son
fils chéri.
Seulement, à la tête des armées protestantes, Condé
avait été remplacé par l’amiral de Coligny, encore plus cruel et intolérant que
lui. Pour faire revenir la concorde, Charles IX avait approuvé la paix de
Saint-Germain [29] donnant aux protestants la liberté du culte. Il avait aussi accepté
que le fils d’Antoine de Bourbon [30] épouse
sa sœur Margot et que Coligny entre au conseil royal.
Mais le sanguinaire capitaine voulait
entraîner la France dans une guerre contre l’Espagne et Catherine de Médicis n’avait
eu d’autre choix que de le faire assassiner en demandant l’appui du fils de François
de Guise. Henri avait donc fourni l’assassin : le seigneur de Maurevert.
C’est ce crime qui avait provoqué l’effroyable
carnage de la Saint-Barthélemy.
Depuis, la guerre n’avait jamais cessé. Henri
de Navarre, le fils d’Antoine de Bourbon, était devenu le chef des protestants
et Henri de Guise – le Balafré – celui du parti catholique. Quant à son fils Henri III,
le dernier des Valois, il était maintenant broyé entre les deux factions, et
Henri de Guise ne cachait plus son ambition : se saisir du trône de France
dont, selon lui, ses ancêtres avaient été spoliés par les Capétiens.
Cette guerre contre les huguenots, conduite
par Charles de Mayenne et que son fils était contraint de soutenir, lui faisait
horreur. La reine mère détestait sincèrement ces violences et se désolait pour
le petit peuple qui souffrait. De ces affrontements, il ne sortirait que mal
et désolation de ce pauvre royaume, répétait-elle sans cesse.
En vérité, l’Italienne Catherine se moquait de
savoir qui des catholiques ou des protestants prendrait possession du royaume
des lys, car elle était païenne, persuadée qu’une mystérieuse divinité astrale
dirigeait le monde et que ses prêtres étaient les astrologues. Ceux-là lui
avaient prédit l’avenir qui s’était déroulé comme ils l’avaient annoncé.
L’astrologue Luc de Gauric [31] lui avait dit que son mari perdrait la vie dans un duel. Nostradamus
le lui avait confirmé dans les Centuries :
Le lion jeune, le
vieux surmontera,
Dans cage d’or, les yeux lui crèvera.
Plus tard, à Moulins,
Gauric et Nostradamus avaient interrogé devant elle la divinité astrale. Dans
une chambre obscure, Nostradamus avait psalmodié des incantations face à un
miroir jusqu’à l’apparition de l’image de François II. Le spectre avait
fait un tour sur lui-même. Après lui, elle avait reconnu l’image de son fils
Charles, qui avait fait quatorze tours. Enfin, celle d’Henri avait fait quinze
tours. François d’Alençon ne lui avait pas succédé, mais elle avait vu à sa
place l’image de Henri de Navarre qui avait tourné vingt-deux fois.
Catherine s’en souvenait encore en tremblant, elle
avait hurlé en voyant Navarre à la place de son dernier fils ! Plus tard, Nostradamus
lui avait expliqué que le nombre de tours était celui des années de règne de
chacun.
Jusqu’à présent, ces prédictions s’étaient
toutes réalisées. Charles et François avaient effectivement régné le nombre d’années
dévoilées par le miroir.
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