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La jeune fille à la perle

La jeune fille à la perle

Titel: La jeune fille à la perle Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Tracy Chevalier
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elle aussi, différente, on n’y voyait ni dalles en marbre, ni
épais rideaux de soie, ni chaises en cuir repoussé. Tout était simple et
propre, sans ornementation superflue. J’aimais cette pièce parce que je la
connaissais mais j’avais maintenant pris conscience de son austérité.
    À la fin de la journée, je
trouvai dur de prendre congé de mes parents, plus dur que la première fois car
je savais où je m’en retournais. Agnès m’accompagna jusqu’à la place du Marché.
Sitôt seule avec elle, je lui demandai comment elle se sentait.
    « Abandonnée », me
répondit-elle, un mot bien triste pour une fille de dix ans. Elle qui s’était
montrée enjouée pendant toute la journée avait soudain perdu son entrain.
    « Je reviendrai chaque
dimanche, promis. Et peut-être pourrai-je de temps en temps passer te dire un
rapide bonjour en rentrant de chez le boucher ou de chez le poissonnier,
répondis-je.
    — À moins que je puisse te
rejoindre quand tu vas faire les courses… », suggéra-t-elle, reprenant son
entrain.
    Nous nous arrangeâmes pour nous
retrouver plusieurs fois au marché à la viande. J’étais toujours heureuse de la
voir, du moment que j’étais seule.
     
    *
     
    Je commençais à me familiariser
avec la maison de l’Oude Langendijck, Catharina, Tanneke et Cornelia étaient
d’humeur changeante, mais, en général, elles me laissaient faire mon travail en paix. Peut-être fallait-il voir là
l’influence de Maria Thins. Cette dernière avait, en effet, décidé, pour
des raisons connues d’elle seule, que j’étais utile à la maisonnée et les
autres, enfants y compris, avaient suivi son exemple.
    Sans doute le linge lui
avait-il paru plus propre et plus blanc depuis que j’assumais la responsabilité
de la lessive. Ou la viande lui avait-elle paru plus tendre maintenant que je
la choisissais. Ou lui avait-il paru plus heureux dans un atelier propre. Les
deux premières constatations étaient exactes. Quant à la dernière, je n’aurais
pu dire. Quand lui et moi finîmes par nous parler, cela n’avait rien à voir
avec mes talents ménagers.
    Soucieuse de ne pas me créer
d’ennemies, je veillais à décliner tout compliment relatif à une maison mieux
tenue. Maria Thins appréciait-elle la viande ? Je suggérais que les
talents de cuisinière de Tanneke en étaient cause. Maertge trouvait-elle son
tablier plus blanc qu’auparavant ? Je disais qu’il fallait remercier le
soleil d’été particulièrement intense en ce moment.
    Dans la mesure du possible,
j’évitais Catharina. Il était clair qu’elle m’avait prise en grippe dès
l’instant où elle m’avait vue en train de couper les légumes dans la cuisine de
ma mère. Le bébé qu’elle attendait n’arrangeait pas son humeur, il la rendait
gauche, elle n’avait plus rien à voir avec la gracieuse maîtresse de maison
qu’elle s’imaginait être. Ajoutez à cela que l’été était chaud et que le bébé
était débordant d’énergie. Il lui donnait des coups de pied dès qu’elle
marchait, du moins le prétendait-elle. Au fur et à mesure qu’elle
s’élargissait, elle errait dans la maison l’air las, affligé. Elle restait au
lit de plus en plus tard, aussi Maria Thins avait-elle dû lui prendre les
clefs. C’était désormais elle qui, chaque matin, m’ouvrait l’atelier. Tanneke
et moi commençâmes à assumer de plus en plus des tâches de Catharina,
surveillant les filles, faisant les courses, changeant les couches de Johannes.
    Un jour où Tanneke était de
bonne humeur, je lui demandai pourquoi ils ne prenaient pas d’autres servantes. « Avec une maison aussi
grande, et compte tenu de la fortune de votre maîtresse et des tableaux
du maître, dis-je, ne pourraient-ils pas engager une autre servante ? Ou
une cuisinière ?
    — Hum, grommela Tanneke.
Ils arrivent à peine à te payer. »
    Cela m’étonna, les pièces de
monnaie que je serrais dans ma main chaque semaine étaient si peu… Il me
faudrait des années de travail pour pouvoir m’offrir quelque chose d’aussi beau
que la veste jaune que Catharina gardait négligemment pliée dans son placard.
Il ne semblait pas possible qu’ils puissent être à court d’argent.
    « Bien sûr, ils
s’arrangeront pour payer une nourrice pendant les quelques mois qui suivront la
naissance, poursuivit Tanneke d’un ton désapprobateur.
    — Pourquoi ?
    — Pour nourrir le bébé,
bien sûr.
    — Notre maîtresse

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