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La jeune fille à la perle

La jeune fille à la perle

Titel: La jeune fille à la perle Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Tracy Chevalier
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enfermée à clef dans ma chambre le soir ne
me plaisait pas. Catharina, hélas, en parut satisfaite. Sans doute pensait-elle
que m’enfermer serait une manière de me garder en lieu sûr et hors de sa vue.
« Dans ce cas, parfait », décida-t-elle. Elle était en général
prompte à se décider. Elle se tourna vers Tanneke et moi. « Demain, vous
monterez à vous deux un lit au grenier. C’est juste une solution temporaire,
précisa-t-elle. Jusqu’à ce que nous n’ayons plus besoin d’une nourrice. »
    Temporaire… Comme devaient
l’être mes allées et venues chez le boucher ou le poissonnier, pensai-je.
    « Monte un moment à
l’atelier avec moi », dit-il. Il la regardait d’une façon que je
commençais à reconnaître, avec l’oeil d’un peintre.
    « Moi ? »
Catharina sourit à son mari. Les invitations à se rendre dans son atelier
étaient rares. Elle posa sa houppette avec un grand moulinet du bras et entreprit
de retirer le grand col couvert de poudre.
    Tendant
la main, il arrêta son geste. « Laisse ça. »
    C’était presque aussi
surprenant que sa suggestion de me déménager au grenier. Tandis qu’il emmenait
Catharina à l’atelier, Tanneke et moi échangeâmes un regard.
    Le lendemain, la fille du
boulanger commença à porter le grand col blanc quand elle posait pour le
tableau.
     
    *
     
    Maria Thins ne se laissait pas
berner aisément. Quand elle apprit d’une Tanneke toute joyeuse la nouvelle de
nos déménagements respectifs, l’une à la cave, l’autre au grenier, elle tira
sur sa pipe en fronçant les sourcils. « Vous auriez pu échanger, dit-elle
en nous désignant de sa pipe, Griet aurait dormi avec la nourrice et toi tu
serais allée à la cave. Il n’y a pas besoin que qui que ce soit déménage au
grenier. »
    Tanneke n’écoutait pas, elle
était trop contente de sa victoire pour remarquer la logique de sa maîtresse.
    « Madame a donné son
accord », me contentai-je de dire.
    Maria Thins m’adressa un long
regard de côté.
    Dormir dans le grenier me
facilitait la tâche, même si j’avais toujours aussi peu de temps pour
l’accomplir. Je pouvais me lever plus tôt et me coucher plus tard, mais parfois
il me donnait tant de travail qu’il me fallait me débrouiller pour y retourner
l’après-midi alors que j’étais censée coudre au coin du feu. Je me mis à me
plaindre de ne rien y voir dans la pénombre de la cuisine et d’avoir besoin de
monter dans mon grenier où la lumière entrait à flots. Parfois encore, je
prétendais avoir mal au ventre et éprouver le besoin de m’allonger. Maria Thins
m’adressait ce même regard de côté chaque fois que j’inventais une excuse, mais
elle se dispensait de tout commentaire. Je finis par prendre l’habitude de
mentir.
    Une fois qu’il eut suggéré que
je dorme au grenier, il me laissa libre d’arranger mes diverses tâches
ménagères afin de me permettre de travailler pour lui. Il ne me vint jamais en
aide en mentant pour moi ou en me demandant si j’avais un peu de temps pour
lui. Il me donnait ses ordres le matin, s’attendant à les voir exécutés d’ici
le lendemain.
    Les couleurs elles-mêmes
compensaient mes difficultés à cacher ce que je faisais. J’aimais broyer les
ingrédients qu’il rapportait de chez l’apothicaire, des os, de la céruse, du
massicot, admirant l’éclat et la pureté des couleurs que j’obtenais ainsi.
J’appris que plus les matériaux étaient finement broyés, plus la couleur était
intense. À partir de grains rugueux et ternes, la garance devenait une belle
poudre rouge vif puis, mélangée à de l’huile de lin, elle se transformait en
une peinture étincelante. Préparer ces couleurs tenait de la magie.
    Grâce à lui, j’appris à laver
les diverses substances afin de les débarrasser de leurs impuretés et d’en
exprimer les couleurs authentiques. Je me servais d’une série de coquillages
pour récipients, rinçant les couleurs jusqu’à une trentaine de fois afin d’en
retirer craie, sable ou gravillons. C’était là un travail long et lassant, mais
il était gratifiant de voir la couleur devenir plus franche à chaque lavage et
plus proche de celle que l’on recherchait.
    La seule couleur qu’il ne me
laissait pas manipuler était l’outremer. Le lapis-lazuli était, en effet, si
coûteux et le procédé visant à obtenir un bleu pur à partir de la pierre si
difficile qu’il ne laissait ce soin à personne.
    Je finis par

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