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La jeunesse mélancolique et très désabusée d'Adolf Hitler

La jeunesse mélancolique et très désabusée d'Adolf Hitler

Titel: La jeunesse mélancolique et très désabusée d'Adolf Hitler Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Folco
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Sainte-Catherine. Adolf reconnut
l’endroit avec un pincement au cœur presque nauséeux : sa chambrette de la Stumpergasse était à quelques rues de là… Il passait devant ce couvent chaque fois qu’il se rendait à Schönbrunn… Et quand Gustl l’accompagnait, le triste spectacle lui avait inspiré des propos pertinents sur la pauvreté et la lâcheté de certains face à l’existence. Il aimait répéter avec une moue de la bouche : Comment peut-on en arriver là ? Désormais, il savait.
    Ils prirent place à la suite d’un trio qui les salua avec familiarité ; comme eux, ils venaient de l’asile de Meidling.
    Hanisch se pencha pour évaluer professionnellement la longueur de la queue.
    – On en a pour quarante-cinq minutes… minimum.
    Immobile, le corps d’Adolf se refroidit rapidement, l’obligeant à battre la semelle sur le trottoir givré. Comment aurait-il pu prévoir qu’un jour, pour avaler une misérable assiettée de soupe, il endurerait un climat digne d’un Esquimau du Grand Nord ?
    D’autres indigents arrivèrent et se positionnèrent derrière eux. Tous ces traîne-savates semblaient se connaître et se saluaient avec des sourires, prenant des nouvelles de l’un ou l’autre. Comme à l’asile, Adolf nota qu’une majorité parlait tchèque ; il y avait quelques Hongrois, et peut-être un Polonais.
    Tout en piétinant, les mains dans les poches, Adolf expliquait à sa nouvelle connaissance qu’à l’époque où il vivait à Linz il avait participé aux quêtes en faveur du Südmark et du Schulverein. Il s’interrompit à la vue d’un barbu hirsute qui remonta la queue et échangea quelques mots avec l’un des gars sous le porche. Ils se serrèrent la main et le barbu prit sa place.
    – Vous avez vu, un resquilleur ! dit Adolf outré.
    Hanisch haussa les épaules.
    – Si on avait cinq Heller , nous aussi on pourrait se payer une place sous le porche à l’abri du vent.
    – Il se vend des places dans cette queue ?
    Hanisch eut un sourire amusé : tant de naïveté le rajeunissait.
    – Tous ceux que tu vois sous le porche vendent leur place chaque matin, mais eux, ils dorment dans la rue pour être les premiers et puis ils sont drôlement bien couverts.
    Les oreilles, le nez, le front, les doigts, les orteils insensibilisés par la froidure, Adolf n’hésita pas ; il lui restait neuf Kronen et quarante-deux Heller de ses huit jours de chantier.
    – Allons-y, dit-il en déboîtant de la file et en marchant hâtivement vers le porche du couvent.
    Ce fut Hanisch qui négocia avec deux clochards vêtus de plusieurs épaisseurs de vêtements. Se méprenant sur la main gantée offerte par le plus âgé des barbus, Adolf la serra en murmurant un poli Guten Tag mein Herr , qui en fit ricaner plus d’un.
    – Content de te connaître, mon garçon, mais ce sera quand même dix Heller .
    Adolf toisa sévèrement Hanisch.
    – Vous m’aviez dit cinq !
    Le barbu répondit à sa place.
    – C’est bien cinq Heller , mais comme vous êtes deux, ça fait dix.
    – Je suis un peu juste en ce moment, mais je te le revaudrai, parole de Fritz Walter !
    Adolf paya à contrecœur. Les barbus se partagèrent les pièces, épaulèrent leur havresac et quittèrent le porche.
    – Je te remercie, dit Hanisch en posant la main sur l’épaule du jeune homme qui la chassa aussitôt :
    – Je n’aime pas qu’on me touche.
    Hanisch ignora la rebuffade. Il savait désormais que le blanc-bec avait de l’argent et il voulait bien être instantanément circoncis si, avant le soir, il n’avait pas trouvé le moyen d’en profiter à nouveau.
    – Si tu veux, après la soupe, je peux te montrer un endroit où tu pourras t’acheter un bon manteau pour moins de quinze Kronen .
    Adolf lui tourna le dos et s’intéressa à la rue qui s’animait. Les commerces levaient leur rideau ; c’était l’heure des bonnes, des livreurs, des écoliers : tous changeaient de trottoir à la vue du couvent et des gueux agglutinés autour de l’entrée.
    Même salée, même chaude, la soupe du couvent Sainte-Catherine était mauvaise et absolument pas roborative, seul le morceau de pain calmait la faim. Adolf regretta d’avoir attendu et surtout d’avoir dépensé dix Heller pour un pareil brouet de sorcière… sans parler de l’accueil méprisant en diable des bonnes sœurs de la Miséricorde.
    Vingt-cinq minutes plus tard, ils retrouvaient le trottoir verglacé. Adolf

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