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La lanterne des morts

La lanterne des morts

Titel: La lanterne des morts Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Frédéric H. Fajardie
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Vendéens, nouvel échec, les fit refluer. Par sifflet de marine, Valencey d’Adana donna le signal et l’on prit le pas de charge vers l’arrière.
    Bientôt, on aperçut le camp retranché, ses fossés, ses herses, sa muraille d’épais rondins hérissée de baïonnettes amies.
    Victoire, Mahé et Valencey d’Adana furent les derniers à s’y réfugier, la porte manquant se refermer sur La Fayette crotté, boueux, le regard noir de colère et d’une humeur massacrante.
    Suivant de loin et avec prudence, les Vendéens s’arrêtèrent à l’orée de la forêt. Puis l’un d’eux cria victoire et tous de hurler de joie, persuadés d’avoir «raccompagné» la demi-brigade «Liberté, liberté chérie» derrière ses fortifications. Et cette croyance de s’enraciner en leurs cœurs.
    C'est précisément à cette époque qu’un philosophe allemand, Emmanuel Kant, écrivait de la croyance qu’elle est une forme de non-savoir.
    Le hasard est parfois facétieux…

53
    L'orage se déplaçait vers l’est, la pluie cessa bientôt. Une odeur de terre mouillée et de feuilles humides flottait loin à l’extérieur de l’immense forêt.
    Les deux camps, cette nuit-là, fêtèrent la victoire avec une égale sincérité, mais de manière très différente.
    Chez les Vendéens, on célébra une messe d’action de grâces par laquelle ses serviteurs remerciaient Dieu.
    Puis on ramassa les cadavres les plus proches en les alignant côte à côte avant d’aller se coucher, le cœur léger, fiers d’avoir servi tout à la fois le petit roi Louis XVII, enfermé au Temple, et Dieu dont le silence valait approbation. Pas un ne se souvint des paroles de cet officier républicain fusillé peu auparavant près de Bressuire. Tandis qu’ils le tenaient en joue, il cita Voltaire à tous ces hommes aux visages fermés et comme murés dans la bêtise:
    – Si Dieu nous a faits à son image, nous le lui avons bien rendu!
    Arpentant son camp, Blacfort savourait ce qu’il pensait être un incontestable triomphe. Celui-ci le rendant très exceptionnellement indulgent, il reconnut à Valencey d’Adana et sa 123 e demi-brigade certaines qualités. Il ne sous-estimait pas l’exploit consistant à mener une vingtaine de canons à travers une forêt aussi dense. Ni que cette approche fût parfaitement silencieuse et réalisée dans des conditions très pénibles avec un temps épouvantable et des canons poussés à la main, le hennissement d’un cheval les pouvant trahir.
    Il admettait également l’excellence de la retraite des «Bleus». Oui, sans doute, un très bel exercice, de l’ordre, de la précision et de la méthode, toutes choses dont Valencey d’Adana possédait la parfaite maîtrise.
    Mais quelle que fût sa qualité, retraite il y avait!… Nul ne le pouvait nier. Et qui dit retraite d’une des armées dit victoire de l’autre. Des faits d’une telle netteté ne se discutent pas.
    Seule ombre au tableau pour Blacfort, ses pertes. Très élevées. Mais une chose est de déplorer un lourd bilan au soir d’une défaite et une autre est d’admettre «un certain coût» dans l’allégresse du triomphe. Et au reste, fi de toute cette comptabilité!
    Il gagna sa tente le cœur serein et les mâchoires crispées, tel qu’il sied à un vainqueur à la romaine. Il se savait attendu.
    Mme de Juignet-Tallouart, certes, mais une autre encore offerte par Chapeau-ciré. Et celle-là, cadeau d’un de ses fidèles, s’avérait prometteuse même si, destinée à remplacer Marie Toute Troussée, elle ne pouvait, ni aucune autre au monde, rivaliser quant à la beauté de la poitrine. Jamais il n’en vit de plus belle. Ah, ces deux globes parfaits!… Assis sur elle, il aimait faire l’amour à cette poitrine, se réjouissant de la petite flamme de mépris qu’il lisait dans les yeux de la belle.
    Il soupira: elle ne fut jamais des leurs!… Violée, capturée, quelque chose en elle n’abdiqua pas.
    Il eût aimé lui couper les seins avant de les manger même si d’expérience il savait ce mets semblable à de la tétine de vache mais quoi, c’eût été l’idée qu’il aurait mangée.
    – L'idée!... dit-il en levant un index pertinent.
    La belle Mme de Juignet-Tallouart l’attendait, nue, en compagnie de la gamine de quinze ans enlevée par Chapeau-ciré. Une petite servante d’auberge.
    Il fut immédiatement déçu car la petite servante, nue elle aussi, lui sourit, sans doute fière à l’idée de devenir la

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