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La lanterne des morts

La lanterne des morts

Titel: La lanterne des morts Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Frédéric H. Fajardie
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toi, aucun préjugé: épouser un marin, il faut être folle. Un marin, ça risque d’être coulé, mangé par les poissons, envoyé dans les bagnes d’Angleterre… alors que les notaires, tiens, le voilà l’avenir!
    – C'est ta faute si j’aime tant la marine.
    – Alors aime-la encore une fois, ma chérie, je ne peux pas me rassasier de toi et n’y parviendrai jamais: autant commencer sans tarder cette impossible mission, non?
    – Mon dieu, où vas-tu chercher pareils arguments?
    – J’ai appris le fusil un soir… Ils avaient bu, Chapeau-ciré m’a obligée. J’ai pensé le tuer en voyant que je tirais si bien mais une fois encore, j’ai été lâche.
    O'Shea secoua la tête.
    – Vous n’aviez pas le choix, Marie.
    – Si. Plusieurs fois j’aurais pu m’échapper. Mais j’étais terrorisée à l’idée qu’ils me rattrapent. Un jour, Blacfort m’avait dit qu’il prendrait grand plaisir à me couper les seins pour les manger. J’ai compris dans son œil, son œil unique, qu’il disait la vérité.
    – Mais c’est fini, à présent. Vous avez choisi la République, la République protège ses enfants.
    Le vent avait à demi séché les traces du terrible orage. Au loin, les sentinelles échangeaient des mots de passe et le camp retranché ne semblait dormir que d’un œil. Un cavalier, patient, faisait tourner son jeune cheval au bout d’une longe. C'était un cavalier espagnol, il parlait à sa monture avec une infinie douceur.
    John regardait Marie en souriant malgré lui. Elle baissa les yeux, ce regard la faisait souffrir car elle mesurait à cette échelle la nature des regards de la bande à Blacfort où elle ne vit jamais qu’un désir bestial et égoïste.
    Tous deux brûlaient d’envie de se jeter dans les bras l’un de l’autre, aucun n’osait.
    L'amour, bien souvent, est fils de la chance. Un mot peut suffire. Le hasard le voulut ainsi lorsque, pour dire quelque chose, le commodore O'Shea lança:
    – Vous êtes forte, Marie.
    La réponse jaillit, sans calcul:
    – Non. Et ce n’est pas lorsqu’on est fort qu’on a besoin d’amour mais tout au contraire quand la vie vous a fait trébucher.
    Il l’embrassa très tendrement.
    1 1463-1494. Penseur italien réputé pour l’étendue de ses connaissances et une fabuleuse mémoire.

54
    C'est vers midi qu’un Maya apporta un long rapport du baron de Saint-Eulay, cet officier républicain infiltré chez les Vendéens.
    Le message contenait deux nouvelles, une bonne et une mauvaise.
    Cette dernière, qui consterna Valencey d’Adana, concernait le jeune sous-officier fait prisonnier par les Vendéens. On lui avait arraché tous les ongles puis le malheureux fut allongé sur un banc tandis qu’avec des crics situés aux extrémités, par poussées successives de la manivelle et de la crémaillère, on lui tira les membres au point de les disloquer. Enfin, et tandis qu’il sombrait à demi dans l’inconscience, on le chaussa de bottes poreuses dans lesquelles on versa de l’huile bouillante.
    Il en mourut. On lui coupa alors la tête au couteau de boucher puis elle fut fichée sur un pieu lui-même enfoncé devant le fortin des Vendéens.
    Placée là, elle voisinait avec celle d’un Maya, le premier à tomber dans les guerres de Vendée. Dans la confusion du bombardement, l’Indien s’était introduit au cœur du camp royaliste, empruntant les vêtements d’un cadavre. Il poursuivait un but précis relevant d’un ordre ancien concernant les gardes du corps, le travail n’étant point achevé sur ce chapitre.
    Ayant de longue date observé les lieux depuis les plus hautes branches, il se dirigea vers la tente des gardes du corps mais fut déçu de n’y rencontrer que Marie Trois Tours, dite «la Grêlée», tremblant de peur. Il l’étrangla et s’apprêtait à ressortir lorsqu’il se trouva en face de Lefèvre dit «Va-de-bon-cœur». Celui-ci fuyait les combats mais tenait malheureusement un pistolet à la main. Il fit feu. Cependant, bandant toute sa volonté, l’Indien parvint avant de mourir à ficher son couteau de pierre dans la gorge de l’assassin.
    Blacfort, au matin, accepta de se déplacer pour venir observer ce cadavre que la masse superstitieuse des Vendéens, n’osant s’approcher, contemplait en se signant, voyant là non un homme mais une créature des enfers.
    Laissant la tête à sa troupe, Blacfort demanda pour son compte la peau, exigeant qu’elle fût tannée sans perdre son étrange

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