Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
La lanterne des morts

La lanterne des morts

Titel: La lanterne des morts Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Frédéric H. Fajardie
Vom Netzwerk:
des morts, ce n’était pas mon jour, voilà tout. La prochaine fois, peut-être…»
    Cet aspect fataliste de sa personnalité était en totale contradiction avec sa nature combative d’homme ayant des idées et les défendant. Mais confusément, il n’était pas loin de classer la mort parmi les choses défiant la raison, ce qui en faisait un phénomène fantasque, hors du champ de la réflexion et de l’analyse.
    Honnête cependant, il devait admettre que sa perception de la mort se modifiait depuis son mariage avec Victoire. Jusqu’alors, il ne bougeait pas d’un centimètre sous les tirs. Sachant l’effet d’un boulet, et qu’on se trouvait tué sur le coup sans rien ressentir, une magnifique indifférence l’habitait, qui contribua à construire sa légende. Aujourd’hui, l’honneur et le désir de ne pas décevoir lui commandaient de ne pas varier mais il savait tout ce qu’il perdrait en disparaissant. Tout, c’est à dire «elle», son grand amour.
    Intérieurement, à chaque engagement, il frémissait en songeant: «J’ai quarante ans, je connais enfin le plus bel amour qui soit, son infinie plénitude et tout ce qu’on abandonne à celle qu’on aime: non, je ne veux pas mourir!»
    Elle lui prit la main.
    – Dis-moi, demain, tout à l’heure, est-ce ta plus importante bataille?
    Comme toujours, il réfléchit avant de répondre:
    – C'est ma bataille finale avec Nicolas qui a tué ta sœur et mon père, Nicolas qui a trahi notre enfance. Pour ce qui concerne ma propre vie, c’est ma plus importante bataille. Pour le reste…
    – Pour le reste?
    – Une bataille parmi d’autres des guerres de Vendée sur leur fin. Si nous en finissons avec Blacfort trop aventuré au sud, Stofflet sera bientôt pris. Les généraux en guerre au front se sentiront soulagés, ne craignant plus d’être poignardés dans le dos.
    – Ta plus importante bataille, c’est celle qui précipita la fin de La Terpsichore ?
    Il réfléchit:
    – Franchement, non! C'était pendant la guerre d’Indépendance américaine. Le roi d’Angleterre avait dépêché contre La Terpsichore trois vaisseaux lourds: le Hood , le Hornet et le Honey Bee .
    – Que tu coulas tous les trois. Comme on suivait tes exploits dans toute la France!
    Il sourit.
    – C'est bien loin… Mais j’avais pour moi l’espace, le temps et la vitesse. Et nul ne me pressait. Je pense que, sans l’existence du convoi qui devait rallier Brest, cette grande urgence à éloigner et immobiliser les deux vaisseaux lourds lancés contre nous, j’aurais fini par les couler tous deux en attaquant de nuit et sans dommage pour La Terpsichore .
    – J’ai peur, Joachim. As-tu peur?
    – Oui.
    – Peur de mourir?
    – De mourir, c’est-à-dire de ne plus être là à chaque instant pour t’aimer, te protéger, bénéficier du privilège de ta présence lumineuse.
    Il caressa le ventre de la jeune femme, l’embrassa, plus bas encore, mordilla les jarretières aux cœurs enflammés tenant des bas dont elle avait gainé ses jambes eu égard à son plaisir.
    Il se redressa au niveau du bas-ventre de la jeune femme:
    – Comme si ton joli corps ne suffisait pas, il faut ces fanfreluches sataniques pour achever de me rendre fou!
    – Montre-moi jusqu’à quel point tu es fou, général!
    O'Shea et Marie étaient assis sur une souche d’arbre. Amants apaisés, ils se tenaient la main en regardant la lune et les étoiles. La nuit semblait complice, douce et parfumée. Elle posa sa tête sur l’épaule de l’Américain.
    Elle avait tenu à tout lui dire: le viol collectif, l’enlèvement, sa fonction de «meuble à plaisirs», les tortures auxquelles elle n’assistait jamais mais qu’elle n’ignorait pas. Des pans de vie sordides, affreux. Il écouta tout puis lui dit:
    – Quelle importance aujourd'hui?... C'est moi qui me conduis mal: tu m’as donné ta confiance, j’aurais dû t’offrir ma vertu.
    Avec un naturel qui fit fondre l’Américain, elle répliqua:
    – Oh non, John, pas cela: tu m’as appris au contraire que l’amour pouvait être une jolie chose.
    «Comment ne pas l’aimer?» s’était alors demandé O'Shea.
    Mais il répondit autrement:
    – Avant toi, j’aimais… toutes les femmes. Il n’en est pas une qui soit laide, toutes ont un petit quelque chose, ce «je-ne-sais-quoi» comme vous dites si joliment en français. Mais à présent, je ne veux plus que toi. Avec Mahé et le prince, nous formions une petite société, tous

Weitere Kostenlose Bücher