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La lanterne des morts

La lanterne des morts

Titel: La lanterne des morts Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Frédéric H. Fajardie
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épaules.
    – Eh bien qu’on le décrète de mise en accusation et il sera guillotiné dans trois jours!
    – Justement… Laisse-moi encore un peu de temps, citoyen, j’aimerais savoir à quoi il nous mène…

15
    MI-MARS 1794…
    Sans guide, au hasard, déterminant bien souvent la route en fonction des barrages républicains dont ils cherchaient à s’écarter, Victoire de La Chesnaie de Flers et le jeune Jean-Baptiste avaient réussi par hasard à passer au large du verrou de Niort, trouvant le passage à l’ouest de Saint-Maixent pour déboucher au cœur du bocage vendéen.
    C'était là très précisément ce qu’aurait ardemment souhaité Bienvenu, c’était très exactement ce que Victoire cherchait à tout prix à éviter. N’ayant ni l’un ni l’autre le sens de l’orientation, ils avaient marché nord-nord-ouest alors que la marquise souhaitait s’orienter au sud-est pour atteindre Ruffec.
    On pouvait cependant leur trouver quelques excuses. Ainsi, l’état de la cuisse et de l’épaule de Victoire, blessée à coups de crosse. Une forte fièvre pendant trois jours, la peau bleuie d’abord, puis noircie, au point que Jean-Baptiste, affolé, crut y voir des traces de gangrène.
    Cependant, l’hygiène de vie de la jeune femme, à quoi s’ajoutait que ce n’était pas là une plaie ouverte, fut pour beaucoup dans sa guérison et tout autant qu’elle n’eut pas à marcher, allant au dos du courtaud, cheval puissant et solide dont Jean-Baptiste prenait grand soin aux étapes.
    Avec l’approche d’un printemps que l’on devinait précoce, le brouillard de l’aube se faisait moins dense et le temps commençait à gagner en douceur.
    Chemin faisant, Victoire instruisait Jean-Baptiste, esprit ouvert avide de connaissances. Lui tenant la bride du courtaud, elle en selle faisant grande économie de l’usage de sa jambe car elle souhaitait marcher au plus tôt, elle l’entretenait aussi bien d’histoire que de mathématiques, de philosophie que de climat, expliquant par exemple la rigueur de l’hiver qu’ils venaient de subir par la raison que les très fréquents brouillards de l’automne 1793 avaient gelé le sol, empêchant la neige de fondre et maintenant ce temps glacé.
    Ils traversaient des lieux aux noms étranges tels «La Fourberie», «Tournebride» ou «Le Déluge».
    La nuit, un chat-huant suffisait à les réveiller et systématiquement ils repartaient à la pointe du jour, à l’heure où, dans les villages les plus reculés du pays, une cloche tintait en hommage aux trépassés des temps jadis.
    Sur leurs chapeaux, cocardes blanches ou tricolores alternaient, et il ne fallait certes pas se tromper lorsqu’on se présentait dans un village. Dans la mesure du possible, très limité, on tentait de manger sainement. Victoire se montrait intraitable sur la qualité de l’eau, voulant à tout prix éviter la dysenterie.
    Mais avant tout, elle avait enseigné à Jean-Baptiste qu’avec les républicains, le «vous» était banni, laissant toujours la place au «tu». Pareillement, plus de «monsieur» ou de «madame» mais «citoyen» ou «citoyenne». On ne disait plus «le roi» mais «le tyran» ou «le despote». Et pareillement bien des mots substitués à d’autres en raison des nouveaux temps.
    Si bien qu’ayant appris avec ardeur, Jean-Baptiste faisait bon effet aux barrages, étant le seul jeune de cette région qui puisse se présenter favorablement comme il l’avait fait voici peu en disant:
    – Salut, citoyen sergent. Vive la République une et indivisible. Mort aux tyrans!
    Les soldats bleus éprouvaient un réel soulagement à constater que les jeunes paysans – et à voir ses mains, celui-là en était un – ne se trouvaient pas tous pauvres créatures aux ordres des curés réfractaires et des «aristocruches» tels que disaient les sans-culottes.
    La consigne étant la consigne, et bien qu’il fût en de bonnes dispositions, le sergent demandait alors:
    – Où vas-tu ainsi?
    – Bressuire.
    C'est de là que Victoire et lui comptaient pivoter au sud-est vers Ruffec.
    – Bressuire?… Mais ça grouille de brigands!
    – Mais notre mère s’y meurt, citoyen sergent.
    – Elle, c’est ta sœur?
    – Elle fut en raison de sa cocarde blessée par des brigands et seule l’arrivée d’une patrouille la sauva d’un sort plus terrible encore.
    Relevant sa robe sur ses cuisses, Victoire montrait alors le coup reçu en disant:
    – Vois leur cruauté,

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