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La lanterne des morts

La lanterne des morts

Titel: La lanterne des morts Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Frédéric H. Fajardie
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mayas, Valencey d’Adana n’eut aucune peine à relever les traces de la petite troupe de Vendéens qui s’était rendue d’un point précis – sans doute un campement – au château de M. de Penchemel, où elle fut décimée.
    C'est sur ce trajet qu’il trouva le poste d’observation idéal, une petite éminence en forme de butte garnie d’arbustes, de mousses et d’épaisses fougères: «l’armée Blacfort» devait fatalement emprunter ce trajet.
    Valencey d’Adana n’ignorait pas qu’une troupe en déplacement est bruyante: chariots, artillerie, chevaux… Cependant, ne voulant prendre aucun risque, il chargea La Mellerie d’attendre avec leurs montures à un bon kilomètre: il suffit parfois du hennissement intempestif d’un cheval pour trahir une troupe placée en observation ou en embuscade.
    Connaissant Blacfort, Valencey d’Adana l’imaginait, non sans plaisir, piaffant d’impatience.
    Il avait en effet dépêché au château un premier messager, officier à cheval serrant une bougette 1 . L'homme, encore en selle, avait été atteint par trois couteaux de lancer et fut mort avant que de vider les étriers. Le sac de ce lieutenant, sans doute un officier d’ordonnance, ne contenait hélas aucun document concernant de futures opérations. En revanche, on y lisait des comptes rendus très détaillés sur les opérations passées ainsi qu’une liste très précise des besoins en matériel du régiment Blacfort, tous documents qui enchanteraient Gréville.
    Ne voyant point revenir l’officier, Blacfort envoya un autre messager, simple paysan sans Sacré-Cœur sur la chemise et ne possédant qu’un bâton de marche.
    Il fut arrêté par Valencey d’Adana et ses hommes lesquels, malheureusement pour lui, commençaient à très bien connaître les ruses des Vendéens.
    O'Shea saisit le bâton, le soupesa puis, se tournant vers le paysan:
    – Voilà un bâton bien léger…
    Saint-Frégant adopta un ton ingénu:
    – Ne serait-il point creux, commodore?
    L'Américain, d’un geste puissant, cassa le bâton contre un rocher, se baissa et ramassa un papier qu’il tendit à Saint-Frégant, ne quittant point le paysan des yeux:
    – Est-ce là un billet doux pour ta bien-aimée?
    – Lisez, je vous prie!… demanda Valencey d’Adana.
    Saint-Frégant s’exécuta:
    – «Eh bien quoi, Giraud de La Renardière, que faites-vous donc alors que je vous attends?… Quels étaient ces tirs?… Revenez immédiatement me faire votre rapport. »
    Insensible au regard réprobateur de ses compagnons, Dumesnil entraîna le Vendéen à l’écart, l’assomma et le noya dans un marécage tandis que Mahé suggérait:
    – Blacfort s’impatiente sans doute.
    – Il va venir lui-même!… compléta l’Américain.
    – Mais avec toute son armée!… remarqua Saint-Frégant d’un air amusé.
    C'est à cet instant que Valencey d’Adana avait arrêté sa décision de voir cette armée de plus près, du premier au dernier homme.
    Couchés tous les cinq derrière les hautes fougères du talus, Valencey d’Adana et ses amis furent défavorablement impressionnés par ce «défilé» sous couvert d’une forêt.
    Saint-Frégant, expert en ce genre de choses, compta non pas mille mais mille deux cents fantassins. Des Vendéens aguerris, visiblement bien nourris et qui semblaient résolus.
    La soixantaine de cavaliers, à l’évidence, était issue pour une bonne part de la noblesse locale, d’anciens militaires, certains encore en uniforme blanc de l’armée royale d’avant la Révolution: des carabiniers à cheval, des officiers des régiments du Hainaut, d’Artois, de Chartres, du Soissonnais… Des mousquetaires de la garde ordinaire du roi portant au chapeau un bouquet de plumes blanches.
    Une rangée de quatre tambours, silencieux, précédait un cavalier tenant un étendard blanc, en satin galonné d’or et d’argent, semé de fleurs de lys.
    Puis venait Blacfort monté sur un superbe cheval noir. Valencey d’Adana et Mahé échangèrent un regard et faillirent céder au fou rire.
    Valencey d’Adana souffla à l’oreille de Mahé:
    – Monsieur mon frère, admirez la vertigineuse montée en grade et la splendeur de la tenue lorsqu’on fait la guerre depuis à peine six mois.
    – Et nous, vingt-deux ans de campagnes, d’assauts et de services nous laissent en des grades plus modestes et des uniformes moins rutilants.
    On ne sait où il la trouva, un quelconque château à demi incendié,

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