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La Légende et les Aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d'Ulenspiegel et de Lamme Goedzak

La Légende et les Aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d'Ulenspiegel et de Lamme Goedzak

Titel: La Légende et les Aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d'Ulenspiegel et de Lamme Goedzak Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Charles De Coster
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battant en mesure la
laine des matelas sur un lit de bâtons, mais tout coîment et
disant :
    –
’T is (tijdt) van te beven de
klinkaert ! Il est temps de faire frémir le
clinqueur, – le verre qui résonne.
    C’est en Flandre le signal de fâcherie de buveurs et de
saccagement des maisons à lanterne rouge.
    Ulenspiegel but, puis fit trembler le verre sur la table en
disant :
    –
’T is van te beven de klinkaert
.
    Et les sept l’imitèrent.
    Tous se tenaient cois : la Gilline devint pâle, la
Stevenyne parut étonnée. Les happe-chair disaient :
    – Les sept seraient-ils avec eux ?
    Mais les bouchers, clignant de l’œil, les rassuraient, tout en
disant sans cesse et de plus en plus haut avec
Ulenspiegel :
    –
’T is van te beven de klinkaert ; ‘t is van te
beven de klinkaert
.
    La Stevenyne buvait pour se donner courage.
    Ulenspiegel alors frappa du poing sur la table, dans la mesure
des tapissiers battant les matelas ; les sept firent comme
lui ; verres, cruches, écuelles, pintes et gobelets entrèrent
en danse lentement, se renversant, se cassant, se relevant d’un
côté pour tomber de l’autre ; et toujours retentissait plus
menaçant, grave, guerrier et monotone : « 
‘T is van
te beven de klinkaert
. »
    – Hélas ! dit la Stevenyne, ils vont tout casser ici.
    Et de peur, ses deux crocs lui sortirent plus longs hors de la
bouche.
    Et le sang, de fureur et de colère, s’allumait en l’âme des sept
et en celle de Lamme et d’Ulenspiegel.
    Alors, sans cesser le chant monotone et menaçant, tous ceux de
la table d’Ulenspiegel prirent leurs verres, et les cassant sur la
table en mesure, ils chevauchèrent les chaises en tirant leurs
coutelas. Et ils menaient si grand bruit de leur chanson, que
toutes les vitres de la maison tremblaient. Puis, comme une ronde
de diables affolés, ils firent le tour de la salle et de toutes les
tables disant sans cesse : « 
‘T is van te beven de
klinkaert
. »
    Et les happe-chair alors se levèrent tremblant de peur, prirent
leurs chaînes et cordelettes. Mais les bouchers, Ulenspiegel et
Lamme, remettant leurs coutelas dans les gaines, se levèrent,
saisirent leurs chaises, et, les brandissant comme des bâtons, ils
coururent alertes par la chambre, frappant à droite et à gauche,
n’épargnant que les filles, cassant tout le reste, meubles, vitres
bahuts, vaisselle, pintes, écuelles, verres et flacons, frappant
les happe-chair sans pitié, et chantant toujours sur la mesure du
bruit du tapissier battant les matelas :
‘T is van te
beven de klinkaert, ‘T is van te beven de klinkaert
, tandis
qu’Ulenspiegel avait baillé un coup de poing à la Stevenyne sur le
muffle, lui avait pris les clefs dans sa gibecière, et lui faisait
de force manger ses chandelles.
    La belle Gilline, grattant les portes, volets, vitres,
fenestrage de ses ongles, semblait vouloir passer à travers tout,
comme une chatte peureuse. Puis, toute blême, elle s’accroupit en
un coin, les yeux hagards, montrant les dents, et tenant sa viole
comme si elle l’eût dû protéger.
    Les sept et Lamme disant aux filles : « Nous ne vous
ferons nul mal, » garrottaient, avec leur aide, de chaînettes et de
cordes, les happe-chair tremblants dans leurs chausses, et n’osant
résister, car ils sentaient que les bouchers, choisis parmi les
plus forts par le
baes
de l’
Abeille
, les eussent
taillés en morceaux de leurs coutelas.
    À chaque chandelle qu’il faisait manger à la Stevenyne,
Ulenspiegel disait :
    – Celle-ci est pour la pendaison ; celle-là pour la
fustigation ; cette autre pour la marque ; cette
quatrième pour ma langue trouée ; ces deux excellentes et bien
grasses pour les navires du roi et l’écartèlement à quatre
galères ; celle-ci pour ton repaire d’espions ; celle-là
pour ta gouge à la robe de brocart, et toutes ces autres pour mon
plaisir.
    Et les filles riaient de voir la Stevenyne éternuant de colère
et voulant cracher ses chandelles. Mais en vain, car elle en avait
la bouche trop pleine.
    Ulenspiegel, Lamme et les sept ne cessaient de chanter en
mesure :
‘T is van te beven de klinkaert
.
    Puis Ulenspiegel cessa, leur faisant signe de murmurer doucement
le refrain. Ils le firent pendant qu’il tint aux happe-chair et aux
filles ce propos :
    – Si quelqu’un de vous crie à l’aide, il sera occis
incontinent.
    – Occis ! dirent les bouchers.
    – Nous nous tairons, dirent les filles, ne nous fais point

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