Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
La Légende et les Aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d'Ulenspiegel et de Lamme Goedzak

La Légende et les Aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d'Ulenspiegel et de Lamme Goedzak

Titel: La Légende et les Aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d'Ulenspiegel et de Lamme Goedzak Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Charles De Coster
Vom Netzwerk:
personne. À boire !
    Un échevin parla alors et dit :
    – Cette sorcière n’est folle qu’en ce qui concerne le feu
qu’elle dit lui brûler la tête, mais elle ne l’est point ès autres
choses puisqu’elle nous aida avec un esprit lucide à découvrir les
restes du mort. Si la marque velue se trouve sur le corps de Joos
Damman, ce signe suffit pour constater son identité avec le diable
Hans, duquel Katheline fut affolée ; bourreau, fais nous voir
la marque.
    Le bourreau, découvrant le cou et l’épaule, montra la marque
brune et velue.
    – Ah ! disait Katheline, que ta peau est blanche ! on
dirait des épaules de fillette ; tu es beau, Hans, mon
aimé ; à boire !
    Le bourreau alors passa une longue aiguille dans la marque, mais
elle ne saigna point.
    Et les échevins s’entredisaient l’un à l’autre :
    – Celui-ci est diable, et il aura tué Joos Damman et pris sa
figure pour tromper plus sûrement le pauvre monde.
    Et les bailli et échevins prirent peur :
    – Il est diable et il y a maléfice.
    Et Joos Damman dit :
    – Vous savez qu’il n’y a point de maléfice, et qu’il est de ces
excroissances charnues que l’on peut piquer sans qu’elles saignent.
Si Hilbert a pris de l’argent à cette sorcière, car celle-ci l’est,
qui confesse avoir couché avec le diable, il le put de la bonne et
propre volonté de cette vilaine, et fut ainsi, noble homme, payé de
ses caresses ainsi que le font chaque jour les filles-folles.
N’est-il donc point en ce monde, pareillement aux filles de fous
garçons faisant payer aux femmes leur force et
beauté ? ?
    Les échevins s’entre-disaient :
    – Voyez-vous la diabolique assurance ? Son poireau velu n’a
point saigné : étant assassin, diable et enchanteur, il veut
se faire passer pour duelliste simplement, rejetant ses autres
crimes sur le diable ami qu’il a tué de corps, mais non d’âme. Et
considérez comme sa face est pâle. – Ainsi paraissent tous les
diables, rouges en enfer, et blêmes sur terre, car ils n’ont point
le feu de vie qui donne la rougeur au visage, et ils sont de
cendres au-dedans. – Il faut le remettre dans le feu pour qu’il
soit rouge et qu’il brûle.
    Katheline alors dit :
    – Oui, il est diable, mais diable bon, diable doux. Et
monseigneur saint Jacques, son patron, lui a permis de sortir de
l’enfer. Il prie pour lui monseigneur Jésus tous les jours. Il
n’aura que sept mille ans de purgatoire : madame la Vierge le
veut, mais monsieur Satan s’y oppose. Madame fait ce qu’elle veut
toutefois. Irez-vous contre elle ? Si vous le considérez bien,
vous verrez qu’il n’a rien gardé de son état de diable sinon le
corps froid, et aussi le visage brillant comme sont, en août, les
flots de la mer quand il va tonner.
    Et Joos Damman dit :
    – Tais-toi, sorcière, tu me brûles.
    Puis, parlant aux bailli et échevins :
    – Regardez-moi, je ne suis point diable, j’ai chair et os, sang
et eau. Je bois et mange, digère et rejette comme vous ; ma
peau est pareille à la vôtre, et mon pied pareillement ;
bourreau, ôte-moi mes bottines, car je ne puis bouger avec mes
pieds liés.
    Le bourreau le fit, non sans peur.
    – Regardez, dit Joos, montrant ses pieds blancs : sont-ce
là des pieds fourchus, pieds de diable ? Quant à ma pâleur,
n’en est-il aucun de vous qui soit pâle comme moi ? J’en vois
plus de trois parmi vous. Mais celui qui pécha, ce n’est point moi,
mais bien cette laide sorcière, et sa fille, méchante accusatrice.
D’où lui vient l’argent qu’elle a prêté à Hilbert, d’où lui
venaient ces florins qu’elle lui donna ? N’était-ce point le
diable qui la payait pour accuser et faire mourir les hommes nobles
et innocents. C’est à elles deux qu’il faut demander qui égorgea le
chien dans la cour, qui creusa le trou et s’en fut après le
laissant vide, pour cacher sans doute en un autre endroit le trésor
dérobé. Soetkin, la veuve, n’avait point de confiance en moi, ne me
connaissant point, mais bien en elles et les voyait tous les jours.
Ce sont elles deux qui ont volé le bien de l’Empereur.
    Le greffier écrivit, et le bailli dit à Katheline :
    – Femme, n’as-tu rien à dire pour ta défense ?
    Katheline, regardant Joos Damman, dit bien
amoureusement :
    – C’est l’heure de l’orfraie. J’ai la main d’Hilbert, Hans, mon
aimé. Ils disent que tu me rendras les sept cents carolus. Ôtez le
feu. ôtez le feu !

Weitere Kostenlose Bücher