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La Légende et les Aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d'Ulenspiegel et de Lamme Goedzak

La Légende et les Aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d'Ulenspiegel et de Lamme Goedzak

Titel: La Légende et les Aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d'Ulenspiegel et de Lamme Goedzak Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Charles De Coster
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Lamme. Le maître de la barque et
les Gueux vauriens s’entredirent :
    – Celui-ci est traître, il nourrit les moines, il faut le
dénoncer.
    À Dordrecht, la barque s’arrêta dans le havre au Blœmen-Key, au
quai aux Fleurs : hommes, femmes, garçonnets et fillettes
accoururent en foule pour voir les moines, et s’entre-disaient les
montrant du doigt ou les menaçant du poing :
    – Voyez là ces maroufles faiseurs de Bons Dieux menant les corps
aux bûchers et les âmes au feu éternel ; – voyez les tigres
gras et les chacals à bedaine.
    Les moines baissaient la tête et n’osaient parler. Ulenspiegel
les vit de nouveau tremblants :
    – Nous avons encore faim, dirent-ils, soudard compatissant.
    Mais le patron de la barque :
    – Qui boit toujours ? C’est le sable aride. Qui mange
toujours ; C’est le moine.
    Ulenspiegel leur alla quérir en ville du pain, du jambon et un
grand pot de bière.
    – Mangez et buvez, dit-il, vous êtes nos prisonniers, mais je
vous sauverai si je puis. Parole de soldat, c’est parole d’or.
    – Pourquoi leur donnes-tu cela ? Ils ne te payeront point,
dirent les Gueux vauriens ; et, s’entre-parlant bassement, ils
se coulèrent en l’oreille ces mots : « Il a promis de les
sauver, gardons-le bien. »
    À l’aube, ils vinrent à la Briele. Les portes leur ayant été
ouvertes, un
voet-looper
, courrier, alla avertir messire
de Lumey de leur venue.
    Sitôt qu’il en reçut la nouvelle il vint à cheval, à peine vêtu
et accompagné de quelques cavaliers et piétons armés.
    Et Ulenspiegel put voir de nouveau le farouche amiral vêtu comme
fier seigneur vivant en opulence.
    – Salut, dit-il, messires moines. Levez les mains. Où est le
sang de messieurs d’Egmont et de Hoorn ? Vous me montrez patte
blanche, c’est bien à vous.
    Un moine nommé Léonard répondit :
    – Fais de nous ce que tu voudras. Nous sommes moines, personne
ne nous réclamera.
    – Il a bien parlé, dit Ulenspiegel ; car le moine ayant
rompu avec le monde, qui est père et mère, frère et sœur, épouse et
amie, ne trouve à l’heure de Dieu personne qui le réclame.
Toutefois, Excellence, je le veux faire. Le capitaine Marin, en
signant la capitulation de Gorcum stipula que ces moines seraient
libres comme tous ceux qui furent pris en la citadelle et qui en
sortirent. Ils y furent toutefois sans cause retenus
prisonniers ; j’entends dire qu’on les pendra. Monseigneur, je
m’adresse à vous humblement, vous parlant pour eux, car je sais que
parole de soldat, c’est parole d’or.
    – Qui es-tu ? demanda messire de Lumey.
    – Monseigneur, répondit Ulenspiegel, Flamand je suis du beau
pays Flandre, manant, noble homme, le tout ensemble, et par le
monde ainsi je me promène, louant choses belles et bonnes et me
gaussant de sottise à pleine gueule. Et je vous veux louer si vous
tenez la promesse faite par le capitaine : parole de soldat,
c’est parole d’or.
    Mais les Gueux vauriens qui étaient sur la nef :
    – Monseigneur, dirent-ils, celui-ci est traître : il a
promis de les sauver, il leur a donné du pain, du jambon, des
saucissons, de la bière et à nous rien.
    Messire de Lumey dit alors à Ulenspiegel :
    – Flamand promeneur et nourrisseur de moines, tu seras pendu
avec eux.
    – Je n’ai nulle crainte, répondit Ulenspiegel ; parole de
soldat, c’est parole d’or.
    – Te voilà bien accrêté, dit de Lumey.
    – Les cendres battent sur mon cœur, dit Ulenspiegel.
    Les moines furent amenés dans une grange, et Ulenspiegel avec
eux : là, ils le voulurent convertir par arguments
théologiques ; mais il dormit en les écoutant.
    Messire de Lumey étant à table, plein de vin et de viande, un
messager arriva de Gorcum, de la part du capitaine Marin, avec la
copie des lettres du Taiseux, prince d’Orange « commandant à
tous les gouverneurs des villes et autres lieux de tenir les
ecclésiastiques en pareille sauvegarde, sûreté et privilège que le
reste du peuple ».
    Le messager demanda à être introduit auprès de Lumey pour lui
remettre en mains propres la copie des lettres.
    – Où est l’original ? lui demanda de Lumey.
    – Chez mon maître Martin, dit le messager.
    – Et le manant m’envoie la copie ! dit de Lumey. Où est ton
passeport ?
    – Le voici, Monseigneur, dit le messager
    Messire de Lumey lut tout haut :
    « Monseigneur et maître Marin Brandt mande à tous
ministres, gouverneurs et officiers de la république,

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