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LA LETTRE ÉCARLATE

LA LETTRE ÉCARLATE

Titel: LA LETTRE ÉCARLATE Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Nathaniel Hawthorne
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redescendre qu’il n’eût prononcé semblables paroles. Plus d’une fois, il s’était éclairci la voix, avait en frémissant fait pénétrer au plus profond de sa poitrine un air qui n’en sortirait que lourd du noir secret de son âme. Plus d’une, plus d’une centaine de fois, il avait bel et bien parlé ! Parlé ? Mais comment ? Il avait dit à ses auditeurs qu’il était le plus vil de tous les êtres vils, le pire pécheur, une abomination inimaginable, que la seule chose surprenante était qu’ils ne vissent point son misérable corps réduit en poudre sous leurs yeux par le brûlant courroux céleste ! Pouvait-il y avoir discours plus clair ? Les gens n’allaient-ils pas tressaillir et, poussés par un même élan, courir l’arracher à cette chaire qu’il déshonorait ? Point du tout ! Ils écoutaient et ne respectaient leur pasteur que davantage. Ils étaient loin de deviner la portée terrible de ses paroles : « Quel saint sur terre ! se disaient-ils les uns aux autres. Un homme de Dieu en vérité ! Hélas ! s’il voit pareilles noirceurs en son âme blanche, quel horrible spectacle lui présenterait ou la tienne ou la mienne ! »
    Le pasteur savait bien – hypocrite subtil, mais plein de remords qu’il était ! – en quelle lumière sa vague confession serait considérée. Il s’était efforcé de se faire illusion avec ces aveux. Mais il n’avait gagné qu’un péché, qu’une honte de plus et pas même le soulagement momentané de s’être leurré un instant. Il avait dit la vérité absolue et en avait fait un mensonge absolu. Et pourtant, par nature il aimait la vérité et abominait le mensonge comme bien peu. Aussi abominait-il par-dessus tout son misérable personnage !
    Ses tourments intérieurs le poussèrent à des pratiques mieux en rapport avec la vieille foi corrompue de Rome qu’avec la lumière meilleure de l’Église en laquelle il était né et avait été élevé. Sous clef et verrou, il y avait dans le placard secret du Révérend Dimmesdale une discipline sanglante. Souvent ce prêtre protestant s’en était flagellé les épaules, tout en riant amèrement de lui-même et se frappant plus impitoyablement en raison de ce rire. C’était également sa coutume, comme ce fut celle de nombreux autres pieux Puritains, de jeûner. Mais non, comme ses coreligionnaires, afin de purifier son corps et de le rendre plus apte à refléter les clartés célestes, mais pour faire pénitence et jusqu’à ce qu’il sentît ses genoux trembler. Il veillait aussi, nuit après nuit, parfois dans l’obscurité totale, parfois à la vacillante lueur d’une lampe et parfois en regardant son propre visage dans un miroir à la plus forte lumière possible. Il symbolisait ainsi l’introspection incessante par quoi il se torturait mais ne pouvait se purifier.
    Au cours de ces veilles prolongées, son cerveau, parfois, était pris de vertiges et des visions semblaient flotter devant lui. Elles lui apparaissaient ou indistinctement à la faible lueur qu’elles émettaient elles-mêmes dans les profondeurs de la pièce à peine éclairée, ou plus nettes et toutes proches dans l’intérieur du miroir. Tantôt c’était des hordes de formes diaboliques qui grimaçaient et se moquaient de lui et lui faisaient signe de venir les rejoindre ; tantôt, des théories d’anges étincelants qui s’envolaient vers les cieux, lourdement, mais devenaient de plus en plus légères en cours d’ascension. Parfois revenaient les amis morts de sa jeunesse et son père à la barbe blanche, avec un froncement de sourcils semblable à celui d’un saint, et sa mère qui détournait son visage en passant. L’ombre d’une mère ! Même si elle n’avait été que l’apparence la plus ténue d’un fantôme, il me semble qu’elle aurait pu jeter un regard de pitié sur son fils ! Puis, à travers la pièce que ces pensées spectrales avaient rendue si effrayante, c’était Hester Prynne qui glissait sans bruit, conduisant la petite Pearl toute vêtue d’écarlate et désignant du doigt, d’abord la lettre écarlate sur sa poitrine, ensuite la poitrine du pasteur.
    Aucune de ces visions n’abusait tout à fait Arthur Dimmesdale. Par un effort de volonté il pouvait, à tout moment, distinguer le monde matériel à travers la brume immatérielle de leur apparence, se convaincre qu’elles n’étaient pas de nature solide comme telle table de chêne massif, là-bas, ou tel

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