La Liste De Schindler
vous voulez que nous discutions, veuillez monter. Ou bien, suivez-moi jusqu’à mon bureau.
Il entra dans la cour tandis que les deux hommes le suivaient au petit trot de chaque côté de la voiture.
Une fois dans le bureau, ils se mirent à le questionner sur ses relations avec Goeth, sur les bonnes affaires qu’ils auraient faites ensemble.
— Ecoutez, dit Oskar. J’ai ici quelques valises qui appartiennent à Herr Goeth. Il m’a demandé de les mettre à l’abri en attendant qu’il soit relâché.
Les hommes de la Gestapo voulurent vérifier le contenu des valises. Oskar leur demanda de le suivre et, voyant Frau Schindler, il la leur présenta très froidement. Les valises d’Amon, pleines de vêtements civils et de vieux uniformes datant de l’époque où il était encore un jeune et fringant sous-officier, ne présentaient aucun intérêt. C’est alors que les hommes de la Gestapo mirent Oskar en état d’arrestation.
— Vous n’avez aucun droit d’arrêter mon mari à moins que vous ne nous en communiquiez la raison, dit Emilie d’une voix agressive. Berlin ne sera pas très heureux d’apprendre cela.
Oskar lui demanda de se calmer.
— N’oubliez pas de prévenir mon amie Klonowska d’annuler tous mes rendez-vous, ajouta-t-il.
Emilie savait ce que cela voulait dire. KIonowska tenterait de joindre au téléphone toutes les grosses huiles de sa connaissance, Martin Plathe à Breslau, les gens du général Schindler… Un des hommes du bureau V prit une paire de menottes et les passa aux poignets d’Oskar. Ils l’emmenèrent dans leur voiture jusqu’à la gare de Zwittau et l’accompagnèrent dans le train à destination de Cracovie.
Il semble que cette nouvelle arrestation l’impressionna plus que les deux précédentes. Cette fois-ci, aucune histoire ne circula sur des colonels SS éperdus d’amour qui auraient partagé sa cellule et avec qui il aurait ingurgité d’impressionnantes quantités de vodka. Oskar racontera plus tard comment les choses se sont passées. Alors que les hommes du bureau V l’escortaient à travers le grand hall néoclassique de la gare de Cracovie, un certain Huth vint à leur rencontre. C’était un ingénieur civil de Plaszow qui s’était toujours aplati devant Amon mais qui avait la réputation d’être très serviable. Peut-être cette rencontre était-elle fortuite, mais il est probable que Huth travaillait en cheville avec KIonowska. Alors que Huth tentait de serrer les mains prisonnières d’Oskar, un des hommes du bureau V lui demanda :
— Ça vous amuse de serrer les mains des prisonniers ?
— Cet homme, Herr Direktor Schindler, est un industriel important, un homme très réputé ici à Cracovie. Jamais je ne pourrai le considérer comme un prisonnier, répondit l’autre qui avait sans doute préparé son petit discours à l’avance.
Oskar n’en fut pas moins mis dans une voiture qui le conduisit jusqu’à la rue Pomorska à travers les rues maintenant familières de la ville. Ils le placèrent dans une cellule semblable à celle qu’il avait connue lors de sa première arrestation, avec lit, chaise, lavabo, mais dont les fenêtres étaient munies de barreaux. Bien qu’il eût adopté l’attitude d’un gros ours tranquille, il ne se sentait pas à l’aise. Quand ils l’avaient arrêté en 1942, après son trente-quatrième anniversaire, les rumeurs sur les chambres de torture de la rue Pomorska donnaient froid dans le dos, certes, mais elles restaient encore vagues. Aujourd’hui, il n’y avait plus rien de vague dans tout cela. Oskar savait pertinemment que les hommes du bureau V ne se priveraient pas de le torturer s’ils voulaient vraiment obtenir la peau d’Amon.
Herr Huth vint lui rendre visite ce soir-là avec un plateau-repas et une bouteille de vin. Il lui dit s’être entretenu avec Klonowska et Oskar oublia de lui demander si la rencontre à la gare avait été arrangée entre eux. Quoi qu’il en soit, Klonowska, d’après Huth, était en train de mobiliser les vieux amis.
Une commission d’enquête composée de douze personnes dont un juge des tribunaux SS lui fit subir un interrogatoire le lendemain. Oskar nia qu’il avait remis de l’argent au commandant afin que celui-ci « y aille doucement avec les juifs », comme il était consigné dans le témoignage d’Amon.
— J’ai pu éventuellement lui accorder un prêt, dit-il.
— Et pourquoi cela ? voulurent-ils savoir.
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