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La lumière des parfaits

La lumière des parfaits

Titel: La lumière des parfaits Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Hugues De Queyssac
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royaume, de perdre trop volontiers son temps sur le continent.
    À ne pas se battre contre la chevauchée anglaise, le dauphin Charles avait commencé à se forger une réputation d’invincibilité qu’il allait laisser, quelques années plus tard, à Bertrand du Guesclin, devenu le stratège de cette étonnante guerre où le plus fort s’usait à ne pouvoir combattre.
     
    Le roi d’Angleterre céda. À la parfin, il accepta les nouvelles offres de médiation des légats pontificaux. Le régent Charles n’en fut pas contrit non plus, car les villes surpeuplées étaient autant de foyers d’insurrection éventuels et la grogne croissait à la mesure des difficultés de ravitaillement. Privé de poisson de mer en Carême, Paris murmurait : la viande leur était interdite, et les tanches, les barbeaux, les brochets de la Seine et des fossés n’étaient pas pour des bourses plates. Le vin arrivait mal. Le prix du pain montait.
    D’ailleurs, les nouvelles du plat pays n’étaient pas meilleures.
    Les Anglais de Normandie multipliaient, souvent avec succès, des coups de main contre les forteresses royales, et une troupe anglaise occupait l’Isle-Adam, non loin de Paris. D’où l’on voyait parfois, du haut des remparts, d’épaisses colonnes de fumée qui laissaient penser qu’un village brûlait. L’ennemi avait mis à sac Vaugirard, Vanves, Issy…
    Toutes ces exactions provoquèrent un vif ressentiment contre les Anglais. Lorsque l’armée anglaise estrava ses pavillons dans la plaine de la Beauce, près la ville de Chartres, le ciel vint d’une miraculeuse façon au secours du royaume des lys. Le jour de la Quasimodo {26} , jour des ides d’avril, un très violent orage de grêle s’abattit une nouvelle fois sur les troupes et le train des équipages. L’armée fut mise en vaudéroute en moins d’une heure :
     
    Un ouragan si grand et si horrible descendit du ciel sur l’armée du roi d’Angleterre, qu’il sembla bien proprement que le siècle dût finir. Il tombait de l’air des pierres si grosses qu’elles tuaient hommes et chevaux, et les plus hardis en furent tout ébahis.
     
    Le roi Édouard, conscient que ces sujets lui reprochaient de chevaucher sur le continent au lieu de s’occuper de la justice du royaume, se décida enfin à négocier un nouveau traité.
    Les exigences de rançon furent ramenées de quatre à trois millions d’écus. Mais la Guyenne fut érigée en principauté au profit du prince de Galles. La Gascogne revenait en toute souveraineté au roi Édouard. Il en était de même de la ville de Calais et des comtés de Guînes, du Poitou, de toutes les provinces de la comté d’Armagnac qui devaient ainsi remettre les clefs de l’Agenais, du Quercy, du Rouergue, de la Bigorre et du comté de Gaure.
     
    Toutefois, les duchés de Normandie, de Touraine et de Bretagne, les comtés du Maine et de l’Anjou, les provinces de la Flandre, demeuraient au sein du petit royaume, amputé dorénavant d’un tiers de ses possessions. Le roi Édouard renonçait cependant solennellement à revendiquer la couronne de France.
    Tels étaient les termes des trente-neuf articles du traité de Brétigny qui serait signé prochainement à Calais. Si tout se passait bien, c’est-à-dire si le régent, le Parlement de Paris ou les états généraux ne s’y opposaient point.
    Le chevalier Jean des Marès, ce gentilhomme qui avait combattu à nos côtés et adoubé messire du Guesclin à Montmuran, en donna lecture publique à Paris, entre le jour des nones et le jour des ides {27} . Le dauphin avait réuni son conseil en l’hôtel de Sens. Y assistaient le nouveau prévôt des marchands de l’eau, un certain Jean Culdoë, et une forte délégation de bourgeois.
     
    Le nouveau traité devait solder quatre années de détention du roi Jean. Il devait mettre fin à la guerre qui opposait nos deux royaumes. Pour combien de temps ? me dis-je.
    Ce qui restait du royaume de France serait exangue, saigné à blanc pour s’acquitter de sa rançon. Se soulèverait-il contre le Français ou contre l’Anglais ?
    Nous jouions une partie où Gui de Salignac de la Mothe-Fénelon, mes écuyers et moi n’étions que d’impuissants paonnets dans un eschaquier sur lequel le déplacement des pièces était effectué par deux rois dont nous étions les otages.

    Début décembre de l’an 1360, le roi réunit son grand conseil en ses appartements de la Tour blanche. Il nous confirma les

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